L’enjeu de l’économie était absent du discours du Trône
La pandémie, l’environnement et la réconciliation sont les priorités de Trudeau


Anne Caroline Desplanques
OTTAWA | La gouverneure générale a relancé les travaux à la Chambre des communes avec un discours du Trône évasif sur l’économie et le coût de la vie, les enjeux qui préoccupent pourtant le plus les Canadiens d’après les enquêtes d’opinion.
• À lire aussi: Discours du trône: les conservateurs réclament la fin des dépenses
« C’est un discours qui reflète les priorités du gouvernement : la réconciliation et l’environnement, mais il n’y a rien pour la relance économique post-pandémie et les problèmes de main-d’œuvre, qui sont parmi les causes de l’inflation », déplore l’économiste Ian Lee, de l’École des Affaires de l’Université Carleton, à Ottawa.
Les Canadiens aspirent à « une économie plus résiliente et un avenir plus propre et plus sain pour tous nos enfants », a fait valoir la gouverneure générale Mary Simon.
- Écoutez la chronique politique d'Emmanuelle Latraverse sur QUB radio:
Dans un discours prononcé principalement en anglais et entrecoupé de phrases en français et en inuktitut, sa langue maternelle, elle a souligné qu’il faut « aller plus vite vers une électricité complètement carboneutre ».
Or, sans croissance économique, le Canada sera incapable de décarboniser son économie pour ralentir les changements climatiques et s’y adapter, une opération qui coûtera très cher, prévient M. Lee.

Coût de la vie
Pour le gouvernement, « la priorité absolue » demeure le « contrôle » de la COVID-19, a dit la vice-reine.
Mais M. Lee s’inquiète du fait que le gouvernement continue de mettre la pandémie au premier plan alors qu’il devrait maintenant s’atteler à d’autres batailles. Il aurait notamment voulu voir un signal clair que l’équipe Trudeau s’inquiète de l’inflation.
« L’inflation est un défi mondial », a dit Mary Simon avant d’expliquer que pour lutter contre l’augmentation du coût de la vie, le gouvernement s’attaquera en priorité au logement et aux services de garde.
Deux mesures qui font « croître toute l’économie », a-t-elle précisé.

Toujours sur le plan social, la gouverneure générale a réaffirmé la volonté d’Ottawa d’imposer des normes nationales en matière de santé pour « renforcer » les soins de longue durée et les services de santé mentale.

Autochtones
Elle a ainsi repris des thèmes chers au Nouveau Parti démocratique (NPD), qui a signalé qu’il talonnerait le gouvernement sur ces enjeux. Les néo-démocrates ont aussi appelé maintes fois M.Trudeau à moins de rhétorique et à plus d’« actions » au chapitre de la réconciliation avec les autochtones, un terme récurrent dans le discours du Trône.
« Nous devons transformer la culpabilité qui nous accable en actions concrètes. Actions en faveur de la réconciliation », a insisté la première gouverneure générale autochtone de l’histoire du pays.

Dans cette optique, Ottawa érigera un monument national à la mémoire des survivants des pensionnats autochtones, et désignera un « interlocuteur spécial » chargé de « faire avancer la justice », a-t-elle dit.

CE QU’ILS ONT DIT

« On va voter pour le discours du Trône parce qu’on ne peut pas voter contre la tarte aux pommes »
– Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois

« Il n’y a rien dans le discours du Trône sur l’inflation, la crise du coût de la vie, la crise d’unité nationale, il n’y a pas de plan pour remettre les gens au travail »
– Erin O’Toole, chef du Parti conservateur

« Au total, c’est moins de 10 % du contenu du discours du Trône qui était en français. Ce discours est une gifle à tous les francophones du Canada »
– Claude Carignan, sénateur conservateur

« Dans le discours, nous avons beaucoup entendu les mots “vrai changement”, “vraie action”, mais dans les faits, c’était vraiment vide »
– Jagmeet Singh, chef du Nouveau Parti démocratique