Les arbitres ont-ils été si mauvais que ça, dimanche?: on a posé la question à trois experts

Kevin Dubé et Stéphane Cadorette
Les arbitres ont-ils été bons, mauvais ou exécrables, dimanche soir lors du match entre le Canadien et les Capitals? On a demandé à trois experts de réviser cinq séquences clés qui suscitent la controverse, depuis la fin du quatrième match.
On a ainsi sondé le préfet de discipline de la LHJMQ, Éric Chouinard, l’ancien arbitre de la LNH, analyste à TVA Sports et directeur général de Hockey Québec, Stéphane Auger, ainsi que le superviseur-chef des arbitres à Hockey Québec, François Fortin.
Nous leur avons soumis cinq séquences, et leur avons demandé d’analyser le travail des officiels sur chacune d’elles.
1. Mise en échec d’Alex Ovechkin sur Jake Evans
Ce que la règle 48,1 sur les mises en échec à la tête dit est qu’«une mise en échec entraînant un contact avec la tête de l’adversaire et pour laquelle la tête était le principal point de contact et où le contact avec la tête était évitable n’est pas permise.» Ce qui suscite le débat ici est de savoir si Ovechkin a visé la tête d’Evans et s’il l’a frappé dans son angle mort.
Résultat du jeu: Ovechkin a reçu une pénalité mineure pour obstruction.
Ce qu’en pensent nos experts
Éric Chouinard: «Je réalise que beaucoup de gens ne savent pas ce qu’est une mise en échec en angle mort. Ce n’est pas ça du tout, ici. L’angle mort, c’est ce qui se trouve derrière toi. Ici, ce n’est pas le cas, et ce n’est pas non plus un coup à la tête. Honnêtement, je me demande même si c’est un deux minutes. Tout ce que je pourrais reprocher à Ovechkin, c’est que son bâton n’était pas sur la patinoire au moment de l’impact.»
Stéphane Auger: «Ça faisait trop longtemps qu’Evans n’avait plus la rondelle. C’est une obstruction et les arbitres ont fait le bon appel. Ce n’était pas du tout dans l’angle mort d’Evans, par contre.»
François Fortin: «C’est une punition pour obstruction et non pour coup à la tête et c’est la bonne décision. Ce qui paraît mal, c’est qu’Evans est un peu hors d’équilibre quand Ovechkin arrive. Plus je revois la séquence, plus je me demande si c’est une punition. Ovechkin, son jeu est d’aller sur le porteur du disque. Qu’est-ce qu’il peut faire d’autre?»
2. Mise en échec de Tom Wilson sur Alexandre Carrier
Sur ce coup de Tom Wilson, on se réfère au même règlement 48,1 du livre de règlements de la LNH. On pourrait ajouter que la règle donne trois situations afin de déterminer si le contact à la tête était évitable ou pas:
- Est-ce que le joueur a essayé de frapper directement le corps de l’adversaire et que la tête a été frappée en raison d’un mauvais timing, d’un mauvais angle d’approche ou d’une extension non nécessaire du corps, vers le haut ou vers le bas?
- Est-ce que l’adversaire s’est placé dans une situation vulnérable en se plaçant de façon à ce que le contact à la tête ait été inévitable dans ce qui aurait normalement été une mise en échec au corps?
- Est-ce que l’adversaire a changé la position de son corps ou de sa tête immédiatement avant la mise en échec ou simultanément avec cette dernière de façon à contribuer significativement au contact avec la tête?
Résultat du jeu: Wilson n’a pas été puni.
Ce qu’en pensent nos experts
Éric Chouinard: «Est-ce que la tête est le point de contact principal? Non. Est-ce que c’est une mise en échec dans l’angle mort de Carrier? Non. Tom Wilson est un train et c’est percutant, mais c’est une mise en échec légale.»
Stéphane Auger: «Rien de plus légal. Wilson frappe devant lui, rien ne lève et le point de contact principal est le corps. Oui, ça peut arriver que la tête soit accrochée sous l’impact, mais ce n’était pas le point de contact principal.»
