[ANALYSE] L’échec de Ducharme à la SAAQ est aussi celui du gouvernement Legault

Rémi Nadeau – analyse
Devant les révélations de la commission d’enquête sur SAAQclic, Québec n’avait pas le choix de faire rouler des têtes, et le grand patron de la SAAQ a subi le couperet sans surprise. Le gouvernement Legault doit toutefois aussi assumer sa responsabilité, alors que le ménage n’a pas été complété plus de deux ans après la catastrophe.
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Lorsque Éric Ducharme a tenu une conférence de presse pour réagir au rapport du Vérificateur général sur le fiasco SAAQclic, il a raté sa première chance de faire bonne impression.
On venait d’apprendre que le projet coûterait au bas mot 500 millions$ de plus, que des dirigeants de la SAAQ avaient caché des informations, et il n’a pas été foutu de dire qu’il y aurait une enquête interne.
Il semblait ne pas y avoir pensé.
L’impression de décalage total qu’il a dégagée, ce je-m’en-foutisme étonnant, on a compris durant les témoignages de la commission Gallant qu’elle était bien réelle.
Des vérificatrices internes ont raconté avec beaucoup d’aplomb qu’elles avaient levé tous les drapeaux rouges possibles pour alerter le patron sur les risques des contrats associés à SAAQclic.
Mais Ducharme restait impassible, les bras croisés, peu intéressé par l’idée de remuer quoi que ce soit.
On est si bien quand on dort paisiblement, les yeux fermés.

Défendre la machine
L’une d’elles a décrit comment elle s’était sentie, comme si on lui «crachait dessus», alors qu’elle s’acquittait pourtant de son devoir de vigilance.
Le gouvernement Legault avait pourtant choisi le PDG pour faire le ménage à la SAAQ.
Et, par la suite, l’Autorité des marchés publics (AMP) a suspendu les contrats de SAAQclic parce que tout était encore géré à la SAAQ comme si de rien n’était.
C’est très gênant.
L’échec de Ducharme à faire que le public retrouve sa confiance en la SAAQ est aussi l’échec du gouvernement caquiste qui l’a mis en place.
La suite pour Guilbault
Il n’était pas le choix de Geneviève Guilbault.
La ministre des Transports tapait du pied en 2023 pour que Denis Marsolais soit remplacé en raison de son manque d’efficacité dans le déploiement catastrophique des nouveaux services numériques.
On lui a conseillé ce haut fonctionnaire cumulant une trentaine d’années de services.
Cette fois, c’est elle qui mise sur une autre femme, Annie Lafond, issue du secteur privé.
Elle n’a pas attendu que la commission d’enquête publique sur SAAQclic termine ses travaux, ou que Ducharme y témoigne lui-même, pour le faire passer sous l’autobus.
La commission Gallant a jusqu’au 15 décembre pour remettre son rapport.
Il était impensable qu’elle laisse cette impression de foutoir perdurer tout l’automne.
Mais, dans les derniers mois, a-t-elle été suffisamment aux aguets pour s’assurer que le patron donnerait les coups de balai nécessaires dans une SAAQ en déroute?
On peut en douter.
Son travail à elle doit aussi être analysé dans le cadre de l’enquête publique, qui se poursuivra après les vacances estivales.
En conférence de presse, mercredi, elle a soutenu avoir organisé des rencontres Teams de gestion de crise trois fois par jour, disant ne pas pouvoir être plus «proactive».
Comment se fait-il que la situation ne se soit pas améliorée davantage, alors?
La ministre admet que «l’image de la SAAQ a été irrémédiablement ternie», et a mis en lumière l’expérience en marketing de la nouvelle PDG.
Souhaitons qu’on ne prépare pas seulement une meilleure mise en marché. La SAAQ est malade pour vrai.