L’invitation de Narendra Modi au Canada par Mark Carney ne fait pas l’unanimité


Raphaël Pirro
L’invitation par Mark Carney du premier ministre indien Narendra Modi au Canada est loin de faire l’unanimité, alors que les services policiers enquêtent toujours sur son rôle dans le meurtre d’un militant sikh ici.
L’invitation au sommet du G7, qui se tiendra en Alberta du 15 au 17 juin, a été faite à la dernière minute lors d’un appel entre les deux hommes en avant-midi vendredi.
Narendra Modi a remercié sur le réseau X le premier ministre Carney de l’invitation et déclaré qu’il avait «hâte» à leur rencontre.
Des relations tendues
Les relations entre l’Inde et le Canada ont atteint un creux historique après que Justin Trudeau eut accusé, en septembre 2023, le gouvernement Modi d’avoir orchestré quelques mois plus tôt le meurtre de Hardeep Singh Nijjar, un Canadien sikh et militant de l’indépendance du Pendjab.
«Il y a une procédure judiciaire qui est carrément en cours et qui est très avancée au Canada, et il n’est jamais approprié de faire des commentaires sur ces procédures judiciaires», s’est défendu hier M. Carney.
Dans le résumé de l’appel préparé par le bureau de M. Carney, il est dit que les deux dirigeants ont «convenu de veiller à ce que se poursuive la collaboration entre les autorités chargées de l’application de la loi, ainsi que les discussions sur les questions de sécurité».
Aux dernières nouvelles, le gouvernement indien refusait de collaborer à l’enquête canadienne.
Les accusations de Justin Trudeau fournies par des services de renseignement avaient semé une énorme controverse en Inde, où le mouvement pour l’indépendance du Pendjab est traité comme une organisation terroriste.
Une invitation controversée
«Il est inadmissible que le gouvernement déroule le tapis rouge pour le premier ministre Modi, dont le régime est directement impliqué dans l’assassinat du leader sikh canadien Hardeep Singh Nijjar», a dénoncé le NPD hier.
L’Organisation mondiale des sikhs (WSO) avait même envoyé une lettre au bureau de M. Carney, l’implorant de ne pas inviter son homologue indien au G7.
«Pour les sikhs du Canada, il s’agit d’une trahison, non seulement de notre communauté, mais aussi des valeurs canadiennes fondamentales», a dénoncé le président de l’organisation.
L’affaire en a fait sourciller plus d’un sur les réseaux sociaux.
«Honnêtement, il est difficile d’y voir autre chose que le fait que le gouvernement Carney pense que certaines vies canadiennes comptent plus que d’autres», a commenté une ancienne conseillère de Justin Trudeau, Supriya Dwivedi.
Le chef conservateur Pierre Poilievre a pour sa part souligné que M. Modi est un invité habituel aux G7 et que l’Inde représentait un allié commercial incontournable pour le Canada.
Après l’Inde, le Canada est le pays où se trouve la plus grande diaspora sikhe. Elle comptait près de 800 000 personnes au dernier recensement de Statistique Canada en 2021.
Pas plus tard que jeudi, Mark Carney a eu un appel téléphonique avec le premier ministre de la Chine lors duquel ils se sont entendus pour «régulariser» la relation entre les deux pays et trouver une voie de sortie aux tensions commerciales.