Meurtre de Michel «Doune» Guérin: «C’est la révolte des gangs de rue»
Kathryne Lamontagne et Félix Séguin
Le meurtre de Michel «Doune» Guérin, un proche des Hells Angels, pourrait constituer un tournant dans le milieu des stupéfiants à Québec, alors que les trafiquants se soulèvent plus que jamais contre les motards criminalisés, a appris notre Bureau d’enquête.
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«C’est la révolte des gangs de rue», lance sans hésiter une source qui est bien au fait du dossier.
Notre Bureau d’enquête révélait en septembre dernier que plusieurs événements violents survenus à Québec seraient liés à un nouveau conflit entre des trafiquants indépendants ou reliés aux gangs de rue et les Hells Angels. Les premiers refusaient désormais de payer la «taxe» de 10% aux seconds, et ce, depuis plusieurs mois déjà (voir encadrés).
De tous les événements survenus à Québec depuis, le meurtre de Guérin «marque un tournant» dans cette guerre que livrent les indépendants aux Hells Angels, selon une autre source.
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Un «acteur important»
C'est que Michel «Doune» Guérin aurait été sollicité pour régler les conflits concernant les territoires de vente ou pour récupérer les cut dues aux motards criminalisés au cours des dernières années, selon des documents policiers consultés par notre Bureau d’enquête. Guérin semblait être un «acteur important» de cette démarche, nous dit-on.
Mais voilà que les gangs de rue et les indépendants ne souhaiteraient plus suivre ces règles. Et qu’ils ne tolèreraient plus de se faire «écœurer» par les «guerriers» liés aux Hells Angels, qui sont mandatés pour aller récupérer la «taxe», révèle une source.
«Ils ont identifié les joueurs influents qui permettaient à cette business-là de continuer à vivre. Et Doune, c’est lui qui ramasse l’argent pour un paquet de Hells et qui la faisait circuler», expose un informateur, qui rappelle que Guérin était bien installé dans l’économie légale avec ses commerces.
Nos sources estiment que les événements violents en lien avec ce conflit ne risquent pas de s’essouffler.
«Il va y en avoir d’autres», résume l’une d’entre elles.
«Ils vont lancer des cocktails Molotov, faire brûler leurs chars, tirer dans leur maison. C’est fou raide et c’est assez inquiétant», craint une autre.
La relève quitte le navire
Reste à voir comment les Hells Angels, vieillissants, réagiront face à ce nouvel affront. La relève manque dans les rangs des motards criminalisés, constatent nos informateurs.
«Leurs clubs-écoles sont en train de se défiler. C’est eux qui devraient faire le boulot pour les membres en règle, et ils ne le font pas», expose une source.
«Ils ont la chienne», renchérit une autre.
Cette situation crée un «changement de paradigme» principalement à Québec, poursuivent nos sources. Les Hells «n’ont plus le respect de personne» dans la capitale, résume un observateur.
«Qui va être en haut de la pyramide à la fin? Je ne le sais pas», termine-t-il.
Avec Jonathan Tremblay et Frédérique Giguère
L’origine du conflit
- La situation tendue dans l’univers du trafic de stupéfiants à Québec découlerait d’un conflit entre Dave «Pic» Turmel – la tête dirigeante du Blood Mafia Family (ou BMF), un gang de rue «rouge» très actif dans le trafic de stupéfiants sur la Rive-Sud de Québec – et Mathieu Pelletier, membre en règle des Hells Angels.
- Turmel refuserait maintenant de payer sa quote-part aux motards criminalisés. La règle veut que tous les réseaux de trafiquants – qu’ils soient dirigés ou non par les Hells Angels – paient systématiquement une «taxe» représentant 10% de leurs recettes pour pouvoir mener leurs activités sur le territoire contrôlé par les motards.
Plusieurs événements violents liés à ce conflit
- En mars, la résidence du Hells Angels Mathieu Pelletier aurait été visée par des balles.
- En août, la voiture de Dominic Simard, mieux connu sous son nom de rappeur, Fou furieux, qui est aussi membre du club-école des Hells, aurait été incendiée.
- À la fin octobre et en novembre, deux bâtiments, en Beauce, ont été la proie des flammes. Les locataires de ces immeubles seraient liés aux Hells Angels, selon La Presse.
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