Les salaires des députés doivent être équitables et intègres

Amir Khadir, Député de Mercier de 2008 à 2018, Québec solidaire
Chers parlementaires,
On se demande comment fixer le salaire des députés de l’Assemblée nationale du Québec depuis longtemps. J’ai siégé de 2008 à 2018. On se posait les mêmes questions : qu’est-ce qui pourrait être équitable? Qu’est-ce qui serait acceptable aux yeux du public pour ne pas saper la confiance en l’intégrité de l’institution?
La dernière question n’est pas banale. La confiance de la population est la base de la démocratie aussi imparfaite soit elle. Ce n’est pas le temps d’aggraver de déclin de cette confiance. Évitons de souffler sur les braises du cynisme ambiant.
Je vous écris pour vous inviter à ne pas voter vous-même pour vous octroyer une hausse de 30 000 $.
Je m’explique.
- Écoutez l'entrevue avec Amir Khadir, député de mercier de 2008 à 2018 pour Québec Solidaire à l’émission de Yasmine Abdelfadel via QUB radio :
Conflit d’intérêt
Le BAN a choisi deux ex-députés pour faire des propositions que les députés sont ensuite appelés à voter pour eux-mêmes. Ce n’est pas acceptable car ce processus ne possède pas l’indépendance requise. Une recommandation par deux ex-députés encore proches de leur partis- et soumise au vote des députés qui sont les bénéficiaires de la décision, accentue la désagréable perception que les élus vont se voter une hausse de 30 000 $.
On s’entend pour dire que la perception du conflit d’intérêt est aussi grave que le conflit d’intérêt. Ici la perception est inévitable. En fait, pour éviter cette perception il faudrait que les 125 députés de l’Assemblée se retirent de la salle au moment du vote sur cette proposition! Ce qui est absurde.
Il serait donc plus sage de confier la tâche de réviser votre rémunération à un comité totalement indépendant des élus et des partis comme le propose le rapport L’Heureux-Dubé depuis 2013. Ce comité pourra faire l’examen équitable de l’ensemble de vos conditions de travail et vous faire une proposition qui soit exécutoire. François Gendron, ex-député de l’ANQ pendant 42 ans, reconnu pour sa sagesse et son équité par l’ensemble de ses pairs, partage cet avis.
Conditions actuelles
Pour avoir siégé avec plusieurs d’entre vous de 2008 à 2018, je sais que le travail de député est exigeant et que les heures sont longues. Je sais surtout qu’aucun d’entre vous ne s’est présenté comme député pour faire de l’argent. Vous y êtes par conviction. Vous y êtes pour servir le public.
Il y a votre salaire de base auquel s’ajoute une allocation de dépenses de 38 184 $. Mais il y a aussi un régime de retraite doré, une assurance collective payée à 100 % par l’employeur. Ensuite la majorité d’entre vous bénéficient d’autres primes selon leurs fonctions additionnelles. Et ça peut monter vite! Exemple : 14 000 $ par an aux présidents de séance en Commission parlementaire, même si appelés à remplacer le président de la Commission que moins de 10 heures par an!
Je ne dis pas que les députés sont trop payés, mais il faut faire le ménage. Une instance indépendante pourra évaluer convenablement ce qui est équitable. Autrement, les citoyens-ennes de vos comtés verraient une hausse de 30 000 $ par an votée par vous-même comme un abus, au moment où des milliers de gens vivent avec un revenu total de 30 000 $, aux prises avec ce que vous savez de l’inflation galopante à la crise du logement en passant par l’explosion du coût d’épicerie.
Je vous invite donc à renoncer au rapport Ouellet-Thériault et de lancer un processus de révision équitable, indépendante et exécutoire de vos conditions salariales.
Amir Khadir, Député de Mercier de 2008 à 2018, Québec solidaire