Le Québec n’est plus en mesure d’accueillir dignement les demandeurs d’asile, selon un organisme communautaire débordé

Le Centre d’appui aux communautés immigrantes de Montréal lance un cri du cœur: le Québec n’est plus en mesure d’accueillir dignement les demandeurs d’asile, en raison de leur grand nombre.

Chaque jour, 43 migrants à la recherche d’un statut de réfugié, en moyenne, cognent à la porte de l’organisme à but non lucratif, qui aide les nouveaux arrivants à s’installer et s’intégrer à la société québécoise.

Ils représentent désormais 13% de la clientèle du Centre d’appui aux communautés immigrantes (CACI), qui est initialement chargé d’accompagner les résidents permanents, travailleurs qualifiés, travailleurs temporaires et étudiants étrangers.

Les intervenants tentent de trouver un toit aux demandeurs d’asile et de la nourriture et les aident dans leurs démarches pour trouver un emploi, inscrire leurs enfants à la garderie ou à l’école. Mais avec la crise du logement qui sévit, la mission est devenue pratiquement impossible.

«Ces gens viennent au Canada parce qu’ils fuient leur pays dans différents contextes: la guerre, la crise humanitaire, les catastrophes climatiques... Ils viennent ici parce qu’ils font confiance au Canada et je pense qu’on a le devoir de les accueillir dignement. Ces gens-là méritent un minimum de dignité et actuellement, surtout avec la crise du logement, je pense qu’on n’y arrive pas», lâche la directrice générale de l’organisme, Anait Aleksanian, en entrevue avec notre Bureau parlementaire.

• Écoutez l'entrevue avec Anait Aleksanian, directrice du Centre d'appui aux communautés immigrantes (CACI) au micro d’Alexandre Dubé via QUB :

Une famille dans une voiture abandonnée

Elle raconte comment de nombreuses familles de migrants, comptant souvent plusieurs enfants, doivent parfois s’entasser dans des studios ou de tout petits appartements. Récemment, la Direction de la protection de la jeunesse a fait appel au CACI pour tenter de trouver un logement à une famille de demandeurs d’asile qui vivait dans une voiture abandonnée avec leurs deux enfants. «Je n’appelle pas ça vivre dignement», souligne-t-elle.

L’organisme communautaire offre aussi du dépannage alimentaire. Encore là, la demande dépasse «largement les capacités» du CACI. «On peut offrir environ 175 paniers alimentaires par semaine, mais on se retrouve avec une liste d’attente énorme et une grande partie est composée de demandeurs d’asile».

Le gouvernement de Justin Trudeau a accepté de rendre le visa obligatoire pour les ressortissants mexicains, pour freiner la hausse de migrants en provenance du Mexique. Sur le terrain, cette mesure n’a toutefois que peu d’impact.

Le visa mexicain a peu d’impact

«Il y en a d’autres pays, du Venezuela, beaucoup de gens du Congo, de la Colombie, d’Haïti, du Pérou, il y en a de partout. Le nombre de Mexicains a diminué, mais le nombre de demandeurs d’asile en général, ça n’a pas diminué. Peut-être que ça prend un peu plus d’équilibre pour la distribution, entre toutes les provinces canadiennes, des demandeurs d’asile», plaide M^me Aleksanian.

La DG ne cache pas que l’afflux de migrants en attente d’un statut de réfugié draine une part importante des services qui devraient être offerts à toutes les catégories d’immigrants.

«On essaye de les aider, mais à un moment donné, il y a aussi une limite. Nos intervenants sont là [...] pour accueillir les résidents permanents, travailleurs qualifiés, étudiants étrangers, travailleurs étrangers, travailleurs temporaires. Les demandeurs d’asile prennent actuellement beaucoup de notre temps».

Demandeurs d’asile accueillis au Québec depuis le début de l’année

22 905

37% des demandeurs d’asile arrivés au Canada

Demandeurs d’asile accueillis en Ontario depuis le début de l’année

31 820

51% des demandeurs d’asile arrivés au Canada

Source : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada