«Bonsoir bonsoir!»: Jean-Sébastien Girard pourra-t-il terminer la saison? Il répond
Patrick Delisle-Crevier
Je connais Jean-Sébastien depuis la tendre enfance. Nous partagions la même cour d’école et sa mère, Monique, était même ma professeure en quatrième année. J’ai vu grandir Jean-Sébastien en grandissant avec lui. Je sais la relation unique qu’il a avec sa mère, j’ai vécu exactement la même chose avec ma grand-mère. Je suis également hypocondriaque comme lui et j’ai eu moi aussi, durant l’enfance, une mauvaise expérience dans un camp de vacances au point de vouloir m’en sauver. Cet entretien avec lui a donc été une véritable thérapie autant pour moi que pour lui.
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Jean-Sébastien, tu as un été assez chargé. Comment vas-tu ?
Je savoure pleinement tout ce que je vis! Et pour moi c’est important de le dire, je remplace Jean-Philippe Wauthier à la radio et à la télévision, mais je suis conscient que ce dernier n’est pas en vacances et qu’il est malade. Mais tant qu’à le faire, je tente d’en profiter et de m’amuser le plus possible. J’ai beaucoup de plaisir à animer Bonsoir bonsoir!. Même encore plus que ce à quoi je m’attendais.
En effet, revirement de situation, voilà que Jean-Philippe ne reviendra pas à l’animation de Bonsoir bonsoir!. Comment prends-tu le fait de demeurer en poste?
Je vais poursuivre pour les prochaines semaines, mais je ne sais pas encore si ce sera pour le reste de l’été. Idéalement, j’aimerais prendre des vacances en août, car à la rentrée j’ai une nouvelle émission de radio, Le beau dimanche de Jeannot, dont il me reste encore beaucoup de ficelles à attacher. Je peux confirmer pour le moment que je vais être là tout le mois de juillet. Il n’y a rien de certain pour la suite. Mais ce qui est sûr c'est que je me désole de l’état de Jean-Philippe et je pense qu’il a pris la bonne décision. On a tous vu sa fragilité lors de mon entrevue avec lui, le jeudi avant ce qui devait être son retour en ondes. Je pense qu’il a pris la décision la plus courageuse, plutôt que de reprendre l’animation et de peu à peu se détruire sous nos yeux. Je continue à animer tout en ayant une bonne pensée pour mon ami. C’est un été un peu fou pour moi, car j’anime aussi deux émissions de JS Tendresse par semaine. J’y vais donc une journée à la fois et je sais que c'est un grand privilège de faire tout ça.

Était-ce un rêve d’enfant d’animer un talk-show un jour?
Oui. J’ai tellement joué à animer quand j’étais petit que j’avais l’impression, quand je disais «De retour après la pause», d’être encore dans ma chambre à jouer à l’animateur. C’était sur ma liste de souhaits et je vais l’avoir fait.
Y a-t-il un stress qui accompagne ce mandat? As-tu eu peur de souffrir d’une certaine comparaison?
C’est certain que oui, mais j’y suis allé comme je suis. J’ai évité aussi de regarder les réseaux sociaux, du moins au début parce que quand j’ai été le fou du roi à Tout le monde en parle, j’ai constaté qu’il n’y a rien de plus violent que les réseaux sociaux. Il n’y a rien qui génère autant de haine que Tout le monde en parle pour une raison qui m’échappe. Quand on a annoncé que j’allais animer Bonsoir bonsoir!, ça se déchaînait avec des «Ah non, pas lui!» ou des «Je vais passer mon tour». Finalement, après quelques jours d’animation, ma meilleure amie, Sophie, m’a dit d’aller voir les commentaires. Il y a eu un virage sur le ton et les commentaires étaient bons. Les gens se sont rétractés et je suis content de pouvoir montrer que je suis capable de mener des entrevues et d’animer une émission de variétés. Je peux faire autre chose que des chroniques drôles. Ça me plaît que mon travail soit reconnu par des gens qui étaient réfractaires au départ. Ça me permet de me laisser aller et d’être plus naturel.
Revenons justement à ta présence comme Fou du roi à Tout le monde en parle. C’est un rôle ingrat, un véritable hot seat. Pourquoi avoir accepté ce projet?
