Nos pacifistes bienheureux!

Denise Bombardier
Cette semaine, un universitaire à la retraite de l’Université de Montréal, Marcel Boyer, professeur d’économie, a voulu nous faire l’économie de nous retrouver en guerre avec Poutine.
Dans un texte paru hier dans La Presse, l’universitaire rejoint les propos du chef du Parti vert du Québec, Alex Tyrrell, qui, au début du mois, avait tweeté que les exigences de la Russie émises par Poutine, telles la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine, étaient « raisonnables et devraient être acceptées ».
Ce chef de parti bon chic bon genre a, quelques heures plus tard, « nuancé » sa pensée devant les réactions qu’il avait provoquées. Le Parti vert n’en sortira pas indemne.
Après plus de trois semaines de bombardements en Ukraine, l’armée russe tuant ses habitants et provoquant un exode de près de trois millions d’Ukrainiens, le pacifiste universitaire à la retraite croit nécessaire d’apporter des « nuances face au concert d’opprobre à l’encontre de Poutine ».
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Exigences
Aux yeux de l’économiste, les Occidentaux et l’Ukraine doivent céder aux conditions du tyran russe en exigeant la neutralité de l’Ukraine, la reconnaissance de la Crimée annexée et une relative autonomie de la région du Donbass.
Tous nos pacifistes actuels ne sont pas très différents de ceux qui avant la guerre 39-45 et face à la montée du nazisme voulaient que les gouvernements européens cèdent à l’agression meurtrière et aux multiples revendications de Hitler.
Le professeur écrit noir sur blanc que les exigences de Poutine pour stopper la guerre sont plutôt réalistes et raisonnables. En clair, de renoncer à créer des bases militaires et à déployer des armes dans les pays d’Europe de l’Est autrefois sous domination soviétique et qui sont devenus membres de l’OTAN après la chute du mur de Berlin en 1989.
S’ajoute aux pacifistes un nombre impressionnant de gens qui, habitués à vivre en démocratie, tentent de départager les torts, croyant que toute thèse mérite son antithèse, que les contraires s’égalent et que le bien et le mal sont les deux faces d’une même réalité. À l’évidence, des faiblesses diplomatiques, des erreurs stratégiques au cours des dernières années, le déclin politique des États-Unis à cause de Donald Trump, « l’ami » de Poutine qui a vite compris qu’il pouvait facilement instrumentaliser l’énergumène américain et une tolérance générale face au chef du Kremlin, sont des facteurs qui ont contribué à la situation désastreuse à l’heure actuelle en Ukraine.
Indifférence
Nos démocraties sont repliées sur leurs problèmes internes, tentant d’adopter la politique au changement de paradigme imposé par l’individualisme et les technologies modernes.
Nous avons eu l’imprudence de croire au slogan « jamais plus la guerre mondiale ». Le Canada, par exemple, a diminué son budget militaire en transformant ses soldats en simples gardiens de la paix.
Pendant ce temps, Poutine cadenassait son pays faisant fi de la politique réformiste de Gorbatchev, qui avait conduit selon lui à la dissolution de l’Union soviétique. Nos démocraties, engourdies au point de devenir naïves, ont manqué de vigilance.
Avec la guerre en Ukraine, Poutine nous fait reculer dans le théâtre tragique des guerres mondiales du XXe siècle. Et au-dessus de nos têtes, plane désormais la menace d’une guerre nucléaire. Que les accommodants à tout prix en prennent note.