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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

Mommy, how come we lost the game?

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Photo portrait de Guy Fournier

Guy Fournier

2022-10-06T09:00:00Z
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Une enquête du Cégep de Jonquière répond à cette question que posait en 1971 la fameuse chanson Mommy, de Marc Gélinas et Gilles Richer.

Dominique Michel, puis Pauline Julien ont chanté tour à tour cette chanson crève-cœur (selon les mots de Sophie Durocher dans l’une de ses chroniques de l’an dernier). Émile Proulx-Cloutier vient de reprendre le même thème dans sa chanson Maman, mais il parle cette fois des langues autochtones. 

Quant au français dont la chanson originale disait « qu’on avait perdu la partie », il semble bien que le diagnostic de Gélinas et Richer ait été le bon, si l’on se fie à une enquête du Cégep de Jonquière auprès des étudiants en art et technologie des médias. En septembre dernier, l’institution a rendu publics les résultats décourageants de cette enquête.

Alors que les médias québécois seront le futur environnement de travail de la plupart des jeunes qui étudient à ce cégep réputé, ils consomment très peu de médias québécois. 

Neuf étudiants sur 10 regardent tous les jours TikTok, Instagram, Snapchat et Facebook. YouTube (86,9 %) et Netflix (85,4 %) sont leurs plateformes de visionnement les plus regardées, très loin devant celles qui offrent surtout du contenu québécois. La moitié des cégépiens francophones regardent les séries et les films majoritairement ou toujours en anglais. C’est pareil pour la musique et les chansons qu’ils écoutent majoritairement en anglais. Seulement 3,6 % écoutent majoritairement des chansons en français.

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LES CHANSONS ANGLAISES ONT LA COTE

C’est donc loin d’être étonnant que des émissions comme Révolution, Star Académie ou En direct de l’univers présentent autant de musique et de chansons anglaises. Quant à la presse écrite, il ne faut pas compter dessus pour propager l’usage du français. Seulement 3,3 % des jeunes s’intéressent aux journaux !

Les balados constituent la seule exception. Pour l’instant, les étudiants les écoutent plutôt en français parce que c’est plus facile et qu’il n’y a pas d’images pour en faciliter la compréhension. Demain, ils les écouteront sans doute en anglais.

J’ai toujours eu de la difficulté à croire mes petits-enfants (ils ont entre 20 et 40 ans) qui prétendent ne pas regarder des séries québécoises aussi populaires que Fugueuse, C’est comme ça que je t’aime ou Les beaux malaises. Il n’y a que la quotidienne District 31 ou une vieille série comme La petite vie qui trouvent grâce auprès de quelques-uns d’entre eux. Lorsqu’ils viennent chez moi, leurs enfants (âgés de 3 à 10 ans) passent des heures sur TikTok et sur YouTube. Ils regardent parfois Télé-Québec, mais jamais TVA et Radio-Canada. À moins d’un revirement qui n’est pas à prévoir, leur intérêt et leurs goûts seront donc demain exactement ceux des cégépiens de Jonquière.

PAS D’APPÉTIT POUR NOTRE CULTURE

Ce n’est pas la loi 96 ou les campagnes de francisation qui changeront quelque chose à la situation. C’est tout aussi illusoire de croire qu’en interdisant les portes des cégeps anglophones aux francophones, la situation du français s’améliorera. 

Il y a quelques années, les cégépiens de Jonquière, comme tous les cégépiens du Québec, avaient des connaissances générales des médias et de la culture québécoise. Ces connaissances leur permettaient d’avoir une base de référence commune. Ce n’est plus le cas, selon les enseignants. L’enquête le démontre sans l’ombre d’un doute.

Malheureusement, il n’y a plus guère d’appétit pour la culture québécoise chez les jeunes. Un bien triste constat. « Oh mommy, mommy, how come we lost the game ? »

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