Le Québec ignore toujours sa capacité d’accueil
Un appel à projets lancé en 2023 n’a intéressé aucun chercheur


Nora T. Lamontagne
Incapable de déterminer sa fameuse capacité d’accueil en matière d’immigration, Québec tente depuis deux ans de convaincre des chercheurs de l’aider à mieux la cerner, sans succès.
Lors de l’étude des crédits, le ministre de l’Immigration Jean-François Roberge s’est fait questionner sur un appel à projets d’une valeur maximale de 10M$ annoncé par sa prédécesseure, Christine Fréchette, en 2023.
Les projets subventionnés devaient permettre d’étudier, entre autres, la capacité d’accueil de la province à l’heure d’une hausse historique de l’immigration.
Souvent évoqué par les politiciens, le concept de «capacité d’accueil» est toutefois dur à quantifier ou à définir en termes scientifiques.
Selon l’appel du Fonds de recherche du Québec publié à l’époque, la date limite pour déposer une demande de financement était fixée à février 2024.
Or, en commission parlementaire jeudi, le ministre Roberge n’avait aucune information à partager sur les montants alloués ni sur le nombre de projets sélectionnés depuis ou sur la nature de ceux-ci.
«Il y a manifestement eu des délais, parce qu’on me dit que le lancement va se faire à l’automne 2025», a-t-il admis en réponse aux questions de Guillaume Cliche-Rivard, porte-parole de Québec solidaire en matière d’immigration.
Après les questions de notre Bureau d’enquête, le cabinet du ministre a précisé qu’aucun chercheur n’avait répondu à l’appel d’offres initial pour le volet capacité d’accueil. La prochaine version devrait être plus précise, nous a-t-on dit.
Des bases scientifiques
Par le passé, le gouvernement Legault a régulièrement avancé que la capacité d’accueil du Québec était dépassée pour justifier ses réductions des cibles en immigration et son aversion à recevoir plus de demandeurs d’asile.
En commission, le ministre Roberge a évoqué une panoplie de critères qui, selon lui, devaient être pris en compte dans l’évaluation de cette capacité: «l’accroissement de la population, la capacité de logement, l’éducation, la santé et les services sociaux, le poids sur les finances publiques de l’aide sociale, le taux de chômage, les services de garde, la francisation...»
Peu convaincu par sa réponse, son vis-à-vis solidaire a critiqué ses méthodes.
«La capacité d’accueil, c’est une question importante, mais j’aimerais qu’on puisse faire ce débat sur des bases scientifiques et que la science nous aide à l’étayer» a laissé tomber Guillaume Cliche-Rivard.