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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

L’interdiction du cellulaire à l’école: une mesure nécessaire, une occasion d’éduquer

Photo d’archives, STEVENS LEBLANC
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Robert Durocher

2025-05-13T04:00:00Z
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Un débat passionné entoure ces jours-ci la décision du ministre Bernard Drainville d’interdire l’usage du cellulaire dans les écoles primaires et secondaires du Québec dès la rentrée prochaine. Certains y voient une atteinte aux droits des jeunes, d’autres un retour en arrière. Pourtant, à la lumière des recherches récentes, il est difficile de nier que l’usage excessif du téléphone intelligent a un impact réel, parfois grave, sur la concentration, la réussite scolaire et même la santé mentale des élèves.

Cette question soulève une interrogation fondamentale: à quoi sert l’école?

L’école est d’abord un lieu d’apprentissage. Apprendre à lire, à écrire, à compter. Mais aussi apprendre à réfléchir, à se structurer, à s’exprimer avec rigueur. C’est un lieu de formation intellectuelle, bien sûr, mais aussi de socialisation, de découverte de soi et du monde. Et c’est aussi un lieu où l’on apprend à vivre dans un cadre – un cadre qui, comme dans toute société, comporte des libertés... mais aussi des limites.

Faire grandir

Certains jeunes contestent cette décision. Ils s’interrogent: «Il y a toute ma vie dans mon cellulaire!» Cette réaction n’est pas surprenante. Elle est même saine: elle est propre à l’adolescence. Mais l’adolescence n’est pas l’âge des réponses définitives. C’est l’âge des essais, des doutes, des résistances. Et très souvent, ce que les jeunes rejettent aujourd’hui, ils en reconnaissent la valeur quelques années plus tard.

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J’en parle en connaissance de cause. Mon professeur préféré au secondaire – celui qui m’a le plus marqué, le plus fait avancer – était, à l’époque... celui que je détestais le plus. Sa rigueur, son exigence, son autorité m’irritaient. Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris qu’il cherchait avant tout à nous faire grandir. À nous amener là où nous ne pensions pas pouvoir aller.

C’est dans cet esprit que j’appuie la décision d’interdire le cellulaire à l’école. Pas par volonté de contrôle ni pour brimer qui que ce soit. Mais parce qu’un élève qui est continuellement distrait, sollicité, interrompu... apprend moins bien. Et l’école, c’est pour apprendre. C’est pour se construire. C’est pour plus tard.

Sens

Cela dit, cette mesure ne pourra être bien reçue que si on en explique le sens. On ne peut pas imposer sans éduquer. Il faut dire aux jeunes pourquoi cette interdiction existe. Leur faire comprendre qu’on ne cherche pas à les punir, mais à leur offrir un espace, un temps, une respiration.

Et si certains veulent exprimer leur désaccord, qu’ils le fassent. Mais qu’ils le fassent avec civisme, avec respect, avec maturité. C’est aussi cela, apprendre.

À l’école, on n’obtient pas toujours ce qu’on veut. On apprend à faire avec. Et parfois, on découvre qu’une limite bien expliquée peut être le début d’une vraie liberté.

Robert Durocher

Enseignant retraité du secondaire et auteur

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