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L'article provient de Le Journal de Québec
Politique

Le syndrome de La Havane

Photo d'archives, AFP
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Photo portrait de Luc Laliberté

Luc Laliberté

2021-05-18T16:08:57Z
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Si je ne suis guère friand de théories du complot et que je constate rapidement l’argumentaire bancal ou échevelé de plusieurs complotistes, il y a de ces mystères qui piquent ma curiosité durablement. Ce qu’on appelle le «syndrome de La Havane» entre dans cette catégorie.

Vous vous souvenez peut-être qu’on a commencé à évoquer ce syndrome à l’automne 2016 lorsque des diplomates américains (quelques Canadiens également) de l’ambassade américaine à La Havane ont commencé à développer les symptômes qui suivent: maux de tête, perte de l’ouïe, perte d’équilibre, nausées, vision trouble et perte d’élocution.

L’étrange maladie a suscité de vives inquiétudes et quelques chercheurs se sont intéressés aux causes des malaises. Si on a d’abord évoqué le chant des criquets (stridulation) ou des problèmes psychosociologiques du personnel en poste à Cuba, l’Académie des sciences de Washington penche en faveur de l’exposition des sujets touchés à des ondes de basses fréquences hors du spectre de l’audition.

Du côté américain, on croit donc que les résidences des diplomates américains ont été visées par une attaque aux micro-ondes. Du côté canadien, on a ajouté une thèse selon laquelle les symptômes pourraient être associés à l’usage de pesticides (neurotoxines) autour des ambassades. Il n’y a donc pas unanimité sur les origines du mal et les familles canadiennes touchées par le syndrome poursuivent d’ailleurs le gouvernement.

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Si la thèse américaine devait être retenue, le personnel américain aurait donc été victime d’une attaque. Si les premiers cas relevés l’ont été à La Havane, d’autres diplomates américains ont été visés à Guangzhou, en Chine. La technologie utilisée aurait été développée à l’époque de l’URSS et aurait ensuite été partagée avec des régimes alliés comme ceux de la Chine et de Cuba.

Pourquoi revenir sur le sujet aujourd’hui? Parce qu’on rapportait hier et ce matin que deux membres de la sécurité nationale des États-Unis auraient été atteints dans les dernières semaines près de la Maison-Blanche. Ces deux cas s’ajoutent à celui d’une conseillère de la Maison-Blanche en 2019 dans une banlieue de la Virginie. 

Depuis 2016, ce sont donc 139 Américains, espions, soldats et diplomates, qui ont développé des symptômes similaires. L’administration Biden évalue présentement ses options dans ce dossier, mais les responsables du Pentagone semblent convaincus qu’il s’agit d’attaques de la part de la Russie. 

Une fois de plus, la relation entre les États-Unis et la Russie de Vladimir Poutine semble particulièrement tendue. Déjà préoccupé par la Chine et entraîné récemment dans le conflit israélo-palestinien, le président Biden demeure prudent face aux possibles attaques de la Russie.

Si l'on considère le nombre de personnes touchées, certaines très sérieusement et sur une longue période, ainsi que la localisation des plus récents cas, à deux pas de la Maison-Blanche, le président doit se montrer ferme et rassurer ses compatriotes pour éviter la panique. 

Cependant, tant et aussi longtemps qu’il subsiste un doute sur l’origine des attaques, Joe Biden ne peut risquer un équilibre précaire en identifiant clairement un commanditaire des attaques. Pour le moment, le fardeau de la preuve incombe à la CIA, et des élus pressent le service des renseignements d’accélérer le rythme. 

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