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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Les rouages d’une contre-manifestation

Le groupe Protégeons nos enfants des complotistes incommode les militants antivaccins près des écoles

La contre-manifestation a presque viré à la bagarre. Le complotiste Jessie Leroux (chandail blanc) et Martin, dont nous n’avons pas le nom de famille, ont eu une sérieuse discussion.
La contre-manifestation a presque viré à la bagarre. Le complotiste Jessie Leroux (chandail blanc) et Martin, dont nous n’avons pas le nom de famille, ont eu une sérieuse discussion. Photo Louis-Philippe Messier
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Photo portrait de Louis-Philippe  Messier

Louis-Philippe Messier

2021-10-18T04:00:00Z
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À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.


Le mercredi 13 octobre vers midi, parce que la loi leur interdit de se trouver à moins de 50 mètres d’un établissement scolaire, trois militants antivaccins s’activent plutôt dans le parc Sauvé, pas loin d’une école à Montréal-Nord.

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À une cinquantaine d’adolescents de l’école secondaire Calixa-Lavallée, pendant leur heure de dîner, ils y distribuent des dépliants qui promeuvent la peur des vaccins contre la Covid-19. 

  • Écoutez l'entrevue avec Louis-Philippe Messier, journaliste au Journal de Montréal, responsable de la chronique urbaine au micro de Richard Martineau sur QUB radio :   

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L’organisateur de cette initiative, Alexandre Barrière, un militant hyper-actif qui collectionne les contraventions (il s’en vante sur Facebook) et qui aime se filmer en direct sans masque pendant qu’il prend le métro, tient un mégaphone. Lui et deux sympathisants abordent les enfants dans le parc.

Contre-manif

Ce que M. Barrière et ses amis ignorent, c’est qu’ils sont surveillés par des citoyens anticonspirationnistes qui se concertent dans le groupe Protégeons nos enfants des complotistes. 

Haut-parleur en main, Warda Lacoste, 38 ans, marche droit vers les antivaccins pour gâcher leur diffusion en direct des réseaux sociaux. 

« Je fais jouer Eye of the Tiger, du ACDC ou du Metallica très fort, non seulement pour les incommoder et pour enterrer leur désinformation, mais parce que les robots de Facebook détectent ces airs et enlèvent les vidéos parce qu’ils contreviennent aux droits d’auteur. »

Les policiers ont averti les contre-manifestants d’éviter les confrontations physiques.
Les policiers ont averti les contre-manifestants d’éviter les confrontations physiques. Photo Louis-Philippe Messier

Apparemment, la tactique fonctionne : « Lorsque François Amalega Bitondo [une figure de proue du mouvement antivaccin] est revenu de sa manifestation devant l’école Henri-Bourassa et qu’il a voulu réécouter son live, la vidéo avait été enlevée parce qu’on y entendait Eye of the Tiger. »

Face aux trois antivaccins venus essayer d’influencer les enfants, il y a seulement quatre anticomplotistes. 

« Je trouve ça totalement inacceptable que des militants antivaccins viennent aborder les enfants devant les écoles », m’explique Daniel Hurtubise.

« Tu peux manifester devant l’Assemblée nationale, devant ton député ou dans la rue, si tu veux, mais lâche les écoles et les hôpitaux », explique Raymond Fillion, qui me dit qu’il en est à sa cinquième contre-manifestation.

Bisbille

Dans le parc, les adultes des deux camps se regardent en chiens de faïence. Rapidement, c’est la confrontation. Un militant antivaccin qui dit s’appeler Jessie Leroux se montre agressif. Ce Jessie a diffusé des vidéos de lui où il fait irruption dans des commerces sans masque et en criant dans un mégaphone pour insulter les clients masqués coupables, selon lui, de complicité avec un gouvernement criminel. 

Warda Lacoste, Daniel Hurtubise et Raymond Fillion s’apprêtent à intervenir dans un parc.
Warda Lacoste, Daniel Hurtubise et Raymond Fillion s’apprêtent à intervenir dans un parc. Photo Louis-Philippe Messier

Il s’approche d’un homme en criant au point où il lui pile sur le pied. L’autre le repousse. C’est presque la bagarre. Warda Lacoste fait jouer Eye of the Tiger. Ahuris et amusés par ce cirque, les adolescents de l’école sortent leurs téléphones pour filmer.

Intervention des policiers

Les policiers arrivent à plusieurs véhicules. Les trois manifestants s’en vont. Les contre-manifestants restent et se font dire en substance par les agents : « Vous avez le droit de manifester contre la manifestation, mais on ne veut pas de confrontation. »

« Nous, on veut que les conspirationnistes laissent les enfants tranquilles, alors, maintenant qu’ils sont partis, c’est mission accomplie », me dit Mme Lacoste.

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