Moins de voyages scolaires aux États-Unis, plus au Québec, SVP


Antoine Robitaille
On apprenait la semaine dernière dans Le Devoir que des autorités scolaires du Bas-Saint-Laurent ont annulé un voyage de fin d'année à New York.
J'imagine le désarroi de plusieurs des quelque 100 élèves du Centre de services scolaire des Monts-et-Marées (CSSMM): ils iront finalement à Toronto. «New York, but run by the Swiss»: c'est ainsi que le célèbre acteur Peter Ustinov a déjà décrit la Ville Reine, dans les années 1970! (Je ne sais pas si la boutade fonctionne encore.)
Trump 2.0
En 2017, je m'opposais dans ces pages à l'idée de boycotter les États-Unis, à cause de Trump: «J’irai quand même. En réécoutant la chanson de Sylvain Lelièvre "Oui nous irons, à Old Orchard cet été".»
En 2025, les circonstances ont profondément changé. Trump s'est radicalisé. Son entourage est devenu servile. Par conséquent, le boycottage me semble désormais légitime. Dans les 56 étés de mon existence, j'ai dû visiter le Maine une cinquantaine de fois. À l'été 2025, je ne m'y rendrai pas.
Trump 2.0, comme l'a souligné la CSSMM, veut détruire l’économie du Dominion pour mieux annexer celui-ci. Annuler les voyages aux États-Unis, c'est donc se montrer solidaire des «entreprises de la région, qui souffrent de l’incertitude créée par les menaces du président Trump», a déclaré la D.G. du CSSMM.
Elle se conforme de plus à une orientation du ministre Drainville: «Éviter autant que possible les achats de produits et de services américains.»
Occasion
Je conçois que d'autres CSS ailleurs au Québec en décident autrement cette année. Plusieurs avaient prévu ce déplacement aux États-Unis bien avant le tournant trumpien.
Mais à bien y penser, l'affaire peut représenter une occasion en or de repenser, dans les années subséquentes, les voyages scolaires.
À quoi doivent-ils servir? Pour les écoles, aller aux États-Unis constituait un réflexe peut-être aussi automatique que, pour les entreprises québécoises, d'exporter chez le voisin du sud. Il faut diversifier.
Occasion de voyager au Québec, un territoire qu'on connaître finalement très peu. Alors que les États-Unis, on en a plein nos écrans. Si l'on demandait à une classe d'élèves du collégial, dans un grand centre, par exemple, combien ont déjà voyagé au Saguenay, en Gaspésie, ou en Abitibi, je suis certain que peu d'entre eux lèveraient la main.
Je parierais que plus d'élèves ont séjourné au Maine, en Floride, à New York, voire au Mexique, etc.
À l'Assemblée nationale récemment, le Commissaire à la langue française Benoît Dubreuil déplorait le réflexe américain de nos écoles dans les voyages scolaires: «Pourquoi on n'utilise pas toute cette énergie, toutes ces ressources pour faire en sorte que les jeunes d’origines différentes se rencontrent ici au Québec et apprennent à se connaître?» Pourquoi ne pas amener des élèves des villes à s'immerger dans la réalité des élèves des régions et réciproquement ?
Dans son rapport de novembre 2024, il en fait une recommandation formelle qui, d'ailleurs, mériterait d'être appliquée rapidement: «Le MEQ doit se donner l’objectif d’universaliser, en quelques années, les jumelages entre élèves d’écoles différentes chaque année du primaire et du secondaire.»