Northvolt: en 2023, le risque paraissait raisonnable


Antoine Robitaille
Maintenant que le projet Northvolt est officiellement abandonné, plusieurs ont le reproche facile à l’endroit du gouvernement Legault.
Bien sûr, comme eux, comme vous, je trouve les montants perdus (jusqu’à 500M$) énormes. On aurait tellement pu mieux les utiliser dans nos hôpitaux et nos écoles.
L’opposition d’accord
Cela dit, en septembre 2023, après l’annonce, peu osaient critiquer le projet. Paul St-Pierre Plamondon appuyait «des investissements dans une filière qui peut donner un avantage concurrentiel sur le plan économique du Québec». Comme les libéraux: «C’est clair que le développement de la filière batterie au Québec est souhaitable» (Désirée McGraw). L’ancien chef du PLQ Philippe Couillard applaudissait aussi.
Je sais, le PQ et le PLQ ont par la suite condamné le manque d’évaluations environnementales et l’octroi d’énormes blocs d’énergie à cette entreprise étrangère. Ont fustigé la prise de risque trop grande.
Venant du PLQ, la critique du risque m’apparaît surprenante. Un an avant l’annonce de Northvolt, ce parti avait tenté de se faire élire en promettant le projet ECO, lequel prévoyait 100 milliards$ d’investissement (surtout public) dans l’hydrogène vert. Projet hasardeux toujours annoncé à la une de plq.org, d’ailleurs, sous une photo de Pablo Rodriguez.
Ce dernier écrivait sur X, mardi: «Northvolt, c’est l’échec de François Legault. Mettre tous nos œufs dans le même panier était une erreur. [...] Ce sont les Québécois qui paient pour l’improvisation économique de la CAQ.»
En 2023, M. Rodriguez était pourtant ministre du gouvernement Trudeau, lequel avait aussi promis à Northvolt d’importants coups de pouce financiers. (Versés une fois que l’entreprise aurait produit des batteries. D’où l’absence de perte d’Ottawa ici.) Le même gouvernement a risqué encore plus gros dans les projets ontariens d’usines de batteries Volkswagen et Honda, actuellement stoppés ou au ralenti.
Espoir
La filière batterie québécoise est-elle vraiment morte avec Northvolt? À Bécancour, où, la semaine dernière, j’ai pu visiter l’impressionnant Parc industriel doublé d’un port, on répond un gros «non». Cinq projets démontreraient que Québec n’avait pas mis tous ses œufs dans le même panier.
Ultium CAM, une coentreprise (General Motors et la sud-coréenne POSCO) dont l’usine a été mise en service fin juillet, commencerait à expédier du matériel aux usines GM «dans les prochains mois». Les autres: Nemaska Lithium, Nouveau Monde Graphite, Vale et Mirae. Il manque toujours un «cellulier» (comme Northvolt), qui assemble toutes les composantes de la batterie. Mais, si ces entreprises ont du succès, on aura au moins une valorisation de minéraux critiques québécois.
Pour revenir à Northvolt: le risque était certes trop grand. Facile de le dire deux ans plus tard, au cours desquels on a pris conscience que les Chinois avaient une longueur d’avance en matière de voitures électriques; et où Trump a plombé le développement de ce secteur en Amérique du Nord.