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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Le scandale SAAQclic est le symptôme d’un État québécois détraqué

La ministre des Transports s’empêtre dans sa déferlante coutumière de mots creux tout en se lavant bien les mains de sa responsabilité ministérielle.
La ministre des Transports s’empêtre dans sa déferlante coutumière de mots creux tout en se lavant bien les mains de sa responsabilité ministérielle. Photo Stevens LeBlanc
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Photo portrait de Josée Legault

Josée Legault

2025-07-11T04:00:00Z
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Le scandale SAAQclic, son virage numérique raté et ses dépassements de coûts faramineux sont un véritable panier de crabes. Les travaux de la commission Gallant le confirment déjà amplement.

Voilà qu’un deuxième PDG d’affilée de la Société d’assurance automobile du Québec est offert en agneau sacrificiel dans l’espoir vain de nettoyer cette ardoise souillée pour la CAQ avant le remaniement ministériel de l’automne.

Pourtant nommé par le gouvernement Legault comme son prédécesseur Denis Marsolais pour de présumées grandes compétences de haut gestionnaire, Éric Ducharme mord la poussière à son tour.

Pour le justifier, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, s’empêtre dans sa déferlante coutumière de mots creux tout en se lavant bien les mains de sa responsabilité ministérielle.

Soyons cependant charitables et prêtons tout au moins à la ministre l’intelligence de ne plus vraiment se croire elle-même.

Or, ce qu’il faut comprendre est que derrière le fiasco SAAQclic se terrent deux crises persistantes. L’une très politique et l’autre tristement systémique.

La première est le produit de la CAQ. Privilégier l’image et la communication au détriment de politiques publiques solides étant sa grande faiblesse.

Le scandale SAAQclic, tout comme la mauvaise farce du troisième lien ou la création de Santé Québec, en est une énième manifestation.

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Image et communication

C’est donc sans surprise que, pour remplacer M. Ducharme, la ministre Guilbault choisisse Annie Lafond, elle aussi férue de marketing. Sa mission: redresser l’image amochée de la SAAQ.

Encore une fois, le souci pour l’image et la communication prédomine. La seconde crise est de nature plus systémique. Elle précède la CAQ et elle lui survivra si le prochain gouvernement met également l’accent sur le marketing au détriment de la substance.

Cette crise est en fait celle de l’État québécois lui-même. Du moins, celui qui, depuis la fin des années 90, délaisse l’héritage de la Révolution tranquille.

Ce legs renié était l’humanisme dans les services publics, l’efficacité bureaucratique pour les livrer et la responsabilité politique des élus.

Les Québécois constatent d’ailleurs ce bris du contrat social les liant à leur État national. Ils le voient dans le réseau de santé, les écoles publiques, l’absence d’intervention pour contrer la crise du logement, etc.

Le parfait microcosme

Le scandale SAAQclic en est le parfait microcosme. Nominations partisanes de dirigeants incompétents. Dilapidation de l’argent des contribuables. Encadrement politique laxiste.

Perte d’expertises dans les ministères obligeant l’État à recourir à des firmes privées trop heureuses de plonger à pleines mains dans le plat de bonbons du trésor public. Livraison de services déficients. Etc.

À quelques exceptions près, c’est l’État québécois lui-même qui est détraqué. Il l’est parce que depuis trente ans, des gouvernements laissent faire.

Au risque même parfois, comme l’a rappelé la commission Charbonneau, d’ouvrir la porte aux trois «c»: collusion, copinage et corruption.

Mais de tout ça – le vrai problème de fond –, aucune «ligne» officielle de communication, tous gouvernements confondus, n’en parle.

C’est pourquoi au scrutin d’octobre 2026, comme en 1976, bien des électeurs, qu’ils soient souverainistes ou fédéralistes, auront peut-être le goût de refaire un grand ménage. Jusqu’à la prochaine fois...

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