Mom Boucher: que le diable ait son âme


Normand Lester
Maurice Boucher est mort d’un cancer généralisé de la gorge. Il purgeait une peine bien méritée d'emprisonnement à perpétuité. On dit qu’il a prié et refusé jusqu’à la fin les médicaments pour atténuer la douleur. Espérait-il ainsi expier ses péchés et demander pardon? Pas de RIP pour lui, mais RII, Requiem in inferno!
L'ancien chef des Hells Angels, l'un des criminels les plus notoires de l’histoire du Québec, est notre Al Capone national. Durant les années 1990, Boucher contrôlait un empire de trafic de drogue de dizaines de millions de dollars.
La guerre des gangs de l’époque a fait plus de 200 victimes – tuées et blessées –, dont des innocents qui n’étaient pas ciblés, mais qui se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment.
Son irrésistible ascension
Avec Guy Ouellette, j’ai raconté dans notre livre Mom l'irrésistible ascension du petit criminel d’Hochelaga-Maisonneuve, en quête de pouvoir et d'argent, jusqu'à la tête des Nomads, filiale québécoise des Hells Angels, alors l’une des plus redoutables organisations criminelles de la planète.
- Écoutez l’entrevue d’Alexandre Moranville avec Normand Lester sur QUB radio :
Cinq ans après avoir été condamné dans une affaire d'agression sexuelle contre une mineure, Mom devenait, en 1989, chef des Hells pour livrer une guerre implacable et sans merci aux Rock Machines et à d’autres gangs de vauriens pour le contrôle du trafic de stupéfiants, non seulement dans les rues sales et transversales de Montréal, mais à travers le Québec et jusqu’en Ontario.
Il fallut que ses porte-flingues tuent un enfant et deux gardiens de prison avant que les politiciens et les flics décident de «mettre le paquet» pour s’en débarrasser. Et ce ne fut pas facile. Acquitté dans un premier jugement, ce n’est qu’en appel qu’il fut finalement condamné à la perpétuité.
Des motards aux gangs de rue
Aujourd’hui, bien qu’ils soient toujours très actifs dans le trafic de drogue, les Hells ont perdu de leur superbe face aux gangs de rue qu’ils manœuvrent quand même – en partie – en sous-main. Le trafic des armes fait maintenant plus souvent les manchettes et préoccupe donc plus les politiciens que celui de la drogue.
Les vicissitudes de la vie amènent des gens de toutes les classes à vouloir fuir la réalité pour le bonheur éthéré des stupéfiants. Dans les quartiers pauvres où les familles monoparentales abondent, le trafic de drogues reste la seule voie des jeunes hommes désœuvrés vers la richesse.
La guerre à la drogue et la guerre à la pauvreté s’entretoisent.