Mark Carney et la dernière conquête des baby-boomers


Philippe Léger
En 2015, Justin Trudeau, visage de la nouveauté, avait été propulsé au pouvoir grâce au vote des jeunes de 30 ans et moins.
L’enthousiasme s’était dissipé rapidement lors de l’exercice du pouvoir.
Dix ans plus tard, l’histoire se répète pour les libéraux... à l’envers.
En 2025, Mark Carney pourra gagner cette élection grâce aux votes des Canadiens plus âgés, principalement la génération du baby-boom.
Si les libéraux sont aujourd’hui en avance, c’est d’abord et avant tout en raison de ce déplacement majeur des Canadiens âgés de 60 ans et plus vers les libéraux de Carney.
Carney et libéraux, valeurs refuges
J’y vois deux raisons fondamentales.
Ça a été dit puis redit: le sentiment collectif est celui de l’anxiété vis-à-vis de Trump. Cette anxiété, selon les sondages, est nettement plus élevée chez les baby-boomers.
Face à celle-ci, Mark Carney, bas beige, technocratique, incarnant le bon vieux centrisme libéral, est vu comme un refuge.
Carney le sait.
Sa campagne se base sur l’anxiété trumpienne à destination principalement des baby-boomers. Les derniers jours en font foi. En pleine tempête des tarifs, sa principale promesse a été de protéger les fonds de retraite.
Les jeunes Canadiens sont complètement évacués de son discours – chose que Trudeau n’avait jamais réellement abandonnée, notamment avec la création d’une panoplie de nouveaux programmes sociaux.
La campagne de Carney s’adresse, au fond, à ceux dont le Canada fonctionne assez bien – des propriétaires, des retraités, qui bénéficieraient davantage de baisses d’impôts.
Injustice
Pourtant, une injustice générationnelle ne cesse de grandir au Canada.
Même si on peut douter des remèdes du chef conservateur, on mesure mal à quel point le slogan du «Canada brisé» de Pierre Poilievre touche à un ressenti de nombreux jeunes canadiens, incapables d’accéder à la propriété et à la classe moyenne, ayant vécu les chocs économiques de 2008, de la pandémie et maintenant de la guerre commerciale.
Mais entre une campagne de rupture (Poilievre) et de stabilité (Carney), les Canadiens, principalement les baby-boomers, semblent opter pour le second choix.