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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Le wokisme a fait élire Trump

AFP
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Photo portrait de Luc Lavoie

Luc Lavoie

2025-07-12T04:00:00Z
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Le 26 avril dernier – deux jours avant l’élection fédérale au Canada –, j’ai pris la parole à Montréal devant des membres américains de l’YPO (Young Presidents’ Organization), prestigieux regroupement de gens d’affaires issus de 130 pays qui s’intéressent aux politiques publiques. Ces gens, clairement instruits et informés, étaient tous des résidents de Palm Beach en Floride.

Mon exposé terminé, la première question qu’on me posa fut la suivante: «Comment expliquez-vous que le Parti conservateur de Pierre Poilievre, qui jouissait d’une confortable avance dans les sondages au début de 2025, soit sur le point d’être battu?»

La réponse était fort simple: «Vous avez élu Donald Trump qui a décidé d’imposer des tarifs à l’exportation à de nombreux pays, dont le Canada, en plus d’exprimer fréquemment sa volonté d’annexer notre pays. Cela a suscité chez nous un vent de panique et les Canadiens estiment que Mark Carney est le meilleur chef pour négocier avec Trump».

Mais à mesure que je précisais ma pensée, je sentais un réel malaise dans mon auditoire. Ce fut alors à mon tour de poser une question: «Ai-je raison de croire que la majorité d’entre vous a voté pour Trump en novembre dernier?»

Je m’étais trompé. Ce n’est pas la majorité, mais la totalité d’entre eux qui avaient voté pour Trump.

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Je leur ai ensuite demandé d’où venait cet évident malaise que je percevais sur leurs visages.

Les réponses étaient très intéressantes. L’un d’eux a carrément dit qu’il avait voté pour Trump en se bouchant le nez, essentiellement parce qu’il était prêt à tout pour que Kamala Harris soit battue.

– «Mais pourquoi vouliez-vous absolument qu’elle perde?» ai-je demandé.

– «Parce que pendant ses années en politique californienne, Kamala Harris a fermement appuyé le wokisme. Or, je ne veux pas que quiconque puisse dire à ma fille de 8 ans qu’elle pourrait facilement devenir un garçon.»

Immédiatement après cet échange, les autres ont emboîté le pas. Presque tous avaient quelque chose à dire sur le wokisme et la cancel culture.

Je m’attendais à ce que ces gens me parlent d’immigration et d’inflation. Mais ce que je ne soupçonnais pas, c’est le degré d’émotivité que porte le wokisme.

Je dirais même, a posteriori, qu’une bonne partie des appuis de Poilievre avant les élucubrations de Trump était motivée par cette opposition au wokisme.

Voilà un mouvement né dans la foulée du «Black Lives Matter», mais qui, depuis, a largement dépassé la seule question de la violence envers les Afro-Américains. Au point d’entraîner une foule d’initiatives qui n’ont rien à y voir: censure, écriture inclusive, promotion des LGBTQ+, interdiction à des conférenciers de prendre la parole dans des universités parce que des étudiants s’opposent à certains de leurs gestes ou de leurs écrits.

Comme le souligne Giuliano da Empoli dans son dernier ouvrage L’heure des prédateurs, «le wokisme est du pain bénit, le carburant idéal pour alimenter leur machine du chaos», écrit-il en parlant de Trump et de ses semblables.

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