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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Les dindons de la farce, c’est nous...

Photo d'archives, Agence QMi
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Photo portrait de Josée Legault

Josée Legault

2023-07-14T04:00:00Z
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Inflation. Stagflation. Réduflation. Hausses multiples des taux d’intérêt. Crise du logement. Explosion des prix dans les marchés locatif et immobilier. On n’a pas fini de ramasser les pots cassés du côté sombre de la pandémie.  

En plus de cette pandémie meurtrière, c’est comme si, pour ceux dont la cupidité est ahurissante, la perte de nos repères sociétaux leur avait donné le signal d’en profiter au plus vite pour maximiser leurs propres profits. 

Même pour des besoins aussi essentiels que se nourrir et se loger décemment, les coûts ont monté et montent encore, scandaleusement. N’en jetez plus. La cour des dindons de la farce, donc nous, est archi pleine. 

Mais attention. Ce «nous» est générique. Il va sans dire qu’il ne comprend pas la minorité de ceux qui, déjà bien nantis, réussissent à conserver leur joli train de vie. 

Pour la majorité, dans cette très mauvaise farce, combien de Canadiens et de Québécois, avant la pandémie, ont d’abord été piégés par des taux d’intérêt ridiculement bas? L’illusion de l’endettement «à petit prix».   

Le résultat fut à l’avenant. Des taux aussi bas ont fait grimper l’endettement de plusieurs ménages et de personnes seules. Les prix des propriétés ont aussi grimpé en conséquence.  

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Avec des taux au plancher et le fameux taux variable qu’on nous jurait éternellement plus avantageux, pourquoi ne pas s’acheter une maison, puisqu’elles sont chères, bien au-dessus de ses vrais moyens? Oups. 

Pas une science exacte...

De toute manière, que les économistes et les banquiers nous disent, le chômage est minime. Les ménages, privés de loisirs pendant la pandémie, ont épargné plus. Une ritournelle séduisante, mais trompeuse. 

Bref, quand un économiste ou un banquier vous dit que son métier, ce n’est pas de la «science exacte», s’il vous plaît, croyez-le. On savait pourtant que la tempête parfaite grondait. Au beau milieu d’une pandémie déjà prenante, le déni était néanmoins attirant.  

Vint alors un gros éclair dans le ciel. Il y a 18 mois, la Banque du Canada, voyant l’inflation prendre de la vitesse, hausse son taux directeur. La première hausse d’une longue liste qui, cette semaine, nous amène à 5%.  

Depuis, les dommages collatéraux de cette économie de laboratoire – bienvenue au capitalisme 101 – se font sentir chez une majorité de gens. À divers degrés, bien sûr.  

Cela n’empêche pas des économistes et des banquiers d’en discourir de manière tout à fait détachée. Eux ne souffrent pas de ce qui se passe. Personne n’a vu de banquier sonner à la porte d’une banque alimentaire. 

La tempête frappe fort

De la classe moyenne vraiment moyenne aux travailleurs et pigistes à revenus limités, en passant par les personnes sur l’aide sociale – eh oui, elles existent encore – ou âgées sans fonds de pension, cette tempête parfaite frappe fort.  

Elle frappe aussi les 40% de Québécois locataires de tous âges, dont 65% à Montréal. Elle frappe les mères monoparentales et les personnes vivant seules.  

Cette inflation en folie mine la santé mentale et physique. Les hausses consécutives de taux d’intérêt font gonfler l’endettement. Le fameux «ça va bien aller», il est parti se cacher où?

Paraît que l’important, le vrai, c’est de réduire l’écart de richesse entre le Québec et l’Ontario. Dans la tempête actuelle, bien des Québécois se contenteraient de pouvoir réduire leur écart de richesse avec eux-mêmes du temps d’avant la pandémie. 

Pendant ce temps, des apprentis sorciers à cravate valsent. Tout au sommet, ils jonglent avec l’économie et, ce faisant, nos vies. Pas de la «science exacte», qu’ils disent. Tout un euphémisme.  

Vous irez raconter ça dans une file d’attente de banque alimentaire ou à la porte d’un bureau de syndic autorisé en insolvabilité. 

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