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Les mathématiques sont-elles racistes?

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Julien Corona

2022-11-29T20:11:56Z
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Sur Twitter, la professeure ontarienne Heather Theijsmeijer avançait récemment que les mathématiques sont racistes. Cette dernière va même plus loin, en dénonçant un racisme systémique dans l’enseignement de cette matière.

Mais comment les maths peuvent-elles être racistes?

Un éditorial de Rachel Crowell dans le magazine Scientific American, intitulé Les Mathématiques modernes confrontent leur passé blanc et patriarcal, s'intéresse à cette question. 

Tout d’abord, l'autrice remarque que peu de personnes racisées enseignent les mathématiques ou décrochent un diplôme dans cette discipline. À cet égard, le New York Times rapportait, dans un article publié en 2019, que moins de 1% de tous les étudiants ayant reçu un doctorat en mathématiques cette année-là dans une université américaine étaient noirs.

Ensuite, il y aurait des problèmes dans la manière dont les mathématiques sont enseignées. Par exemple: 

  • Les modèles et les théorèmes à apprendre auraient des noms trop blancs et trop européens, maquillant la vraie origine non blanche de certains d’entre eux. 
  • L’enseignement des maths ne serait pas adapté aux différentes réalités sociales de tous les étudiants, qui n'arrivent pas tous avec le même bagage.
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Un constat qui pousse à l’action

Pour Rachel Crowell, il est essentiel de revoir les façons de faire pour mieux intéresser les jeunes de toutes les origines et de toutes les classes sociales aux mathématiques. 

Au Canada, l’Ontario a tenté d’aller dans cette voie en «décolonisant les mathématiques». 

En neuvième année (l’équivalent du troisième secondaire au Québec), le programme de mathématiques reconnaissait que «les mathématiques ont été utilisées pour normaliser le racisme et la marginalisation des connaissances mathématiques non eurocentriques». 

Cette mention au racisme a toutefois été retirée à la demande du gouvernement de Doug Ford. 

D’autres éléments ont fait sursauter certains observateurs, dont le tabloïd Toronto Sun:

  • «Les mathématiques peuvent être subjectives.»
  • Il est nécessaire d’évacuer dans l’enseignement des maths «les questions eurocentriques» pour inclure les questions «antiracistes, de justice sociale, critique sociale et environnementale». 
  • Les enseignants sont encouragés à «créer des opportunités d’enseignement et d’apprentissage antiracistes et anti-oppressifs pour engager les élèves».
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Le Sun a déploré ce qu’il qualifie d’intrusion de l’extrême gauche dans l’enseignement de la science. 

  • Écoutez la rencontre Nantel-Durocher diffusée chaque jour en direct 15 h via QUB radio :

Éviter les affrontements au Québec

Des chercheurs québécois, dont l’essayiste David Santarossa, ont publié une étude dans les dernières semaines qui propose des pistes de solution afin de diminuer les inégalités raciales et sociales dans l’enseignement des mathématiques.

Dans l’étude Le démantèlement du racisme dans l’enseignement des mathématiques et l’effet cobra, réalisée avec Frédéric Morneau Guérin et Christian Boyer, David Santarossa propose notamment d’adapter la matière vue en classe – et le temps alloué aux divers éléments – afin de permettre à chacun des étudiants de performer au meilleur de ses capacités.

«Concernant l’apprentissage, la question n’est pas de savoir si les maths ne sont pas adaptées à telle ou telle origine. La question est de savoir comment le temps d’apprentissage est opéré en classe», affirme-t-il. 

JEAN-FRANCOIS DESGAGNES/JOURNAL
JEAN-FRANCOIS DESGAGNES/JOURNAL

Le chercheur insiste finalement sur l’importance, pour un prof, de bien choisir les mots qu’il utilise en classe, afin d’être le plus inclusif possible et d’éviter les discours pouvant être perçus comme discriminatoires. 

La solution n’est toutefois pas d’accuser le monde des mathématiques de suprématie blanche ou de racisme, affirme-t-il, mais bien d’agir pour le rendre plus diversifié et représentatif. 

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