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L'article provient de TVA Sports
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Match de 9 périodes: la soirée de hockey la plus folle de ma vie

Par un concours de circonstances, j’étais à Rivière-du-Loup vendredi soir pour le sixième match de la finale de la LNAH

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Photo portrait de Jean-Nicolas Blanchet

Jean-Nicolas Blanchet

2025-05-12T20:06:02Z
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Par un concours de circonstances, j’étais à Rivière-du-Loup vendredi soir pour le sixième match de la finale de la LNAH. Ç’a été la cinquième partie la plus longue de l’histoire du hockey.

Ç’a été la plus longue en Amérique du Nord en près de 100 ans.

J’ai quitté l’aréna après y avoir passé huit heures et avoir vu 178 tirs en 161 minutes et 33 secondes de jeu. Il était 3h40. C’est un sympathique partisan, «Rej», qui nous a ramenés à l’hôtel, mes chums et moi.

On était quatre pour la fête de 40 ans d’un de mes amis. On devait aller jouer au golf et voir du baseball professionnel le week-end dernier. On a annulé nos plans initiaux à la dernière seconde, car il annonçait de la pluie.

Sauf qu’on voulait vraiment jouer au golf et voir du sport. On a pensé aller à Toronto, London, Moncton... Mais la seule place où il y avait un match de sport, c’était à Rivière-du-Loup. Et il annonçait même du soleil. Let’s go!

On joue donc nos 18 trous en après-midi à Rivière-du-Loup. Après, on se rend à l’hôtel. Imaginez, on se dépêchait pour ne pas rater le réchauffement.

Je suis désolé de vous confirmer que cette chronique ne servira pas de publicité à Éduc’alcool. On était très festif, disons, dès le golf. Imaginez après neuf périodes en plus. Bref, j’ai vécu tout ça pleinement, comme fan.

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Courtoisie
Courtoisie

Tout le monde exténué

On était exténué seulement à descendre les escaliers pour aller au petit coin ou au bar. J’arrivais à peine à imaginer comment pouvaient se sentir les joueurs. Allez lire le texte de mon collègue Richard Boutin qui décrit bien ce que les gars ont fait pour tenir le coup. C’est incroyable.

Il a fallu que des gens dans l’entourage du club de Sorel partent acheter tout ce qu’il restait dans un dépanneur de Rivière-du-Loup encore ouvert.

Photo Maxime Amyot-Photographe
Photo Maxime Amyot-Photographe

Simon Danis-Pépin, 37 ans, m’a fait capoter. Cet excellent défenseur de 6 pieds 7 pouces, choix de deuxième ronde des Blackhawks de Chicago en 2007 (10 rangs avant Brad Marchand), avait tellement de crampes qu’il est parti en milieu de troisième période. Il devait se coucher dans le vestiaire. Mais il est revenu en neuvième période.

On se disait qu’il avait eu le temps de faire sa réadaptation. Le pauvre, il avait l’air incapable de bouger ses jambes quand il a célébré le championnat.

Quand Danis-Pépin a dû partir, ça voulait dire que Sorel devait rouler à cinq défenseurs durant... six périodes. Et Mathieu Brodeur, 34 ans, est devenu le défenseur numéro un. Il a joué entre 80 et 90 minutes, selon notre estimation.

Ce que plusieurs ignorent, néanmoins, ce sont les 48 heures que venaient de passer Brodeur.

Jeudi matin, il s’est levé à 5h30 pour aller sur le chantier, lui qui est charpentier-menuisier à Trois-Rivières. Il a joué le match numéro cinq à Sorel. Dodo vers 1h. Debout encore à 5h30 pour aller travailler jusqu’à midi. Départ pour Rivière-du-Loup, match de neuf périodes et retour à Trois-Rivières directement après le match parce que samedi matin, c’est le cours de danse de ses filles, lui qui est père de trois enfants.

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Le party attendra

Oubliez le gros party de célébration. Il est revenu avec quelques joueurs de sa région à bord d’une Dodge Caravan et ils ont mangé un McMuffin en passant au McDo de Québec.

