Le «p’tit nouveau» de la rentrée: l’«ombudsman de l’éducation» entre en scène
Les élèves et leurs parents, y compris ceux du privé, auront accès à un nouveau processus «simplifié» pour gérer les plaintes dans les écoles

Daphnée Dion-Viens
Fini la course à obstacles pour les élèves et parents insatisfaits des services rendus dans les écoles québécoises: le protecteur national de l’élève, le nouvel «ombudsman de l’éducation», assure que le processus de gestion des plaintes sera plus simple et plus rapide, tout en étant maintenant accessible à ceux qui fréquentent les écoles privées.
À partir du 28 août, un parent insatisfait des services que reçoit son enfant en difficulté ou des mesures prises pour gérer un cas d’intimidation pourra se tourner vers un processus uniformisé de plainte, chapeauté par le nouveau protecteur national de l’élève, Me Jean-François Bernier.
«Le plus important impact va être au niveau de l’accessibilité, de la facilité et de la rapidité», affirme-t-il en entrevue au Journal. Autre nouveauté, des victimes ou témoins de violence sexuelle pourront aussi porter plainte ou faire des signalements dans le cadre de la nouvelle structure en place (voir autre texte).
Au cours des dernières années, des critiques se sont élevées concernant le processus en place dans les centres de services scolaires, véritable «course à obstacles» variant d’une organisation à l’autre qui pouvait s’étirer pendant près d’un an.
Désormais, le processus de plainte se fera en trois étapes réparties sur 45 jours (voir plus bas). Une voie rapide sera aussi mise en place pour traiter les plaintes ou signalements pour violence à caractère sexuel de façon «urgente».
Un mécanisme de protection contre les représailles, prévoyant des amendes «très salées», sera aussi en vigueur (voir détails plus bas).
- Écoutez son entrevue via QUB radio :
Plus de pouvoir
Le protecteur national de l’élève, qui sera assisté par 17 protecteurs «régionaux», aura aussi plus de pouvoir puisque cette équipe sera dorénavant complètement indépendante des centres de services scolaires, assure M. Bernier.
«Il n’y a pas ce lien-là contractuel avec une rémunération, donc tu as toute la marge de manœuvre [dont] tu as besoin pour dire les vraies choses», souligne-t-il.
Les protecteurs régionaux feront des recommandations que les organisations seront toutefois libres ou non de suivre.
Me Bernier pourra toutefois faire des représentations auprès des centres de services récalcitrants et produira annuellement un rapport d’activités, qui sera rendu public.
«Les recommandations, ça fait la job quand il y a des mécanismes autour qui permettent de mettre de la pression. Le rapport annuel, c’est un excellent moyen», lance M. Bernier.
Une fois les recommandations acceptées, l’ancien vice-protecteur du citoyen promet aussi un «suivi serré» afin de s’assurer qu’elles sont bel et bien mises en place.
«On ne fermera pas le dossier tant et aussi longtemps qu’on ne sera pas satisfait de la nature des suivis qui auront été apportés à une recommandation», dit-il.
La nouvelle structure en place assurera aussi une plus grande cohérence, assure M. Bernier. Les décisions rendues par les 17 protecteurs régionaux de l’élève seront revues par le protecteur national qui pourrait intervenir au besoin, afin d’assurer une plus grande uniformité dans le réseau scolaire, dit-il.
De son côté, la Fédération des comités de parents dit avoir bon espoir que ce nouveau mécanisme représentera «un pas en avant».
Une porte d’entrée pour dénoncer les violences sexuelles
Le protecteur national de l’élève, qui sera aussi chargé de recevoir les plaintes et signalements en matière de violence sexuelle, veut mettre en place un mécanisme pour éviter que des délinquants sexuels puissent sévir d’une école à l’autre.
«Comment se fait-il que quelqu’un qui a sévi à une place puisse sévir à une autre place, comme on l’a vu dans les médias? Ça, ça me fatigue pas mal», laisse tomber Me Jean-François Bernier, en entrevue avec Le Journal.
«On n’attendra pas d’avoir des plaintes ou des signalements, on veut se pencher là-dessus dans les prochaines semaines», poursuit-il.
M. Bernier est à la recherche d’une «voie de passage» qui permettrait d’assurer une meilleure fluidité de l’information entre des centres de services et les établissements.
Dans le cadre de sa mission, le protecteur national sera aussi responsable de recevoir les plaintes et signalements en matière de violence sexuelle.
Les appels reçus à la ligne téléphonique spéciale mise en place au printemps pour dénoncer de tels cas seront transférés au protecteur de l’élève à partir de la rentrée. Me Bernier assure qu’une personne en chair et en os sera disponible pour répondre aux appels, du lundi au vendredi.
Ce dernier affirme vouloir apporter une «plus-value» par rapport aux autres acteurs qui interviennent déjà dans ce type de situation.
«Notre job à nous, ce n’est pas de courir après le coupable qui a commis la violence sexuelle, la police est là pour ça. Nous, on est là pour se poser la question: comment cet événement-là a-t-il pu se produire?»
L’instauration d’amendes en cas de représailles pourrait aussi contribuer à changer la donne, espère Me Bernier. Il est important que les gens «n’aient pas peur de parler ou de signaler des choses». «C’est important de les protéger dans la liberté qu’ils doivent avoir.»
Au cours des derniers mois, des acteurs du réseau de l’éducation ont toutefois réclamé davantage de mesures pour protéger les jeunes des violences sexuelles dans les écoles, jugeant celles-ci insuffisantes.
Une loi-cadre, à l’image de celle en vigueur dans les cégeps et les universités, est notamment réclamée par les partis d’opposition à l’Assemblée nationale.
Trois étapes pour porter plainte
- Portez plainte directement auprès de la personne concernée ou à son supérieur immédiat, qui aura 10 jours ouvrables pour vous répondre.
- Si vous demeurez insatisfait, vous devez contacter le responsable du traitement des plaintes de l’organisation (centre de services scolaire, commission scolaire anglophone ou école privée), qui aura 15 jours ouvrables pour traiter votre demande.
- Si vous demeurez insatisfait, vous pourrez vous adresser au protecteur de l’élève de votre région, qui aura 20 jours ouvrables pour examiner votre plainte et formuler des recommandations auprès de l’organisation concernée.
Un fast track pour les cas de violence sexuelle
Les plaintes ou signalements pour violence à caractère sexuel seront traités «en urgence», en s’adressant directement au protecteur régional de l’élève sans devoir passer par les deux premières étapes du processus.
Amendes en cas de représailles
- De 2000$ à 20 000$ pour une personne physique qui exerce des mesures de représailles ou menace de le faire
- De 10 000$ à 250 000$ pour une personne morale qui exerce des mesures de représailles ou menace de le faire
Source: Protecteur national de l’élève
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