En acceptant de faire ça, je savais que j’allais me faire ramasser sur les réseaux sociaux. Alors, encore là, c’était clair que je n’allais jamais aller voir les commentaires. Longtemps je me suis dit que jamais je n’allais accepter de faire le Fou du roi. Finalement, quand on me l’a offert, je me suis dit que je n’allais pas m’empêcher de faire quelque chose que je veux faire pour des gens qui sont malheureux derrière un clavier. Mais parfois, même si tu ne regardes pas les commentaires, ils arrivent quand même à toi d’une façon ou d’une autre. Il y a eu des gens qui m’ont écrit en privé pour me traiter de «gros criss de fif» ou de «gros laid». Ça finit par jouer sur le moral, ça m’a affecté, mais pas assez pour que je remette en question ma présence ou que ça tue mon plaisir.
Ça te ramène un peu dans la cour d’école lorsque tu étais intimidé?
Oui, totalement. C’est paradoxal, quand même, parce que je fais ce métier-là pour être aimé et, au final, je me replonge dans les moments douloureux de l’enfance alors que j’étais victime d’intimidation. Encore hier, une dame m’a traité de «gros éléphant pas de classe». Ça me fait vraiment me sentir dans une cour d’école... et quel genre d’adulte traite un autre de gros éléphant? On ne me reproche pas mon ton ou une mauvaise blague, on s’en prend à mon apparence physique, et ça, je trouve ça dur. Pourquoi je revis ça à 50 ans? J’ai compris que des gens restent des intimidateurs de cour d’école toute leur vie, et maintenant, ils ont les réseaux sociaux. C’est un beau terrain de jeu pour eux. Mais je ne veux pas me victimiser, c’est une partie du métier, mais ça ne m’empêche pas d’être très heureux et ces gens-là ne vont pas me dicter ma vie.
Revenons au Fou du roi. As-tu l’impression d’aller trop loin, parfois? Je pense, entre autres, au moment où tu as couvert ton verre d’une serviette de table devant Kevin Parent?
C’est étrange, car, des fois, je vais faire une blague que je regrette sur le coup et qui, finalement, n’est soulevée nulle part. D’autre fois, je pense que cette blague est banale, que les gens vont trouver ça drôle, et finalement c’est tout le contraire. Pour la blague de la serviette avec Kevin Parent, j’y avais pensé d’avance. Je me suis dit que c’était le rôle du Fou du roi de créer un certain malaise, de jouer sur la ligne, d’aller là où les autres n’osent pas aller. C’est certain que c’est dangereux de jouer sur une ligne comme ça. Dans ce cas-ci, je n’avais pas vu venir le lot de mauvaises réactions.
Ta mère est très présente dans ta carrière et dans ta vie. Tentes-tu de la préserver de ce genre de choses?
Je tente de l’épargner et je lui dis de se tenir loin des réseaux sociaux. Une fois, elle m’a appelé en pleurant: quelqu’un lui avait écrit qu’elle était une mauvaise mère parce qu’elle ne m’avait pas fait poser des broches sur les dents quand j’étais enfant. Que si je me retrouvais aujourd’hui avec une telle dentition, c’est à cause d’elle... Quand j’ai su que j’allais animer Bonsoir bonsoir!, un soir, je suis allé chez elle, et j’ai bloqué toutes ses pages de potins et de fausses manchettes. Elle en voit beaucoup moins et c’est tant mieux.

Est-ce que tu es heureux, Jean-Sébastien?
Je suis extrêmement heureux. Je fais un métier que j’aime et je réalise en ce moment un rêve, qui est celui de faire de la télévision. Je fais ce que j’ai toujours voulu faire ou presque. Bon, j’ai déjà voulu être comédien, j’ai étudié en théâtre, mais j’ai vite compris que je n’avais pas ce talent. Je n’étais pas très bon. Le deuil s’est fait doucement. En sortant de l’université, j’ai découvert le métier de recherchiste et j’ai adoré ça. J’étais heureux et j’aimais cette vie de bureau. Puis, à presque 40 ans, La soirée est encore jeune est arrivée par accident. J’avais fait la paix avec cette envie d’être devant les caméras. Mais je me suis vite reconnecté au petit gars et à son rêve de faire de la télévision.
