Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Le Québec de François Legault devient un pays... qui n’est pas souverain

Partager
Photo portrait de Rémi Nadeau

Rémi Nadeau

2025-02-01T05:00:00Z
Partager

Avec un projet de loi sur l’intégration nationale des nouveaux arrivants, la CAQ ajoute une brique supplémentaire à la construction de son pays de l’intérieur. Au-delà des symboles, François Legault pose des gestes d’autonomie et d’affirmation du Québec... qui ont tout de même leurs limites.

Avec la Loi sur la laïcité de l’État, le Québec est allé à contre-courant de l’esprit de la Charte canadienne des droits et libertés.

Il a osé assumer sa différence et faire en sorte de la protéger avec la clause dérogatoire.

Le gouvernement Legault a aussi modernisé la loi 101, pour tenter de freiner le déclin de la langue française qui nous distingue.

Simon Jolin-Barrette a réussi un coup de génie en faisant inscrire dans la Constitution canadienne la spécificité du Québec, en tant que nation ayant le français comme seule langue officielle.

Le premier ministre vient de lui donner les coudées franches pour rédiger une Constitution québécoise.

Il y a sûrement un peu d’opportunisme politique dans ce choix.

Il n’y a pas si longtemps, au gouvernement, on montrait peu d’intérêt pour ce projet que caresse le ministre bleu hyperactif.

Occuper l’espace du nationalisme a ses vertus pour la CAQ, alors que le PQ trône depuis longtemps au sommet des sondages.

Publicité

Accueil des arrivants

Le projet de loi déposé par Jean-François Roberge cette semaine est un autre pas dans cette direction.

En gros, Québec ne financera que les organismes respectant des critères édictés d’intégration nationale.

C’est à la fois une réponse au multiculturalisme et un rempart contre la ghettoïsation des immigrants.

Plutôt que regrouper entre eux les membres d’une communauté pour célébrer ses nouveaux arrivants, il faudra que les groupes financés intègrent d’autres Québécois à ces événements pour qu’ils deviennent des lieux de mixité.

La musique québécoise ou d’autres expressions culturelles de notre société devront être à l’honneur.

Ce serait facile de caricaturer et d’imaginer des immigrants affublés de ceintures fléchées, forcés d’écouter Gens du pays.

Il n’y a quand même rien de ridicule à passer le message que la société d’accueil n’est pas une coquille vide.

Et à faire en sorte que ceux qui veulent y habiter embrassent ses valeurs et sa culture communes.

Il y a le test des valeurs, érigé en symbole par la CAQ avant l’élection de 2018, dont on ignore les effets concrets depuis sa mise en place.

Jean-François Roberge s’est montré évasif à ce sujet, mais a soutenu que ce test des valeurs serait revu dans le cadre de sa politique d’intégration, rédigée au plus tard un an après l’adoption de la loi.

Mais les empiétements

Même si la CAQ pose tous ces gestes, le Québec reste toutefois exposé aux empiétements dans ses compétences par le gouvernement fédéral.

Il reste ralenti par le chevauchement de juridictions qui complexifie, par exemple, la gestion de l’immigration.

Le Parti Québécois pourra toujours claironner qu’avec son projet d’indépendance, le Québec serait complètement libre.

Pas à demi-libre.

Chez les souverainistes, certains se demandent pourquoi les appuis à la CAQ ne se sont pas effondrés davantage, à la suite de rebuffades essuyées par François Legault dans ses demandes à Ottawa depuis 2018.

Bien des Québécois se contentent de l’affirmation nationale.

Même si les gains sont minimes.

Comme si l’important, c’était la posture.

Debout pour réclamer des pouvoirs, c’est mieux qu’à plat ventre sans rien dire!

L’ennemi du PQ, c’est ce confort dans l’autonomie restreinte.

Le défi de la CAQ, c’est de rendre son pourtour bleu emballant, quand les services de santé ou d’éducation craquent et que l’incertitude liée à Donald Trump fait trembler les entreprises.

Publicité
Publicité