Mandat Carney: des plis politiciens hâtifs
La deuxième semaine de monsieur Carney a été nettement moins bonne que la première


Mario Dumont
La première semaine de Mark Carney avait tourné autour du voyage à Washington. Cette mission à la Maison-Blanche ayant été bien menée, on pouvait parler d’un départ canon.
La deuxième semaine m’apparaît sincèrement moins convaincante. J’ai vécu trois déceptions en deux jours autour de la mise en place du nouveau cabinet. Surtout, j’ai senti apparaître un côté politicien dans le mauvais sens du terme, qui nous éloigne du personnage de gestionnaire chevronné et centré sur les résultats.
Si tôt dans son mandat, cela m’inquiète de voir monsieur Carney s’éloigner des principes de rigueur qui viennent naturellement avec son curriculum vitae. Je serais moins inquiet de le voir se mettre les pieds dans les plats par inexpérience que de le voir glisser vers les classiques de l’opportunisme politique.
Gros cabinet
En premier lieu, j’ai été étonné de voir son énorme cabinet. Il a placé des personnes fortes à des postes clés. Chapeau pour cela. Mais fallait-il grossir le cabinet à ce point en inventant des ministères pour y nommer des ministres de pas grand-chose? L’impression, c’est que la représentation de tous les groupes a pris le dessus sur l’efficacité.
Avec les secrétaires d’État, le nouveau premier ministre a fait assermenter 38 personnes mardi. Justin Trudeau avait exactement 38 ministres. Par comparaison, lorsqu’il avait formé son premier cabinet avant les élections, monsieur Carney l’avait restreint à 23. Il voulait passer un message de rigueur à ce moment. Vient-il d’envoyer le message inverse?
Le cabinet formé, il fallait se mettre au travail. En arrivant à la première réunion, au moins deux ministres y sont allés de sorties publiques assez contradictoires avec le message qui a fait élire leur chef. Steven Guilbeault est venu mollifier la position de Mark Carney en matière de construction de pipeline au Canada.
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Puis Gregor Robertson, nouveau ministre du Logement, a mis de l’eau dans la soupe concernant l’importance de faire baisser les prix de l’habitation. Ces deux ministres n’avaient pas l’air de novices qui s’enlisent naïvement. Ils avaient plutôt l’allure de porte-parole d’expérience qui veulent replacer leur chef dans le droit chemin. Au jour un! Ça part mal pour les messages clairs et la cohésion.
Pas de budget?
Finalement, cette décision de ne pas présenter de budget avant l’été. Pas même une mise à jour économique pour minimalement nous montrer le portrait actuel des finances du pays. Pierre Poilièvre avait raison de dire hier que c’est curieux pour un premier ministre qui a fait campagne en promettant qu’il avait un plan.
Tout plan d’action gouvernemental doit prendre ses racines dans un plan budgétaire. Pensons seulement à la baisse d’impôt annoncée mercredi. Même en étant très favorable à l’idée d’alléger les impôts, comment juger une telle mesure sans avoir devant nous les colonnes des revenus et des dépenses?
La population en avait ras le bol du style Trudeau. Mark Carney doit éviter à tout prix de retourner dans ses ornières.