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L'article provient de Le Journal de Québec
Société

Le Québec en Amérique: saviez-vous qu’un Canadien français a déjà été gouverneur du Rhode Island?

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Photo portrait de Luc Laliberté

Luc Laliberté

2023-04-01T04:00:00Z
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On parle depuis bien longtemps du fameux rêve américain, cette idée tenace selon laquelle n’importe qui peut devenir prospère, pour peu que cette personne soit travaillante, courageuse et déterminée. Si on évoque souvent le caractère illusoire de l’American dream, c’est pourtant ce qui s’est produit pour un jeune homme de Yamachiche après sa migration vers les États-Unis.

Portrait d’Aram Pothier.
Portrait d’Aram Pothier. Photo tirée de la Rhode Island State House collection

J’emprunte à l’historien Martin Pâquet, de l’Université Laval, l’idée d’associer le concept du rêve américain au parcours d’Aram Pothier après son arrivée à Woonsocket, au Rhode Island. Martin Pâquet le présente d’ailleurs ainsi : « À la poursuite du rêve américain, Aram-Jules Pothier suit les sentiers empruntés par Horatio Alger, cet American Hero qui, de pauvre immigrant britannique sur les quais de Baltimore, conquiert à la fois richesses et prestige sur cette Terre promise. »

Maison d’Aram Pothier à Woonsocket, au Rhode Island.
Maison d’Aram Pothier à Woonsocket, au Rhode Island. Photo tirée du National Register of Historic Places

Le rêve américain

Le parcours du Canadien français n’est pas banal. Pothier doit sa réussite à son talent, à son esprit d’initiative et aux relations qu’il noue avec des gens influents, autant au sein de la communauté anglophone qu’auprès de ses compatriotes.

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Employé de magasin, commis dans une banque, conseiller en gestion financière, puis président de l’institution qui l’emploie, il a gravi un à un les échelons qui lui ont permis de se propulser sur la scène politique.

Comme bien d’autres Franco-Américains, Pothier est proche des républicains, le parti qui domine les élections présidentielles de 1896 à 1928, avec six victoires en huit élections. Alors que Pothier est très impliqué dans le domaine public, sa progression est rapide sur la scène politique. 

Affiche de l’Exposition universelle de Paris en 1900. Aram Pothier est à cette époque délégué officiel. C’est lors d’un de ses périples en France qu’il rencontre sa future femme, Françoise de Charmigny.
Affiche de l’Exposition universelle de Paris en 1900. Aram Pothier est à cette époque délégué officiel. C’est lors d’un de ses périples en France qu’il rencontre sa future femme, Françoise de Charmigny. Photo tirée de Wikimedia Commons

De simple membre de la Commission scolaire de Woonsocket, il devient contrôleur financier de la ville, maire de sa municipalité, puis lieutenant-gouverneur du Rhode Island de 1887 et 1898. À deux reprises, en 1889 et en 1900, on l’a envoyé comme délégué à l’Exposition universelle de Paris. C’est lors du premier périple qu’il a rencontré celle qui allait devenir son épouse, Françoise de Charmigny. Aram Pothier atteint le sommet de sa carrière en étant élu gouverneur du Rhode Island, fonction qu’il occupa de 1905 à 1909, puis de 1925 jusqu’à sa mort, en 1928.

Le mausolée d’Aram Pothier se trouve au Precious Blood Cemetery à Woonsocket, Rhode Island.
Le mausolée d’Aram Pothier se trouve au Precious Blood Cemetery à Woonsocket, Rhode Island. Photo fournie par Mich Rabushka

Canadiens français, mais pas trop

Quand on étudie le comportement des Canadiens français qui migrent vers les États-Unis aux XIXe et XXe siècles, on peut généralement dégager deux grandes tendances : soit on devient adepte de la « survivance » et on se bat pour préserver sa langue et sa religion, soit on opte pour l’assimilation.

Aram Pothier s’est retrouvé à la jonction de ces deux courants. Fier de ses origines et conscient de l’importance du vote des Franco-Américains, il invite ses concitoyens, sans leur demander de renier leur passé, à s’intégrer et à ne pas faire bande à part.

La vie et la carrière de Pothier contribuent donc à entretenir le mythe de l’American dream. Il est à la fois la fierté d’une communauté qu’il a défendue tout en souhaitant s’en distinguer, et le membre d’une bourgeoisie anglo-américaine qui a su utiliser ses origines modestes pour se rapprocher des milieux ouvriers.

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