Le projet Viande Solidaire pour éviter le gaspillage de milliers de livres de viande
Guillaume Cotnoir-Lacroix
Moisson Estrie et Moisson Granby pourront sauver des milliers de livres de viande destinées à être jetées chaque année grâce à un important partenariat noué avec des producteurs agricoles de la région.
L’initiative Viande Solidaire a vu le jour dans la MRC de Coaticook depuis près de deux ans déjà, mais est aujourd’hui prête à passer à l’étape supérieure.
Au cœur de la problématique se trouve la situation d’animaux appelés «fragilisés», qui ont subi une blessure et qui ne peuvent être vendus dans les encans habituels.
En 2023, des producteurs de Coaticook en ont eu assez du gaspillage alimentaire: ces bêtes dont la viande était encore comestible étaient euthanasiées avant d’être récupérées par une entreprise de gestion de déchets.

«C’était inconcevable. Nous, notre profession, c’était de nourrir la population et là on jetait de la viande de bonne qualité», explique André Couture, copropriétaire de la Ferme Caubert.
Des démarches ont été entamées auprès des organismes en dépannage alimentaire locaux ainsi qu’avec l’abattoir régional de Coaticook. Tout le monde devait y mettre du sien, incluant les producteurs: les animaux blessés doivent être transportés directement de la ferme à l’abattoir accrédité le plus près, pour respecter la réglementation en vigueur quant au bien-être des animaux.
Près de deux ans après les balbutiements du projet, Moisson Estrie et Moisson Granby reprennent officiellement le flambeau de l’initiative qui a pris de l’ampleur.

À l’abattoir de Coaticook s’est récemment ajouté l’abattoir de Racine, propriété de la famille Bouffard (boucheries Face de Bœuf).
«Quand Moisson Estrie nous a demandé de participer à Viande Solidaire, on a tout de suite embarqué, ce qui permet aux producteurs qui sont plus près de la région de Racine d’avoir accès à un abattoir plus près de leur ferme», explique Sylvie Bouffard, copropriétaire chez Face de Bœuf.
En deux ans, une trentaine de vaches qui par le passé auraient été euthanasiées et possiblement jetées ont pris le chemin de l’abattoir, la viande étant ensuite distribuée à Moisson Estrie et Moisson Granby. Un calcul rapide permet d’établir qu’environ 9 000 livres de viande ont pu être sauvées.
«On vise à aller chercher une quantité de viande à faible coût qui va nous permettre de la redistribuer dans nos différents organismes communautaires, soit sous forme de dépannage alimentaire, soit sous forme de repas préparés, par exemple les boîtes à lunch pour les écoles», explique Christian Bibeau, directeur général chez Moisson Estrie.

Les producteurs peuvent faire don de leur animal et bénéficier d’un reçu aux fins d’impôts, mais Moisson Estrie offre aussi la possibilité de leur payer jusqu’à 1,50$ par livre de viande, ce qui permet de payer les frais de transport vers l’abattoir et une partie des coûts d’élevage des animaux.
Les deux producteurs sur place lors de l’annonce mardi matin ont toutefois choisi de faire don de leurs animaux blessés, depuis deux ans. Tant Vincent Lachance de la ferme Comptal qu’André Couture de la ferme Coubert ont dit ressentir une forme de fierté à l’idée de donner à Moisson Estrie et Moisson Granby une viande parfaitement comestible qui était autrefois destinée à être jetée. Ils ont chacun fait don de trois vaches depuis le début du projet.
Tous les intervenants rencontrés mardi estiment que l’initiative est maintenant prête à prendre de l’ampleur. Les deux abattoirs ont la capacité de le faire et tous espèrent que l’ensemble des producteurs de la région, peu importe leur type d’élevage, décideront d’envoyer leurs animaux blessés vers le projet Viande Solidaire.