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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Les données de Statistique Canada sur les conflits de travail au Québec étaient fausses

Photo DIANE TREMBLAY
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Photo portrait de Martin Jolicoeur

Martin Jolicoeur

2025-07-17T16:09:03Z
2025-07-18T13:26:45Z
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Le ministère fédéral de l’Emploi et du Développement social (EDSC) confirme que ses données sur les conflits de travail, publiées par Statistique Canada ce printemps, étaient finalement erronées.

Ces dernières, vastement diffusées depuis, laissaient entendre que le nombre d’arrêts de travail au Québec était passé de 101 en 2022 à 691 en 2023, puis à 759 en 2024, un record historique. Enfin, pour seulement les deux premiers mois de 2025, l’organisme dénombrait un total de 378 arrêts de travail.

Sur cette base, une étude de l’Institut économique de Montréal (IEDM), publiée en mai, venait à la conclusion que, depuis 2023, 91% des arrêts de travail recensés au Canada s’étaient produit dans la seule province du Québec. Un pourcentage, on ne peut plus spectaculaire, qui a marqué les esprits.

Le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet
Le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet Photo STEVENS LEBLANC

À tel point que le ministre du Travail du Québec, Jean Boulet, l’avait par la suite abondamment utilisé à son compte pour mousser son projet de loi 89, limitant la durée des grèves et des lockouts au Québec. Ce projet de loi du gouvernement caquiste a fini par être adopté.

Tout était faux

Or, tout ceci reposait sur des données erronées, nous confirme aujourd’hui Emploi et Développement social Canada (EDSC). «Les données sur les conflits de travail au Québec pour la période 2022-2025 qui ont été publiées sur la page web de Statistique Canada étaient erronées», indique l’une de ses porte-parole Nathalie Huneault.

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De son côté, et après vérification, Statistique Canada nous a confirmé que ces données avaient «effectivement été produites par Emploi et Développement social Canada» et qu’à la demande de ce même ministère, elles avaient été retirées de son site au début de la semaine.

Dans sa réponse, la direction du ministère fédéral de l’Emploi dit avoir entrepris depuis un travail de vérification des faits. «Emploi et Développement social Canada travaille avec la province de Québec, qui fournit l’information, et avec Statistique Canada pour résoudre ce problème», a ajouté son département de relation avec les médias.

Les pendules à l’heure

En attendant d’y voir plus clair, impossible donc de continuer de conclure que le Québec est champion des conflits de travail au Canada, soutient la Confédération des syndicats nationaux (CSN), grâce à qui tout ce travail de vérifications des faits a pu être enclenché.

François Enault, vice-président de la CSN, entouré de dirigeant de trois autres centrales syndicales
François Enault, vice-président de la CSN, entouré de dirigeant de trois autres centrales syndicales Photo Agence QMI, JOEL LEMAY

Selon la centrale, il n’y a pas eu 759 conflits de travail au Québec en 2024, mais bien 208. Ainsi, bien que 2024 fut ponctuée de nombreux arrêts de travail, elle ne fut pas du tout une année record.

Pour le premier vice-président de la CSN, François Enault, il importe de remettre les pendules à l’heure. «Non, il n’y a pas d’explosion du nombre de conflits de travail. Non, 91% des grèves au Canada n’ont pas lieu au Québec.»

Le temps est venu selon lui de revenir à l’essentiel: «À qui ça sert de restreindre le droit de grève? Certainement pas aux travailleuses et aux travailleurs! On doit se demander pourquoi c’est important pour les lobbies patronaux d’attaquer le droit de grève par tous les moyens, quitte à mettre leur crédibilité dans la balance avec de fausses données!»

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