Projet de loi de Fitzgibbon: les producteurs privés pourront vendre leur électricité à un voisin
Le gouvernement Legault bouscule le monopole d’Hydro-Québec

Nicolas Lachance
Le ministre Pierre Fitzgibbon bouscule le monopole d’Hydro-Québec et permettra aux producteurs privés d’énergies renouvelables de vendre leur surplus en électricité à un voisin afin de rentabiliser leurs investissements.
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Le super-ministre Pierre Fitzgibbon a finalement déposé son projet de loi «assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques».
Si la loi est adoptée, les producteurs d’énergie renouvelable auront la «possibilité» de vendre leur électricité «à un consommateur unique, situé sur un terrain adjacent à leur site de production.»
Ce producteur devra obtenir l’approbation du gouvernement pour agir. Québec souhaite ainsi permettre le développement de projets qui ne peuvent être raccordés au réseau d’Hydro-Québec et permettre la rentabilité des infrastructures de ces producteurs.
Ce changement législatif permettra aux entreprises comme TES Canada de marchander leur électricité.
Un plan sur 25 ans
Dans une publicité pour faire la promotion de son projet de loi, dans laquelle il remplit son lave-vaisselle de nuit, Pierre Fitzgibbon affirme qu’il «veut plus d’éoliennes, plus de solaire, et de nouveaux barrages.»
Rappelons que pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050, Hydro-Québec prévoit d’investir 185 milliards $ pour augmenter sa capacité de production et de transport.
- Écoutez l'entrevue avec Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire au département de sciences de la décision, via QUB :
Il souhaite ajouter entre 8000 et 9000 mégawatts au réseau d’ici 2035.
«Le projet de loi propose une cible transitoire de 255 TWh d’électricité d’ici le 1er janvier 2035, soit environ 60 TWh de plus que les approvisionnements actuels», indique le ministère de l’Énergie.
Un Plan intégré des ressources énergétiques sera élaboré. Il devra détailler les sources énergétiques dont le Québec aura réellement besoin pour les 25 prochaines années.
Il s’agit de «l’élément central du projet» de loi et la «vision» du gouvernement pour atteindre la décarbonation.
«On veut que les Québécois consomment plus d’énergie propre, moins d’énergie sale», a affirmé le ministre Pierre Fitzgibbon.
Ce plan sera revu tous les six ans et permettra de planifier la construction d’ouvrage selon les besoins qui auront été identifiés en matière de barrages, éoliennes, solaire et autres.
«Il inclurait notamment une cible d’approvisionnement en électricité et autres sources d’énergie propre pour répondre aux besoins des marchés québécois», signale-t-on.
Gré à gré
Afin d’accélérer ces grands projets, le processus d’appel d’offres sera aussi simplifié, ce qui permettra à Hydro-Québec de les réaliser plus rapidement.
«On va permettre à Hydro-Québec de développer des projets plus rapidement, sans appel d’offres. Le coût des projets sera contrôlé à la régie et ce qui doit être inclus dans les tarifs également. Finies les nombreuses étapes de décrets gouvernementaux qui précèdent des grilles de critères», a-t-il expliqué
Le ministre relance les projets de minicentrales privées et municipales. «On permet à Hydro-Québec de se départir des centrales de 100 mégawatts et moins», a confirmé le ministre, et ce, afin de permettre à Hydro-Québec de se concentrer sur ses gros chantiers.
Ce qu'ils ont dit :
«Nous constatons déjà qu’il ouvre une brèche à la privatisation en autorisant une entreprise privée à vendre de l’énergie à une autre entreprise privée (...) Ce n’est pas acceptable»
- le péquiste Pascal Paradis
«Un enjeu majeur avec ce projet de loi, c'est que le gouvernement parle des deux côtés de la bouche. Le ministre souligne l'importance de la sobriété et de la diminution de la consommation, mais l'objectif réel c’est d'accélérer la production énergétique. C’est plutôt incohérent»
- le directeur des relations gouvernementales d’Équiterre, Marc-André Viau
«Le risque numéro 1 identifié par Hydro-Québec c’est l’accès à la main d’œuvre. Évidemment que permettre du privé au privé, ça va prendre une partie de la main-d’œuvre et mettre à risque le Plan d’action d’Hydro»
- le solidaire Haroun Bouazzi
«Nous comprenons le besoin d’encourager l’efficacité énergétique, mais de nombreux Québécois ne sont pas nécessairement en mesure de choisir le moment où ils peuvent se servir de leurs électroménagers que ce soit en raison de leurs horaires ou autres restrictions dans leur immeuble. Nous espérons que ces situations pourront être prises en compte dans le débat»
- Carlos Castiblanco, économiste chez Option consommateurs
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