Monsieur Drainville, il faut cesser l’aveuglement volontaire

Collectif de signataires
Alors que plusieurs acteurs du milieu de l’éducation et chroniqueurs réclament des changements urgents dans notre réseau scolaire, un obstacle majeur se dresse devant nous: l’aveuglement volontaire.
De nombreuses études ont prouvé que le système québécois fonctionnait à trois vitesses (privé, public avec projets particuliers, public régulier) et l’existence de ce système à trois vitesses est reconnue par tout le réseau scolaire. Or, le ministre Drainville, qui dit vouloir appuyer ses actions sur des données probantes, semble rejeter celles-ci lorsqu’elles sont en contradiction avec ses convictions. Ce genre de réaction est empreint d'effluves de 3e lien...
Comment peut-on espérer apporter un vent d’amélioration dans notre système d’éducation alors que le grand patron nie l’évidence et la recherche?
- Écoutez l'enseignant Simon Landry donner son commentaire sur les propos de Bernard Drainville sur QUB radio :
Réalité inexistante
Il ne s’agit pas ici de se prononcer en faveur ou en défaveur de ce système à trois vitesses, ce débat peut certainement avoir lieu, mais bien de nier l’existence même d’un phénomène très bien documenté et qui persiste depuis fort longtemps. Que la CAQ refuse de s’attaquer au phénomène du système à trois vitesses est une chose, mais réfuter son existence en est une autre.
Ayant nous-mêmes enseigné autant au privé, dans des groupes de projets particuliers que dans des groupes dits “réguliers”, nous pouvons vous confirmer que ces trois vitesses existent bel et bien. Monsieur Drainville, venez passer quelques cours avec nous, sans caméras ni artifices, pour voir comment deux cours supposés être identiques donnés à deux groupes distincts (projet particulier et régulier) sont drastiquement différents. Vous qui dites ne pas “voir” ces trois vitesses, nous pourrons vous les montrer facilement.
Un peu comme la caricature des trois petits singes, si on ne voit rien, n’entend rien et ne dit rien, on peut certainement croire qu’une réalité n’existe pas.
Institut national d’excellence en éducation (INEE)
Cet aveuglement volontaire nous fait craindre le pire quant à la création de l'INEE. Alors qu’une implantation adéquate de cet institut pourrait devenir un atout important dans notre réseau, uniquement s’il est totalement indépendant du politique et des autres sphères d’influence idéologiques, de telles déclarations de la part du ministre nous fait craindre qu’il ne s’agira que d’un autre porte-voix des mandats politiques du parti au pouvoir. Nous avons vu durant la pandémie à quel point le ministre Roberge avait «interprété» les avis de la Santé Publique à sa manière pour ne pas reconnaître que la qualité de l’air dans nos classes était mauvaise. Sur ce point, M. Drainville, lui aussi, nie une évidence scientifique.
Le ministre demandera-t-il à cet institut de produire des recherches uniquement sur les sujets qui l’intéressent? Aurons-nous droit à une nouvelle réforme idéologique comme celle qui a trop longtemps gangrené notre réseau au tournant du millénaire ? Avec tous les pouvoirs que le ministre cherche à se doter dans son projet de loi 23, l’INEE deviendra-t-il un outil de propagande idéologique? Alors que plusieurs saluaient l’idée initiale d’un INEE, les plus récentes déclarations du ministre Drainville en font déchanter plus d’un.
Monsieur le ministre, nous sommes conscients que notre travail ne peut en aucun cas se comparer à celui d’un ministre, avec son grand salaire, son équipe de personnel attaché, sa limousine, ses bureaux fraîchement rénovés et son fond de pension généreux, mais nous vous implorons néanmoins de cesser de faire de l’aveuglement volontaire et d’écouter vos simples employés qui travaillent (moins fort que vous, selon votre perception) chaque jour dans nos écoles.
Plutôt que d’être en constante opposition, travaillons ensemble pour l’avenir de nos enfants.
Simon Landry, enseignant de la région métropolitaine
Sylvain Dancause, enseignant de la région de Québec
Sylvain Duclos, enseignant en Chaudière-Appalaches
Luc Papineau, enseignant de Lanaudière
Jonathan St-Pierre, enseignant de l'Abitibi-Témiscamingue