Magasiner un condo: 5 pièges à éviter quand on s’apprête à acheter une copropriété

Félix Desjardins
La plupart des premiers acheteurs potentiels lorgnent des copropriétés en raison de leur accessibilité. Pour éviter les mauvaises surprises, il est impératif d’effectuer des vérifications au moment de magasiner un condo.
Puisque personne ne désire résider dans une copropriété mal gérée, voici les éléments à surveiller lorsqu’on s’apprête à acquérir un logement.
Avoir un courtier qui connaît mal les copropriétés
Avant de déterminer ses critères d’achat, il faut s’assurer de trouver la bonne personne qui saura vous aiguiller dans vos démarches. Le fondateur du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec (RGCQ), Me Yves Joli-Cœur, est catégorique: «Un bon courtier immobilier est une valeur ajoutée; un courtier sans savoir est un danger.»

«Ce ne sont pas tous les courtiers qui sont aptes à vendre de la copropriété et à bien conseiller leur client, enchaîne-t-il. La première question qu’il faut poser: avez-vous suivi une formation en matière de copropriété? Si la réponse est non, il faut passer tout droit.»
Un bâtiment en mauvais état
Si vous pensez avoir trouvé la perle rare, vous devrez demander, par l’entremise de votre courtier, des renseignements exhaustifs sur l’état de la bâtisse. Si le cahier d’entretien de la copropriété est entretenu comme le prévoit le Code civil, vous ne devriez pas avoir de mauvaises surprises.

«Il faut quand même faire venir un inspecteur pour vérifier notre unité et les espaces communs, insiste le vice-président des communications de l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ), Louis Beauchamp. L’inspecteur peut regarder l’état du garage et de la piscine, par exemple.»
Un fonds de prévoyance mal administré
Intimement lié au carnet d’entretien, le fonds de prévoyance est essentiel à la saine gestion d’une copropriété. L'étude de ce fonds permet d’établir un seuil suffisant pour les frais de condo demandés à chaque copropriétaire afin d’éviter de devoir redresser la barre avec d’imposantes cotisations spéciales. Une catastrophe pour de premiers acheteurs qui peinent déjà à garder la tête hors de l’eau.
Au fil des ans, des histoires d’horreur du genre ont été rapportées dans les pages du Journal, dont cette propriétaire qui a été contrainte à payer une cotisation spéciale de 65 000$ en raison de travaux majeurs qui n’avaient pas été anticipés par son syndicat.
«Si j’ai un cahier d’entretien structuré et que j’ai plus fait la fourmi que la cigale, ça va bien se passer et on va éviter les cotisations spéciales. Ça se résume à la saine gouvernance d’une copropriété, explique Me Joli-Cœur. Un immeuble qui est sous-capitalisé ne sera pas dans un meilleur état.»
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission d’Isabelle Maréchal, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Mal connaître la déclaration de copropriété
Parmi les documents qui vous seront communiqués, il y aura évidemment la déclaration de copropriété, cet acte notarié qui réglemente l’utilisation et la gestion d’une copropriété divise.
Vous avez des animaux? Vous tenez à fumer à l’intérieur de votre logement? Vous désirez effectuer des locations de courte durée dans votre unité? Chacun de ces éléments pourrait être proscrit dans la déclaration.

«Il faut aussi bien vérifier les modifications effectuées sur la déclaration de copropriété, surtout si celle-ci date de plusieurs dizaines d’années», complète Me Pierre-Alexis Bombardier, avocat spécialisé en droit de la copropriété au cabinet De Grandpré Jolicœur.
Repérer des poursuites
Votre courtier devrait aussi consulter les procès-verbaux des dernières réunions du conseil d’administration et de l’assemblée des copropriétaires. Par le fait même, il pourra déterminer si le climat de la copropriété est sain, quels sont les enjeux auxquels elle fait face présentement, et si une poursuite a été intentée par l'un des membres contre le syndicat, ou vice-versa.
Un fonctionnement particulier
Un syndicat de copropriété est séparé en deux entités: le conseil d’administration (CA) et l’assemblée des copropriétaires.
Organe exécutif de la copropriété, le CA doit exercer ses fonctions de façon transparente et diligente afin d’éviter de reproduire les histoires d’horreur qui ont donné mauvaise presse aux tours de condos par le passé.
«Le grand point en copropriété, que certains ont de la difficulté à saisir, c’est que le budget n’est pas décidé par les copropriétaires; ils ont seulement leur mot à dire sur qui fait partie du CA. Notre seul recours, si on n’est pas d’accord avec les frais de condo, c’est de changer de CA.», ajoute Me Francesca Lasorsa, avocate au cabinet De Grandpré Jolicœur.
Un projet de loi attendu
Le projet de loi 16, adopté en 2019, est une réforme majeure pour la copropriété au Québec. Grâce à une série de mesures, il prévoit d'améliorer la transparence et la gestion de l’administration des copropriétés.
Toutefois, sa mise en application complète tarde toujours. Un dernier règlement a été publié le 11 septembre 2024, mais depuis, c’est silence radio de la part du ministère de l’Habitation.
«On attend l’adoption des règlements qui l’entourent et qui font en sorte que les copropriétaires vont être obligés de capitaliser leurs fonds de prévoyance et d’avoir un carnet d’entretien transparent», explique Louis Beauchamp, de l’OACIQ.
«C’est réellement étonnant que le gouvernement ne soit pas capable d’adopter des règlements plus rapidement, se désole Yves Joli-Cœur. Le signal envoyé aux copropriétés n’est pas le bon; plus on attend, plus il va y avoir un déficit de capitalisation.»
Par courriel, le cabinet de la ministre responsable de l'Habitation a confirmé qu’il «devrait être en mesure de rendre publique une nouvelle mouture du règlement sous peu», sans préciser à quel moment la publication allait avoir lieu.
