Manifestations No Kings en Floride : «Je suis inquiète depuis 2015»
Les gens ont peur de ce que pourraient devenir les États-Unis le jour où Donald Trump célèbre son 79e anniversaire avec un défilé militaire


Dave Lévesque
FORT LAUDERDALE | Ils étaient des milliers réunis sous un soleil de plomb pour la même cause, protester contre Donald Trump.
Plus de 2000 manifestations ont été organisées aux États-Unis samedi dans le cadre du mouvement national No Kings.
À Fort Lauderdale, ils étaient des milliers sur plus d’un kilomètre le long du Beach Boulevard pour scander des slogans anti-Trump pendant que les automobilistes klaxonnaient.

Pas de contre-manifestants en vue, à peine quelques automobilistes qui ont fait des doigts d’honneur. Le tout sous le regard de la police locale.
Le point commun qui unit les manifestants? La peur. Peur de perdre leur liberté, leurs acquis. Peur que l’histoire se répète.
Comme les années 1930
On s’arrête près d’une clôture pour regarder les événements et on discute avec Lydia, une femme dont la mère est Belge d’origine et qui décide de nous parler en français puisqu’elle notre le petit accent du représentant du Journal. Elle en a long à dire sur Donald Trump.
«Je suis inquiète depuis 2015, admet-elle sans détour. Je suis la fille d’un survivant du camp d’Auschwitz alors quand je l’ai entendu dire qu’il voulait bannir tous les musulmans, mon partenaire et moi on en a conclu qu’on était de retour dans les années 1930 et il est en train de nous donner raison.
«Il ne s’attaque peut-être pas aux Juifs, mais il pourrait le faire et j’espère que tous les Juifs qui ont voté pour lui le comprennent.»
Notre interlocutrice est bien consciente de l’image que les États-Unis renvoient sur la scène internationale.
«On brûle [bannit] des livres, on s’en prend aux immigrants. Pourquoi les autres pays industrialisés sont-ils fâchés contre nous? Je pense que c’est évident.»

Comme Cuba
Lourdes est originaire de Cuba et vit aux États-Unis depuis 50 ans. Elle était présente avec son mari Ben, arrivé de Cuba à l’âge de trois ans. Les deux sont désormais citoyens américains, mais la crainte les habite.
«Je ne veux pas que ce qui s’est passé à Cuba se produise ici. J’ai habité à Cuba jusqu’en 1972 et ça s’est passé comme ce qu’on voit en ce moment. Tu te fais dépouiller de ta liberté petit à petit jusqu’à ce que tu n’en aies plus.»
Son mari, qui est professeur d’études sociales dans une école secondaire, se désole de l’effritement du tissu social américain sous Donald Trump.
«Je constate la désintégration de nos institutions sociales. Ç’a commencé pendant le premier mandat de Trump et c’est encore plus évident en ce moment.»

Pas en sécurité
L’administration Trump fait la chasse aux immigrants illégaux, mais elle s’attaque aussi aux droits d’autres communautés, comme les LGBTQ et plus particulièrement les trans.
«Je vis dans un état qui est devenu le cœur du mouvement MAGA depuis que notre illustre gouverneur [Ron DeSantis] a été élu, il y a six ans, admet Tom qui porte une bannière aux couleurs de l’arc-en-ciel. Et les choses piquent du nez dans ma communauté LGBTQ qui est à son plus mal depuis très longtemps.»
Selon le Floridien qui habite en banlieue rapprochée de Fort Lauderdale, sa communauté n’est pas en sécurité.
«Ma communauté est attaquée et mes frères et sœurs trans se battent pour leurs vies. Ils se sentent seulement en sécurité dans notre petite ville de Wilton Manors parce qu’elle est très ouverte à la communauté gaie. S’ils sortent ou qu’ils vont dans un autre comté, ils ont peur à leur vie. Ça ne devrait pas se passer comme ça juste parce qu’ils veulent être eux-mêmes.»

Quand il apprend qu’on est Canadien, il se confond en excuses.
«Je suis désolé pour tous les Canadiens qui ont reçu toutes ces insultes. Il dit ce qu’il veut, mais je crois qu’en fin de compte, l’Histoire va démonter qu’il avait tort parce que ce qu’il fait est retenu et ça le fera mal paraître parce que c’est une démocratie où il n’y a pas de place pour un roi ou un dictateur. Nos pères fondateurs ont fait la guerre à l’Angleterre pour se débarrasser du roi.»
Menaces
La manifestation de Fort Lauderdale s’est déroulée dans une atmosphère familiale puisqu’on y trouvait des gens de tous les âges, des enfants aux grands-parents. Il ne semble pas y avoir eu de débordements.
Les manifestants avaient tout intérêt à être calmes puisque des shérifs de certains leur avaient adressé des menaces ouvertes.
Jeudi, le shérif Wayne Ivey du comté de Brevard situé en bordure de plage au sud-est d’Orlando, avait été très clair.
«Si vous lancez une brique, une bombe incendiaire ou pointez une arme sur l’un de nos agents, nous allons aviser votre famille de l’endroit où elle pourra récupérer vos restes parce que nous allons vous tuer.»