Le Québec, de droite?


Mathieu Bock-Côté
Le Québec serait-il en train de passer à droite sans le savoir? C’est une question que plusieurs se posent à la suite d'une récente chronique de Rémi Nadeau.
Il vaut la peine de se la poser, en ajoutant une dimension au questionnement: qu’entend-on par gauche et droite, aujourd’hui?
La réponse est moins claire qu’on le croit.
Dans notre esprit provincial, on associe souvent, de manière un peu simpliste, la gauche à l’intervention de l’État dans l’économie, et la droite au primat de l’entreprise privée. C’est vrai. Mais c’est limité.
Allons plus loin, en intégrant une dimension occidentale.
Occident
Ainsi, dans le monde contemporain, la gauche est associée au multiculturalisme et à l’immigration massive, et la droite à l’identité nationale et au contrôle des frontières.
La gauche croit aux programmes EDI, alimentés par le wokisme. Elle aime les quotas ethniques et raciaux. La droite préfère le mérite individuel et se soucie moins de la couleur de la peau d’un individu ou de son origine ethnique que de ce qu’il a accompli personnellement.
La gauche croit au citoyen du monde, la droite croit à l’enracinement.
La gauche aime la censure, au nom de l’interdiction des discours haineux et de la désinformation. La droite aime la liberté d’expression malgré ses excès, malgré ses débordements. Car elle sait que la censure du pire n’est qu’une étape dans l’interdiction du désaccord.
La gauche aime les programmes sociaux universels et les experts technocratiques voulant paramétrer nos vies. La droite préfère la responsabilité individuelle et le bon sens.
La gauche, en général, est mondialiste, et la droite, en général, préfère la souveraineté nationale.
La gauche, en général, se montre favorable à la théorie du genre et prend au sérieux un individu qui prétend être ni homme ni femme, ou qui prétend que son genre ne recoupe pas son sexe.
La droite croit que l’humanité est fondée sur la dualité des sexes et qu’il n’y a aucun sens à parler du spectre du genre.
Je pourrais poursuivre longtemps.
Et tout cela, évidemment, devrait s’accompagner de mille nuances.
Car les concepts de gauche et de droite évoluent, aujourd’hui, et tendent à écraser la complexité du monde.
On trouve par exemple au Danemark et en Scandinavie une gauche qui conjugue la défense de l’État-providence et le refus explicite de l’immigration massive, qui vient le déstabiliser.
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Karima Brikh, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Nuances
On trouve au Québec, inversement, dans la région de Québec, une droite qui se dit conservatrice, mais qui préfère le fédéralisme multiculturaliste canadien à l’indépendance de notre peuple.
Il existe aussi partout en Occident une fausse droite patronale, qui aime l’immigration massive parce qu’elle permet de faire une pression à la baisse sur les salaires.
Retenons que cela dit une chose: plus le Québec se déprendra du progressisme obligatoire, plus il réapprendra à débattre, à voir le monde à travers plusieurs angles. Notre démocratie s’oxygénera.
Retenons une autre chose: la droite n’est pas un gros mot.