Tu as dit que tu étais une personne fragile. Explique-moi ça...
Je suis fragile sur la confiance en moi, je suis aussi assez influençable sur différentes choses. On peut me convaincre facilement que je suis ou pas quelque chose. Je suis un anxieux, et les gens qui me connaissent bien savent qu’ils doivent choisir les mots avant de me dire quelque chose, parce que ça peut me briser le moral. Par exemple, si je demande conseil à mon pharmacien, il doit bien choisir ses mots, sinon, comme je suis hypocondriaque solide, je peux partir dans un délire et m’imaginer la pire des maladies.
L’hypocondrie prend-elle beaucoup de place dans ta vie?
Oui, beaucoup trop. Alors que je devrais être heureux de ce qui m’arrive, je me perds avec des petits symptômes qui me font craindre le pire. C’est un grand handicap dans ma vie, ça prend des proportions énormes. Juste avant Bonsoir bonsoir!, j’avais un petit enjeu et je me disais que je ne pourrais pas terminer mon contrat parce que le cancer allait prendre le dessus et que la chimio allait trop m’épuiser. Ça devient un grand délire et je suis malheureux comme tout durant ces périodes. J’ai toujours l’impression que la maladie va venir exploser le bonheur que j’ai de faire mon métier.
Tu t’en sors comment?
Je ne m’en sors pas, j’ai suivi des thérapies et ça ne marche pas. On m’a déjà dit que l’hypocondrie était l’un des trucs les plus difficiles à régler. J’ai passé des prises de sang dernièrement et juste l’attente des résultats, ça me rend anxieux. Puis, quand le résultat arrive et que j’apprends que je ne m’en faisais pour rien, il n’y a pas un bonheur plus grand pour moi, il me pousse des ailes, je me sens revivre et je chante Que c’est beau la vie. Je suis dans cet état d’ivresse pendant quelques semaines jusqu’à ce qu’arrive ma prochaine inquiétude.
Une autre de tes grandes peurs, c’est de voir ta maman, Monique, partir...
Oui, elle a 75 ans et elle va très bien. Elle adore me suivre et elle me dit souvent que je lui fais vivre une belle vieillesse. Ça m’émeut et je trouve ça extraordinaire! En réalité, 80 % de mon bonheur vient de ça. Je lui fais rencontrer des gens qu’elles admirent et c’est souvent les plus beaux moments de ma journée de voir ma mère vivre tout ça.
Tu es un véritable fils à maman?
Oui, c’est comme ça depuis que je suis tout petit. Enfant, je me souviens que j’allais dormir chez des amis et à minuit, j’appelais ma mère pour qu’elle vienne me chercher. Même aller chez mon père, une fin de semaine sur deux, c’était pénible pour moi. Finalement, je n’y allais que les samedis de 9 h à 17 h. Je voulais être avec ma mère. Une fois, elle m’a envoyé dans un camp de vacances pendant deux semaines. Au bout d’une semaine, je n’en pouvais plus. Je me souviens du bonheur de rentrer à la maison, de retrouver ma chambre, mes draps et d’entendre ma mère écouter une émission dans le salon. Pour revenir à ta question, oui, j’ai une peur bleue de la mort de ma mère, j’y pense à tous les jours. J’ai l’impression que ma vie sans elle sera cet éternel camp de vacances où je m’ennuyais et où j’étais si inquiet. À sa mort, je vais être condamné à vivre dans cet état de camp de vacances pour le restant de ma vie. Je profite donc de chaque moment avec elle.
Tu es célibataire depuis huit ans. As-tu l’impression que ta relation fusionnelle avec ta mère est une embûche à la rencontre d'un éventuel amoureux?
Oui, je pense que ça pourrait l’être. Ça fait plusieurs années que l’occasion ne se présente pas et être en relation, ce n’est pas quelque chose que j’attends ou que je cherche à tout prix. Mais c’est certain que ma priorité, dans ma vie, c’est ma mère. Je veux être là jusqu’à la fin pour elle et si un homme arrive dans ma vie, il devra comprendre que ma mère y occupe une grande place et qu’elle passe avant tout.
Comment vis-tu ton célibat?
