«L’île d’Anticosti m’a sauvé la vie»: ce Québécois a vaincu ses dépendances et vit parmi les cerfs et les renards
Mathieu Gagnon habite l’île majestueuse depuis 20 ans


Mathieu-Robert Sauvé
Arrivé sur l’île d’Anticosti en 2005 avec l’idée d’en repartir au plus vite, un homme de Québec y a finalement trouvé une terre d’épanouissement et de liberté lui permettant de vaincre ses dépendances et ses symptômes dépressifs.
«Anticosti m’a sauvé la vie», résume Mathieu Gagnon au volant d’une camionnette 4 × 4, qui roule le long de la rivière aux Saumons, dans l’est de l’île.
Debout à 4 h du matin, l’autodidacte qui assure le contrôle aérien de la piste d’atterrissage, l’entretien des systèmes électriques et la gestion de personnel à la pourvoirie Safari Anticosti respire le bonheur. Dans ses temps libres, il photographie des falaises au bord de la mer, des cerfs de Virginie et des renards qui sillonnent le terrain autour des habitations.


Difficile de croire que cet homme de 48 ans, originaire de Québec, avait complètement décroché de l’école et accumulait des dettes en s’enfonçant dans la dépendance, quand une occasion de laver la vaisselle à l’auberge de Port-Menier s’est présentée.
«Je suis venu avec l’idée de repartir après une ou deux semaines; 20 ans plus tard, je suis toujours ici», lance-t-il en riant.


Accueilli par les villageois
Après avoir été initié à la mécanique et à différents métiers grâce aux gens du village, Mathieu Gagnon n’a pas été guéri instantanément. Il a dû attendre quelques années avant de se sentir «anticostien». Il se souvient entre autres d’un hiver où il n’a presque pas mis le nez dehors. Les voisins s’inquiétaient.

Par la suite, il s’est cherché et a eu de la difficulté à se trouver des repères. «Je suis retourné un an à Québec, mais ça ne fonctionnait plus pour moi dans la ville. J’ai définitivement déménagé à Anticosti en 2014 quand le directeur des opérations de Safari, Guy Bourdoul, m’a embauché», résume-t-il.
Il a lentement gravi les échelons et sa réputation n’a jamais cessé de se raffiner. Pourtant, son travail est extrêmement exigeant. Chaque jour, pendant six semaines, il travaille une dizaine d’heures sur le terrain avant d’avoir 12 jours de congé, et ce, de mai à décembre.
Ti-Paul, Mécano et les autres
La saison de la chasse au cerf de Virginie s’ouvre dans quelques jours et des centaines de chasseurs convergeront vers la pourvoirie afin de profiter de l’abondance de ce cervidé. Il y aurait plus de 100 000 cerfs sur l’île depuis l’introduction volontaire de quelques dizaines de bêtes par l’homme d’affaires français Henri Menier en 1899.
Chaque jour, M. Gagnon nourrit une douzaine de cerfs à moitié apprivoisés.


«Ils ont tous un nom; celui-là, c’est Ti-Paul, celui-ci, Mécano», dit l’homme à tout faire de la pourvoirie Safari Anticosti.
Mais ces magnifiques «six pointes», comme on appelle les plus beaux mâles du cheptel, ne seront pas la cible des chasseurs, car il délimite un périmètre sans fusils de 5 km autour des bâtiments.

«Mon message pour vos lecteurs, c’est de ne pas avoir peur de sortir de sa zone de confort quand on fait face à des défis personnels», conclut-il, avant d’aller répondre à l’appel d’un pilote d’avion qui s’approche de la piste.
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