Les stations-service passent au cash

Michel Girard
Pour vous montrer à quel point les automobilistes se font « arnaquer » le portefeuille lorsqu’ils font le plein ces temps-ci, non seulement écopent-ils de la flambée du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux, mais en plus, les essenceries (stations d’essence) ont décidé de passer à la caisse.
Comment ? En haussant de façon vertigineuse leur marge de détail.
À titre d’exemple, hier dans la grande région de Montréal, la marge de détail, avant taxes, s’élevait autour de 16,5 cents le litre, comparativement à une marge moyenne de 6,4 cents lors des 52 dernières semaines.
Selon les données compilées par la Régie de l’énergie du Québec, on parle donc ici d’une augmentation de 158 %.
Ça n’a aucun bon sens de se faire exploiter de la sorte par les grandes chaînes de distribution d’essence dans la grande région de Montréal et ses banlieues.
Aucune raison ne peut justifier cette spectaculaire hausse de la marge de détail des essenceries locales.
On convient que ça ne coûte pas une « cenne » d’administration de plus à la station d’essence d’ici de nous vendre son essence, que le prix soit de 1,30 $ le litre ou 2 $ le litre.
Quel comportement abusif de la part de nos chaînes de distribution d’essence.
- Écoutez la chronique de Michel Girard au micro de Philippe-Vincent Foisy sur QUB radio:
Les autres profiteurs
Profitant de la guerre Ukraine-Russie, l’industrie pétrolière se remplit royalement les poches depuis le début du conflit. Le prix du baril de pétrole a explosé de 56 % depuis le début de l’année, le WTI américain passant 75 à 117 $ US, et le Brent de Londres de 78 à 122 $ US.
Avec un prix de l’essence qui frôle maintenant les 2 $ le litre dans la grande région de Montréal, il faut savoir que ce sont tous les intervenants de la chaîne pétrolière qui font de l’argent comme de l’eau sur le dos des automobilistes.
Cela comprend les producteurs, les raffineurs, les distributeurs, les grossistes, les essenceries. Sans oublier, bien entendu, les gouvernements de Québec et d’Ottawa avec leur panoplie de taxes sur l’essence à la pompe.
Sur un litre d’essence ordinaire à 195,9 cents hier, les taxes accaparaient un montant de 57,7 cents. Québec empochait la grosse part des taxes, soit 39,2 cents. Ottawa encaissait 18,5 cents. Notons que plus le prix de l’essence augmente, plus Québec et Ottawa en profitent avec leurs taxes de vente, TVQ et TPS.
Notre gang de profiteurs canadiens mise sur le boycottage du pétrole en provenance de la Russie pour alimenter la croyance voulant que le pétrole soit soudainement devenu une rareté mondiale. De là la flambée du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux.
Que le Canada soit lui-même un grand producteur mondial de pétrole n’est aucunement un atout pour les automobilistes canadiens. On ne peut « profiter » de cet avantage sous prétexte que tout ce qui touche les prix pétroliers dépend de l’évolution du marché mondial !
Autrement dit, si le prix de l’essence à la pompe a explosé partout au Canada c’est la faute au marché mondial. Cela nous en fait une belle jambe !
Coupons l'aide aux pétrolières
Compte tenu des immenses profits qu’empochent nos intervenants de l’industrie pétrolière canadienne « grâce » au marché mondial, j’invite le gouvernement de Justin Trudeau à couper dans l’aide financière fédérale qu’il accorde à notre industrie pétrolière.
Le Canada est mondialement reconnu comme étant l’un des pays qui aident financièrement le plus leur industrie pétrolière.
Comme cette généreuse « aide financière fédérale » de plusieurs milliards de dollars par année aux pétrolières est puisée à même les impôts et taxes que les contribuables et automobilistes canadiens versent au fédéral, il serait de mise de la couper.
À mon avis, il y a une « maudite » limite à engraisser les pétrolières avec nos impôts, nos taxes et l’exploitation dont on est victime à la pompe.
- Écoutez Yves Daoust, directeur de la section Argent du Journal de Montréal et du Journal de Québec, sur QUB radio :
Dépendants de New York
Que la grande portion de l’essence distribuée au Québec soit raffinée ici, à la raffinerie Suncor de Montréal ou à la Jean-Gaulin de Valero à Lévis, cela n’a aucune importance dans le prix de l’essence à la pompe.
Nous, au Québec, c’est le prix de l’essence au comptant du port de New York qui sert de référence pour déterminer les prix minimaux à la rampe de chargement de Montréal, et ce, pour l’essence ordinaire, l’essence super, le carburant diésel, le mazout léger qui seront distribués au Québec.
Ce sont ces prix minimaux de New York qui servent de base pour fixer le prix de l’essence, auquel s’ajoutent les taxes fédérales, provinciales et la marge de détail des essenceries.
Ainsi peu importe que le pétrole vienne de l’Ouest canadien, s’il est raffiné ici même dans nos installations, le prix de base de notre essence est déterminé au port de New York.
Et ce avec la bénédiction de la Régie de l’énergie du Québec et du gouvernement du Québec.
Méchante dépendance du Québec envers New York !