François Fortin: «Je ne vois pas du tout le point d’impact comme étant la tête. Ça se passe vraiment vite et Wilson arrive comme un train. Je ne vois pas les patins de Wilson lever, donc moi, ce n’est absolument pas une mise en échec que je juge condamnable. C’est la vitesse à laquelle Wilson arrive qui donne l’impression à certains que c’est un assaut.»
3. Mise en échec de Tom Wilson sur Lane Hutson
Après cette mise en échec, le défenseur du Canadien a fait valoir à l’officiel qu’il avait été victime d’un coup de coude à la tête. On pourrait se référer à nouveau au règlement 48,1, et ajouter la règle 45,1 sur les coups de coude, définis comme «l’utilisation d’une extension du coude pouvant causer ou pas une blessure».
Résultat du jeu: Wilson n’a pas été puni.
Ce qu’en pensent nos experts
Éric Chouinard: «Dans cette situation, le point de contact principal est le corps de Hutson. Il vient de finir son jeu et doit s’attendre à se faire frapper. Wilson termine sa mise en échec et son coude n’est pas levé au point de contact. Il ne frappe également pas la tête et a les genoux fléchis.»
Stéphane Auger: «À la fin de la mise en échec, on voit que le coude lève. Là-dessus, on aurait dû décerner une pénalité de deux minutes pour coup de coude.»
François Fortin: «C’est une séquence difficile à juger parce que l’angle de caméra n’est pas super bon. Le coup vient tardivement, mais je ne peux pas affirmer que le coude de Wilson est dans la face de Hutson. Je sais que Hutson est allé se plaindre à l’arbitre après, mais on voit aussi que Hutson lève le bâton et je ne sais pas si ça a pu avoir une incidence.»
4. Pénalité de Josh Anderson sur Tom Wilson
Anderson a été chassé pour rudesse sur cette séquence, après avoir servi un coup à Wilson alors qu’il n’était pas en possession de la rondelle.
Résultat: Josh Anderson chassé, pas Wilson.
Ce qu’en pensent nos experts
Stéphane Auger: «Les gars ont tendance à mettre de l’extra moutarde et c’est ce qu’Anderson a fait. Il n’a jamais considéré la rondelle. Toutefois, là-dessus, j’aurais aussi donné un deux minutes à Wilson pour la même raison. Pour moi, c’est soit tu sors les deux, soit tu n’en sors aucun.»
François Fortin: «Le jeu est déjà reparti et les Capitals ont organisé leur contre-attaque. Anderson donne son coup alors que la rondelle n’est pas dans le coin. Je pense que c’est pour ça qu’on l’a pénalisé pour rudesse et que c’est justifié.»
5. Pénalité de Joel Armia sur Tom Wilson
Ce qui a surtout frustré les partisans du CH sur cette séquence, c’est la facilité avec laquelle Wilson s’est laissé choir sur la patinoire après avoir été retenu par Armia. Mais il faut aller au-delà de ce geste, jugent nos experts.
Résultat du jeu: Armia a été chassé pour avoir accroché.
Ce qu’en pensent nos experts
Stéphane Auger: «C’est clairement une infraction. Oui, Wilson tombe à la fin, mais l’appel a été fait avant ça. On voit très bien le bâton d’Armia se retrouver au niveau des gants de Wilson alors qu’il se trouvait en situation de marquer. En plus, quelques secondes après, David Savard met aussi son bâton dans les gants de Wilson. Ça aurait pu être une autre pénalité.»
François Fortin: «Les gens insistent sur le fait que Wilson en met en tombant, mais ce n’est pas une punition pour avoir accroché. C’est une punition pour avoir retenu. Si tu regardes la reprise, le bâton est vraiment au niveau de la main de Wilson. Est-ce que Wilson était justifié de se lancer sur la glace comme il a fait? Je ne pense pas, mais c’était une importante chance de marquer et si Armia n’accroche pas, Wilson aurait une vraie occasion de prendre le retour de lancer et de compter.»