«C’est la première fois que je reviens d’un match et qu’il fait clair», lance en riant l’ancien choix des Coyotes de l’Arizona, qui a fait un retour au hockey cette année après avoir été entraîneur adjoint chez les Lions de Trois-Rivières.

«Ça ne devait pas être du gros hockey vers la fin», a aussi reconnu Brodeur.

Il faut comprendre que la plupart de ces joueurs n’ont pratiquement plus le temps de s’entraîner. Ils ont des jobs et jouent le week-end.

«Je pensais cramper, mais je m’en suis sorti. Sur le banc, le coach n’avait rien à faire. On se regardait et celui qui était correct y allait.»

Il a raison, ce n’était pas du gros hockey. Mais de voir ces athlètes-là, ces papas-là, ces gars fin trentaine qui avaient travaillé le matin continuer de survivre pour gagner, c’était plus que spectaculaire.

«Mange de la m****, Malouin!»

Depuis 10 ans, dans les arénas du Québec, les frères Danick et Jérémie Malouin sont parmi les cibles préférées des partisans adverses. Il faut l’admettre, ils peuvent être un peu baveux et n’ont pas peur de brasser.

Je pense que j’ai entendu 30 fois «F*ck you, Malouin!» Même par un partisan avec un porte-voix.

Photo fournie par Danick Malouin
Photo fournie par Danick Malouin

J’ai parlé avec Danick lundi matin. Il revenait de donner son cours d’éducation physique dans une école secondaire de Granby. J’ai commencé la discussion en lui lançant une autre insulte.

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Ça semblait être de cette façon que tout le monde l’abordait vendredi.

Il est parti à rire. «On a tout entendu, moi et mon frère. On est bien conscient que ça fait partie un peu du folklore [...] En plus, à Rivière-du-Loup, c’est une des places les moins pires dans la ligue», m’explique le sympathique hockeyeur.

«On est habitué, on ne prend pas ça personnel. C’est plus les gens qui viennent nous voir que ça affecte», dit-il, comme son père et sa conjointe par exemple.

Et ça rend tout ça encore plus spécial quand on pense que le lendemain, il travaille comme tout le monde en allant enseigner au secondaire.

«C’est ça qui est bizarre. Il y a du monde, dans leur tête, qui pense que je suis juste un joueur de hockey. [...] J’éduque quand même notre jeunesse aussi.»

«On ne pratique presque pas. Je travaille comme enseignant. Quand je reviens, j’ai deux enfants à m’occuper», ajoute-t-il.

Et comme Brodeur, oubliez aussi la célébration après le match. Il a pris la route avec son père et son frère pour être de retour à Granby samedi vers 10h. Il fallait aller chercher chez les beaux-parents les jeunes enfants, qui s’en fichaient probablement que papa ait eu une nuit blanche.

Peu de chamaillage

À 35 ans, Danick Malouin en a vu de toutes les couleurs durant sa carrière de 10 ans dans cette ligue. Mais chose certaine, «tu ne te prépares jamais à une situation comme celle-là».

Comme défenseur, «je me suis dit de garder ça simple et de pousser la rondelle aux avants».

Oubliez le chamaillage à la suite des coups de sifflet après la première période de prolongation. Ça ne tentait plus à personne.

En huitième période, Danick y est allé d’un solide coup d’épaule sur le capitaine de Rivière-du-Loup, Tristan Pomerleau. Ce dernier avait la chance de pousser la rondelle dans le filet. «Là, je n’avais pas le choix, j’y ai sauté dessus. Et il m’a juste regardé, au sol, en me disant “Je suis tellement brûlé”, comme au désespoir», m’explique-t-il.

Chapeau également aux quatre arbitres qui ont tenu le coup. À un moment donné, je me disais par contre qu’il s’agissait de quatre juges de ligne. Ça prenait pratiquement une arme blanche pour être puni quand les prolongations s’accumulaient.

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