Mommy, Daddy: une chanson crève-coeur!


Sophie Durocher
Vous vous souvenez dans les années 1970, quand Dominique Michel puis Pauline Julien chantaient Mommy, Daddy, la chanson sur la lente assimilation des francophones ?
Dans cette chanson crève-cœur, un enfant demande, en anglais, à ses parents de lui parler du temps où on s’exprimait en français au Québec...
« Mommy, mommy, I love you dearly
Please tell me how in French
My friends used to call me ?
Paule, Lise, Pierre, Jacques ou Louise
Groulx, Papineau, Gauthier
Fortin, Robichaud, Charbonneau ».
Il faudrait ajouter aujourd’hui à Robichaud, Charbonneau... Rousseau.
En effet, le PDG d’Air Canada Michael Rousseau est le parfait exemple d’assimilation des francos que dénonçaient Marc Gélinas et Gilles Richer dans leur complainte.
AIR CANADA : IT’S TOO LATE
Dans une entrevue à La Presse hier, Michael Rousseau, le PDG incapable de parler français, racontait :
« Du côté de ma mère, tous mes ancêtres sont francophones, mais malheureusement, du côté de mon père, le français a été perdu depuis trois générations. »
Il a suffi de trois générations pour que des Rousseau ne soient plus capables de prononcer les mots « Bienvenue à bord, nous vous souhaitons un bon vol ».
C’est exactement ce que décrit la chanson Mommy, Daddy, que pourtant certains qualifiaient de défaitiste, de pessimiste ou d’apocalyptique.
La chanson Mommy, Daddy a été écrite en 1971. Il y a donc exactement 50 ans. Elle se passe dans un futur cauchemardesque, où les petits- enfants ne comprennent plus la langue de leurs grands-parents. Chaque fois que je l’entends, mon cœur se serre. Vous vous rappelez la finale ?
La mère chante : « Un jour, ils partirent de France
Bâtirent ici quelques villages, une ville, un pays. »
Et l’enfant lui répond : « Mommy, daddy, how come we lost the game ?
Oh mommy, daddy, are you the ones to blame ?
Oh mommy, tell me why it’s too late, too late, much too late ».
Quand Michael Rousseau a répondu à mon collègue Pierre-Olivier Zappa qu’il n’avait jamais eu besoin d’apprendre le français pour habiter à Montréal, j’ai pensé à cette phrase : « Est-ce vous qui êtes à blâmer ? »
C’est nous qui avons permis que des Rousseau francophones aient donné naissance à des Rousseau unilingues anglophones ?
AIR CANADA, MOUTARDE RELISH
Toute la saga du PDG qui se moque du français m’a aussi fait penser à une autre chanson du folklore québécois : Mon oncle Edmond, de Jean Lapointe.
« Dans la famille du côté d’ma mère, y avait mon oncle Edmond / Y’était ben smat y parlait l’anglais surtout quand y’était rond / Y faisait des hip hip do you speak english me I can talk faster than you / One hamburger moutarde relish pis y était lousse quand y était saoul ». Après être parti vivre en Ontario, l’oncle Edmond revient au Québec « les poches ben pleines et pis la tête carrée » et parlant anglais... « Mais là c’était vrai pis c’en était triste pis y’était même pas saoul. Quand Edmond est mort y parlait l’anglais. »
Je me demande si Michael Rousseau, dont la mère est francophone, dont les aïeux étaient francophones, dont la femme est francophone, a la moindre idée qui sont Jean Lapointe, Dominique Michel ou Pauline Julien...