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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

L’hyper-masculinité: source toxique de l’univers sportif

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Photo portrait de François-David Rouleau

François-David Rouleau

2023-02-18T02:47:50Z
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Secoués par les témoignages dévoilés cette semaine à propos des initiations brutales et dégradantes, des experts sondés par Le Journal pointent surtout l’hyper-masculinité du monde sportif comme source profonde de problèmes.

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«Il faut être scandalisé par ces témoignages, car il y a une véritable culture machiste derrière tout ça. Maintenant que ça touche le hockey, les gens s’intéressent enfin à la culture toxique du sport», tonne d’entrée de jeu Joëlle Carpentier, docteure en psychologie et professeure à l’École des sciences de la gestion de l’UQÀM.

Le script de la masculinité est ancré dans les racines du sport.

«Au hockey, un vestiaire est une microsociété où l’hyper-masculinité est valorisée. Les caractéristiques des hommes sont valorisées et celles des femmes dévalorisées», explique la chercheuse et psychologue Dominique Trottier, professeure à l’Université du Québec en Outaouais. «La culture du sport en est imprégnée, ce qui la rend tolérante aux valeurs sexistes et aux violences sexuelles.» 

Abus, sévices et cie

Comme dans une meute, les plus âgés et les plus forts trônent au sommet de la hiérarchie du groupe. Les plus jeunes et les plus faibles sont dominés et pourraient plus tard devenir les dominants de ce cercle vicieux.

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Il y a longtemps que les chercheurs s’intéressent aux dynamiques et aux problèmes de groupe dans le sport. Les phénomènes d’initiation, d’intimidation et de violence ont pris de l’ampleur depuis 50 ans.

En 1999, l’Université Alfred, de New York avait mené une étude nationale sur les rites sportifs dans la NCAA. Des quelque 325 000 athlètes sondés, plus de 250 000 avaient répondu avoir traversé un rite d’initiation.

Du lot, 20 % des athlètes avaient subi des actes illégaux comme un kidnapping, du tabassage ou la destruction de biens. Près de 50 % avaient été impliqués dans des dérapages impliquant de l’alcool et des gestes humiliants.

La Dre Linda S. Pagani, professeure à l’École de psychoéducation de l’Université de Montréal, a identifié des comportements distincts selon les genres. «Chez les gars, les actes coercitifs sont plus directs et plus violents physiquement. Chez les filles, ces actes sont davantage indirects et psychologiques.»

Perturbant

D’après la Dre Pagani, le bizutage est pertinent dans les sports, s’il est positif et axé sur l’accueil. «Mais l’activité est souvent déguisée et l’on observe malheureusement une fréquence élevée où il y a de la dominance et des abus de pouvoir», note-t-elle.

«Dans ce rite, une hiérarchie est établie, poursuit la Dre Trottier. On montre aux nouveaux joueurs qu’ils n’ont pas le même statut. Pour les abaisser, on les humilie sur le plan sexuel, on leur enlève leur force et leur virilité. On attaque leur masculinité.»

Selon la Dre Trottier, la culture du sport, spécifiquement celle du hockey, ne changera pas de sitôt, surtout si elle ne s’attaque pas aux problèmes à la racine. «Les gens en position d’autorité doivent avoir un sens moral et éthique pour prendre les devants», insiste-t-elle.

La Dre Pagani incite les gens à dénoncer les actes répréhensibles. Elle souhaite également la mise en place d’un véritable système impartial pour l’intégrité du sport.

«On ne veut pas qu’un organisme du sport se comporte comme le Vatican», conclut-elle.

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