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L'article provient de Le Journal de Québec
Culture

Cinq questions à Alexis Durand-Brault, réalisateur et coproducteur de la série «Mégantic»

Photo fournie par Club illico
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Photo portrait de Emmanuelle Plante

Emmanuelle Plante

2023-02-23T00:15:18Z
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Alexis Durand-Brault est passé de la publicité au grand écran, de la direction photo à la production. Dans chacune des séries qu’il réalise, il y a une recherche visuelle qui en fait son unicité. Les plans séquences d’Au secours de Béatrice comme le graphisme de Portrait-robot en font foi.

Avec sa complice Sophie Lorain, il a aussi produit Sortez-moi de moi et Désobéir, qui relate le combat de Chantal Daigle. Pour Mégantic, il s’est plongé au cœur d’une des pires catastrophes ferroviaires, au centre d’une ville tissée serrée dont les vrais protagonistes sont devenus des amis. 

Photo fournie par Yan Turcotte
Photo fournie par Yan Turcotte

C’est pour leur rendre hommage qu’il a livré une série aussi sensible que spectaculaire. Parce que comme on le dit là-bas, tant que l’on est dans la mémoire des gens, on reste vivant.

Tu as évoqué la volonté de faire, malgré la douleur des événements, une série lumineuse. Comment as-tu travaillé l’image?

Quand je lisais les textes, la notion de feu était incontournable, donc la lumière chaude s’est imposée. Pas question de jouer avec la lumière froide par contraste. C’est pour ça qu’il y a une lumière un peu jaune. Dans tout le show, on a intégré des points lumineux partout. Pour donner du «glow». Même si c’est subtil. Ça ajoute un petit côté onirique. C’est un show qui pourrait être dur à cause de son propos. Il a coûté cher. On veut que les gens l’écoutent. On aurait pu y aller cru, mais on ne fait pas un documentaire. La lumière comme la musique permettent de prendre un pas de recul, de voir les choses différemment. Et dès le début, c’était clair pour moi que la caméra allait toujours être en plein milieu. C’est de la réalisation immersive.

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C’est une série «chorale». On revoit des scènes semblables d’un épisode à l’autre à travers le regard de personnages différents. Comment se tournent ces scènes?

Je déteste tourner à plus d’une caméra. Nous avons donc tourné chaque scène en l’ajustant selon le point de vue de chacun des personnages. L’intensité n’est pas toujours la même puisqu’on la voit selon sa perception. C’est subtil, mais le spectateur ne ressent pas tout à fait la même émotion. Pour les scènes avec beaucoup d’explosions, j’ai utilisé 2 à 6 caméras. C’était du vrai feu, de vraies explosions. Pour les scènes d’action, je veux éviter d’avoir trop de découpage. Je fais peu de plans. Je trouve important que les gens aient le sens de la géographie. C’est comme si tu rentrais dans un tube. Tu es juste aspiré par l’histoire, par le point de vue des personnages.


Les acteurs ont eu des partitions intenses à jouer. Comment arrivaient-ils à reproduire ce niveau de jeu pour plusieurs prises?

Tout est une question de temps. On a pu prendre 45 minutes à une heure pour placer une scène. J’avais le temps d’essayer des choses avec les acteurs. S’ils ne sont pas sûrs, je peux les mener à bon port. La scène où le personnage de Luc Senay reçoit le corps de sa fille dans une petite boîte a pris cinq heures à tourner. C’est de la création qu’on fait.

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Ce projet a dû te mener dans des zones non explorées, ne serait-ce que techniquement.

On a fait affaire avec Louis Craig, qui a travaillé sur une centaine de gros films américains. Ça prend une expertise pour gérer du feu, des explosions, du propane. Quand tu allumes un feu, ça coûte 1000 $ la minute en propane. Ça ne s’éteint pas en claquant des doigts. Tu dois maximiser tes plans. Avec les artificiers, on a vu qu’il y avait 12 000 façons de créer des explosions. On devait recréer un geyser de feu tel qu’il avait été rapporté. Ma job, c’était aussi de gérer le danger. Pour les acteurs, je ne peux pas toujours utiliser des cascadeurs. Il y a parfois des éléments que je dois ajouter en postproduction, mais sinon en général, tout est vrai. Jouer au pompier, c’était le rêve de bien des petits gars. Des scènes comme ça, on n’a pas souvent la chance d’en faire au Québec.


Où avez-vous reproduit la ville de Mégantic?

On est allé à Ormstown. Le directeur artistique Jules Ricard a recréé une dizaine de façades, dont celle du Musi-Café. Mais il n’y avait pas de chemin de fer ni d’église. On les a ajoutés en 3 D. On a rajouté un bout de rue aussi pour avoir la bonne géographie. Faire la ville détruite, c’était de l’ouvrage aussi. Elle a été reproduite dans un dépôt à neige à Longueuil. C’était important que les gens de Mégantic reconnaissent leur ville. Par respect pour eux.

Disponible sur Club illico

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