Mark Carney à la Maison-Blanche: une (première) mission accomplie


Josée Legault
Pour sa première visite à la Maison-Blanche, c’est mission accomplie pour Mark Carney. Il s’est montré à la hauteur de ce que les Canadiens attendent de leur nouveau premier ministre.
Il s’est montré posé, habile, limpide et même très patient devant le verbiage incessant du président Trump. Mark Carney était manifestement l’adulte dans la pièce.
Après tout, si les Canadiens ont choisi de reconduire le PLC au pouvoir pour un quatrième mandat d’affilée, c’est parce qu’ils ont jugé Mark Carney capable de faire face aux menaces de guerre commerciale de Donald Trump.
Réaliste, Mark Carney avait d’ailleurs prédit qu’aucune «fumée blanche» papale ne sortirait de la Maison-Blanche. Personne au pays, de toute manière, ne s’attend plus à la moindre constance ou logique de la part du président.
Dans leur point de presse conjoint au Bureau ovale où Donald Trump trône avec sa cour, Mark Carney, d’un calme olympien, a su échapper au guet-apens habituel.
Il a su flatter ce président narcissique tout en communiquant son message central: «Le Canada n’est pas à vendre et ne le sera jamais».
Même lorsqu’il ne parlait pas, en levant simplement les yeux au ciel ou en faisant non de la tête, le langage corporel de Mark Carney marquait son désaccord avec certaines des élucubrations du président.
Contrairement au mépris dont il affublait Justin Trudeau, Donald Trump a même exprimé son «respect» pour Mark Carney et les Canadiens.
Pas fou à temps plein
Nous avons un «conflit amical», Trump a-t-il aussi lancé, sans son animosité légendaire. Du moins, cette fois-ci...
Il a néanmoins repris son fantasme de faire du Canada un 51e État américain. Frôlant une courtoisie tout inhabituelle, il a toutefois reconnu qu’«il faut être deux pour danser le tango».
Traduction: ça n’arrivera pas et il le sait très bien. Donald Trump est peut-être erratique, mais il n’est quand même pas fou à temps plein.
À son point de presse de fin de journée en solo, Mark Carney s’est donc tourné rapidement vers les défis qui l’attendent à Ottawa.
Une fois la visite terminée, les Canadiens attendront en effet du premier ministre qu’il réussisse à protéger la souveraineté économique du pays. Y compris avec la renégociation de l'Accord Canada–États-Unis–Mexique.
Car s’il est vrai que Mark Carney a su éviter le champ de mines du Bureau ovale, la suite s’annonce nettement plus délicate, risquée et complexe. Que laissera-t-il aller ou non sur la table de négociation?
Des conservateurs dégriffés
De retour au pays, nul doute que cette première mission bien ficelée l’aidera dans ses prochaines discussions avec ses homologues provinciaux et les partis d’opposition.
Face à un NPD grandement affaibli, la partie s’annonce déjà aisée. Le chef bloquiste Yves-François Blanchet lui a aussi promis sa collaboration.
Même chez les conservateurs, sonnés par la victoire des libéraux, Andrew Scheer, leur leader parlementaire, s’engage maintenant à appuyer le premier ministre au cas par cas «nonobstant nos différends partisans».
Résultat: pour Mark Carney, malgré le statut minoritaire de son gouvernement, en plus de sa visite réussie à Washington, le contexte postélectoral national lui est favorable.
En cette période trouble, il en aura grand besoin...