Très bien, ça ne me manque pas du tout. J’étais un grand amoureux et ma dernière relation m’a écorché. C’est certain que je suis dans un cercle vicieux: je suis un homme de 50 ans, je suis l’archétype du vieux garçon qui habite seul, qui a ses habitudes et ses manies. Il y a aussi ma mère et mes amis qui occupent une grande place. Ma vie est tellement remplie que je n’ai pas envie de tasser la moitié de tout ça pour faire de la place à un amoureux. Je ne ressens pas le manque, je suis comblé à tous les niveaux. Je ne dis pas que ça n’arrivera jamais, mais je ne suis pas en mode recherche et je ne me projette pas en me disant que j’aimerais avoir un chum pour Noël. Le célibat, pour moi, n’est pas un purgatoire ou une salle d’attente.
Tu fais le métier, mais j’ai l’impression que tu n’es pas du genre à courir les grandes soirées jet-set...
Effectivement, même que je n’ai pas vraiment d’amis vedettes. Mes amis sont ceux que j’ai depuis fort longtemps et je ne carbure pas à ça. Je ne vais pas au resto avec Véro ou Louis-José. Ce sont des gens que j’aime, je suis content de les voir, mais ce ne sont pas des amis proches. Mais amis s’appellent Pierre, Sophie, Alice et leurs métiers n’ont rien à avoir avec ce que je fais dans la vie. La job est glamour, je me sens à Hollywood pendant mon travail, mais je n’ai pas besoin de ramener ça dans ma vie. Je proviens d’un milieu très humble et ma mère m’a toujours dit de ne jamais oublier d’où je viens. Elle ne voulait tellement pas que je me prenne pour un autre ou que j’aie la grosse tête!
Dis-moi, qu’est-ce qui reste sur ta bucket list?
Sérieusement, rien. Je fais de la télévision, je fais de la radio, j’ai accepté de faire un one man show et j’ai animé un talk-show d’été en remplacement. J’y prends goût et, tranquillement, je me dis que j’aimerais peut-être ça, un jour, avoir mon propre talk-show. Mais sinon, je ne vois pas. Je n’ai pas l’ambition d’écrire un livre, je n’ai pas ce talent-là. Les choses que j’aimerais faire, je sais que je n’ai pas le talent pour le faire. J’aimerais jouer dans une comédie musicale et chanter, mais je ne chante pas juste. J’ai donc réalisé pas mal tout ce que je voulais faire.
Tu as tiré un trait sur les spectacles d’humour après ton one man show, pourquoi?
J’ai adoré faire ça, mais je l’ai fait. Comme la radio et la télévision m’occupent à temps plein, je ne sais pas ce que je raconterais dans un deuxième spectacle. J’ai aimé faire de l’humour sur scène, mais pas ce qui vient après. C’est cool de faire un spectacle à Mont-Laurier, les gens sont en feu, la salle est belle, mais après ton show, il n’y a pas un resto d’ouvert, même le Tim Hortons est fermé. On se retrouve seul dans sa chambre d’hôtel à boire du vin dans un verre en carton en écoutant Canal Vie. On veut juste rentrer chez soi... Je suis un anxieux et je m’ennuie de chez moi.
Tu viens d’avoir 50 ans. Comment abordes-tu le fait de vieillir?
Je trouve ça très difficile. J’anticipais le 30 et le 40, mais le 50, ça fait mal. La quarantaine a été la plus belle décennie de ma vie et souvent, dans la cinquantaine, on perd beaucoup de choses. C’est peut-être la décennie dans laquelle je vais perdre la santé, ma carrière ou ma mère. C’est certain que j’ai peur que tout s’arrête et je tente de ne pas trop y penser. Mon bonheur en ce moment est complet et j’aimerais que ça dure.
En conclusion, qu’est-ce qui t’attend cet automne?
La saison 2 de Je t’attendais sera sur Tou.tv Extra cet automne et elle sera diffusée à Radio-Canada l’an prochain. Mon émission radiophonique Jeannot BBQ! devient une émission de deux heures les dimanches et aura pour titre Le beau dimanche de Jeannot. Il va y avoir cet automne une quatrième saison de La journée est encore jeune. Puis actuellement, mon émission JS Tendresse est diffusée pour une septième saison... Et je pars en vacances en Espagne cet automne!