Les douze travaux d’Astérix attendent Gorton et Hughes

Jean-Charles Lajoie
Pas beaucoup de partisans, encore moins d’observateurs, accordaient la moindre chance au Canadien d’entrer en séries de fin de saison ce printemps.
Contre toute attente, le CH a eu le privilège de se faire sortir en cinq par les champions de l’Est, les Capitals de Washington, une chance unique d’ajouter au bagage d’expérience d’un groupe de joueurs au nombril vert, vert, vert.
Contre vents et marées, les joueurs se sont soudés. Souvent, sans trop savoir où s’en allaient les coachs, ils se sont ligués derrière leur mentor, leur leader.
Martin St-Louis a trouvé les mots et il a forgé le chemin. Les joueurs ont acheté le plan, aveuglément. Aucun d’entre eux ne le regrette aujourd’hui.
Dans le sport professionnel, un élément de motivation revient très souvent: nous contre le reste de l’univers. Cet adage s’est appliqué parfaitement à la saison du Canadien. Avec la nuance qu’il faudrait placer Kent Hughes et Jeff Gorton dans la catégorie «reste de l’univers».
Le tandem d’architectes de la reconstruction ne s’attendait vraisemblablement pas à vivre une fièvre des séries ce printemps. Il faut se rappeler que c’est le propriétaire Geoff Molson qui a lancé le fameux souhait d’être «dans le mix» à mon camarade Renaud Lavoie lors d’une entrevue de bilan de fin de saison il y a un an.
Ce vœu de l’actionnaire de contrôle a trouvé écho au tournoi de golf lançant les activités du calendrier 2024-2025 en septembre, sans que ni Gorton ni Hughes ne puisse expliquer avec précision quel était l’objectif précis associé au principe d’être «dans le mix».
Les actions posées par le duo, et j’ai envie de dire les inactions, tendent à démontrer que ce que l’on vient de vivre était pour eux carrément du bonus.
Le crédit de cette admission à la vraie saison, c’est aux joueurs qu’il revient, de même qu’à St-Louis et ses adjoints.
Est-ce que St-Louis a été parfait? Loin de là. Mais qui peut prétendre l’être dans ce bas monde? Chose certaine, il a été bien meilleur que moins bon. Sa progression derrière un banc était palpable très clairement cette saison. La plus belle illustration en est son travail lors de cette série face à la bande d’Ovechkin.
Coacher en saison et coacher en séries, c’est deux affaires. St-Louis est un homme brillant et sensible, un gagnant incarné. Il a assurément pris acte de ce qui s’est passé lors des cinq matchs de la série et il sera bien meilleur la prochaine fois, puis la fois suivante.
Pour y arriver, il devra cependant recevoir un appui nettement meilleur de ses deux patrons. Ce n’est rien de moins que les douze travaux d’Astérix version Gorton-Hughes qui attendent les hauts dirigeants des glorieux.
Il y a beaucoup de travail à faire, des brèches immenses à combler, que ce soit dans le top 6 en attaque ou au niveau de la profondeur et de la robustesse en général.
Tu ne gagneras jamais dans cette ligue avec 20 Nick Suzuki. Pas même avec 20 Lane Hutson. Mais tu t’approches de gagner en entourant comme il se doit ces formidables athlètes avec ce qu’il faut de papier sablé afin qu’ils puissent travailler librement et sans peur de se faire déchausser par les Tom Wilson de ce monde.
Ce que les joueurs et St-Louis ont accompli cette saison est fabuleux et est matière à réjouissance et grand espoir. Attention toutefois aux conclusions rapides avec allures de raccourcis. Cette ligue mise sur la parité et tout sera à refaire dès septembre, car il n’existe aucune garantie que le Canadien sera des séries éliminatoires au printemps 2026.