L’impunité et l’arrogance


Maria Mourani
Laval, trois fusillades consécutives ciblant des jeunes, dont un de 15 ans.
Dans un restaurant de Vimont, un homme est abattu sans aucune considération des clients, dont plusieurs enfants. Montréal, trois fusillades en quelques heures à des endroits différents, le mercredi 8 juin. Homicides ciblés, fusillades au volant, attaques et contre-attaques, les groupes criminels sont dans l’impudence et le je-m’en-fichisme. On était habitué à l’impulsivité des membres de gangs, mais à beaucoup plus de finesse de la part du crime organisé.
Or, les derniers événements impliquant certains individus liés à des organisations criminelles laissent perplexe. Y a-t-il un changement dans le mode opératoire des règlements de comptes ? Les nouveaux joueurs sont-ils moins enclins à respecter la règle d’« éviter les victimes collatérales » ?
Quoi qu’il en soit, l’arrogance domine dans l’écosystème criminel.
Tolérance zéro
Face à ce manque de considération, la réponse policière ne peut qu’être inflexible. Lorsque la violence se répand ainsi dans les rues, la répression prend le devant de la scène. En ce sens, l’action policière vise à cibler les groupes criminels et les trafiquants d’armes. Une partie de ce travail nécessite des interventions et des interceptions préventives. Autrement dit, d’agir avant que la fusillade ait lieu et de retirer les armes de la rue. Là est le défi.
Or, aux dires de certains policiers, ce type d’intervention serait de moins en moins privilégié, particulièrement dans certains quartiers de Montréal et auprès de certains groupes de la population.
Cependant, l’intervention préventive est-elle si efficace ? Outre plusieurs études criminologiques qui en démontrent l’importance sur le plan de la sécurité urbaine, qu’en est-il du terrain ?
Montréal versus Québec
La comparaison entre Québec et Montréal est en soi parlante. Que ce soit pour les tentatives de meurtre, les homicides ou les décharges d’armes à feu, Montréal bat Québec. Y a-t-il moins de gangsters à Québec ou de conflits entre les groupes criminels ? Bien évidemment, non. Il est vrai que tous les trafiquants paient leur dîme aux Hells Angels, mais les luttes pour le trafic et la vente de drogue demeurent toujours un enjeu.
Comment peut-on alors expliquer cette différence ? Il n’y a pas de réponse unique et simple à cette question, mais un élément important ressort du terrain : la connaissance des individus criminalisés et des dynamiques entre les différents groupes criminels, ainsi que l’intervention préventive. À Québec, la police connaît les trafiquants impliqués dans des conflits qui de surcroît portent des armes. Ils sont surveillés et fréquemment rencontrés par les policiers qui les mettent en garde ou les arrêtent avant la fusillade. C’est ce que l’on nomme l’intervention préventive.
À Montréal, les policiers connaissent les individus criminalisés et les groupes criminels de leur territoire. Des escouades, comme Éclipse ou Équinoxe (Laval), savent même où ces gars prennent leur petit déjeuner. Cependant, il semblerait que plusieurs patrouilleurs de Montréal y réfléchissent à deux fois avant d’intervenir préventivement. Pourquoi ? La crainte d’accusation de profilage racial.