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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Identité québécoise: encore une fois, la stratégie de la CAQ ne nous mènera nulle part

Photo d'archives, Stevens LeBlanc
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Photo portrait de Mathieu Bock-Côté

Mathieu Bock-Côté

2025-01-28T20:30:00Z
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Ainsi, la CAQ veut reprendre le flambeau identitaire, en mettant de l’avant un modèle d’intégration en rupture avec le multiculturalisme canadien.

Elle n’entend plus seulement lui opposer le tiède interculturalisme des années postréférendaires, mais le modèle de la culture de convergence, centré sur la majorité historique francophone, dont il faudra désormais prendre le pli pour s’intégrer.

Théoriquement, on devrait y voir une bonne nouvelle. Au Québec, c’est comme ça qu’on s’intègre.

Canada

En fait, c’en est une, dans la mesure où la CAQ confirme la contradiction fondamentale entre le multiculturalisme canadien, auquel adhère Pierre Poilievre, en passant, et le peuple québécois. Le multiculturalisme canadien est une machine à broyer l’identité québécoise.

Mais voilà, ce nouveau modèle d’intégration, dans le contexte migratoire actuel, qui nous conduit à la noyade démographique, sera fondamentalement impuissant – en fait, même le modèle le plus musclé serait impuissant.

Il ne pourra rien, par exemple, contre la multiplication des situations semblables à l’école Bedford.

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Il ne pourra rien contre l’anglicisation de Montréal et de Laval.

Il ne pourra rien contre la multiplication des ghettos.

Pour une raison simple: à partir d’un certain seuil, que nous avons manifestement atteint, l’intégration devient impossible. Nous recevons trop de gens chaque année pour les intégrer, même minimalement.

Quand un pays change de population, il change d’identité.

Qui veut sérieusement parler d’intégration devra d’abord rompre avec l’immigration massive. Ce qui revient pratiquement à la ramener à une proportion vraiment minimale pour favoriser la pleine intégration des populations arrivées ces dernières années.

La CAQ n’est pas à la veille de plaider pour cela. Le voudrait-elle que dans le Canada, ce serait pratiquement impossible.

Ce qui nous conduit à la deuxième limite structurelle du nouveau modèle qu’annoncera la CAQ: on a beau parler d’identité québécoise et jouer de la trompette nationaliste pour se croire puissant, tout cela relèvera du domaine des paroles si on ne remet pas en question le lien fédéral.

Le Québec, dans le Canada, est appelé à peser de moins en moins. Les francophones eux-mêmes pèseront de moins en moins au Québec dans ce cadre. Comme dit Frédéric Lacroix, nous passons «de “maitres chez nous” à “minoritaires chez nous”».

Le Canada nous condamne à une dynamique de régression démographique, culturelle, linguistique et politique.

Souveraineté

Mener une politique identitaire dans le Canada, c’est mener une politique de cul-de-jatte. Le Québec cul-de-jatte peut bien se muscler les bras comme il veut, et croire dès lors qu’il devient maître chez lui, il n’a pas de jambes pour se déplacer, pour bouger, pour exercer pleinement sa liberté. Il ne va nulle part.

Voyons néanmoins ce qui peut ressortir de cela: la nouvelle politique québécoise frappera objectivement le mur de la constitution canadienne.

Le Québec, encore une fois, constatera que ses marges de manœuvre identitaires sont limitées.

Bien des Québécois trouveront là une raison d’enfin revenir à l’indépendance.

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