Maladie de Lyme: des chercheurs diminuent de près de 40% le nombre de tiques aux environs de Bromont grâce à des appâts à souris
C’est la première étude à tester ce type d’approche au Québec


Mathieu-Robert Sauvé
Des chercheurs québécois expérimentent depuis 2019 à Bromont une méthode prometteuse permettant de tuer les tiques chez les souris porteuses de la bactérie causant la maladie de Lyme.
Grâce à des appâts distribués le long des sentiers de la région de Bromont, en Estrie, des chercheurs québécois ont permis de diminuer de près de 40% le nombre de nymphes de tiques à pattes noires présentes sur le territoire.
«L’appât contient un produit qui tue la nymphe accrochée à la souris et celles qui chercheront à se nourrir de son sang», explique au Journal le vétérinaire Jérôme Pelletier, premier auteur d’une étude récemment publiée dans Ticks and Tick-borne Diseases. L’effet du poison dure environ deux semaines.

De 2019 à 2022, les interventions ont été couronnées de succès, puisqu’elles ont permis de constater une différence considérable (-39%) entre le nombre de nymphes observées sur le territoire d’intervention et celui des sites où on n’était pas intervenu.
«Les résultats ont été similaires d’une année à l’autre, ce qui tend à confirmer nos conclusions», commente le chercheur en médecine vétérinaire à l’Université de Sherbrooke et titulaire d’un doctorat en épidémiologie.
Première au Québec
«C’est la première étude à tester ce type d’approche au Québec», souligne Cécile Aenishaenslin, professeure à la faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal et directrice du Groupe de recherche en épidémiologie des zoonoses et santé publique.
La Dre Aenishaenslin précise que cette méthode de prévention ne peut pas s’appliquer à l’échelle d’un grand territoire comme un parc national. Mais elle pourrait être déployée à petite échelle dans certains endroits stratégiques, «comme autour des sentiers fréquentés par le public, d’aires de pique-nique ou éventuellement dans les cours arrière des personnes qui vivent dans des zones à haut risque».
On n’est pas à la veille de trouver ces produits sur les tablettes des magasins à grande surface. Plusieurs années d’études sur l’innocuité du fluralaner, le produit antiparasitaire présent dans l’appât à souris, doivent être menées avant que les autorités permettent sa commercialisation.

Cycle complexe
La solution testée par le Dr Pelletier semble prometteuse pour s’attaquer à la propagation de la maladie de Lyme, «mais ça ne sera pas suffisant pour protéger la population, car les tiques à pattes noires sont présentes partout dans le sud du Québec».

De plus, le cycle complexe de la tique à pattes noires rend les méthodes de lutte limitée.
Un cycle de trois ans
Trois cycles d’un an sont nécessaires à la reproduction de la tique à pattes noires: œufs et larves, nymphes et adultes.
Les œufs de la tique à pattes noires (Ixodes scapularis) sont déposés dans des endroits ombragés de la forêt par une adulte nourrie de sang. Une seule ponte peut compter 2000 œufs. La larve minuscule à six pattes prend son premier repas de sang, le plus souvent sur une souris à pattes blanches, avant de passer au stade suivant. Le petit rongeur devient le réservoir de Borrelia burgdorferi, la bactérie responsable de la maladie de Lyme.
Muée en nymphe, elle a maintenant huit pattes et est plus mobile.

L’adulte s’attaque aux grands mammifères, comme le cerf de Virginie, qui est l’hôte principal du pathogène même s’il est immunisé contre ses effets. Chevaux, chiens et, bien sûr, humains sont aussi des cibles de la tique, qui peut maintenant se reproduire.
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