Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Monde

Burkina Faso: situation confuse concernant le sort du président Kaboré

AFP
Partager

AFP

2022-01-24T11:00:30Z
2022-01-24T19:06:51Z
Partager

Ouagadougou | La situation était confuse lundi concernant le sort du président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, des sources sécuritaires ayant annoncé qu’il était détenu par des soldats qui se sont mutinés en raison de la dégradation dans leur pays en proie aux violences djihadistes.

• À lire aussi: Burkina Faso: des soldats se mutinent pour exiger le départ des chefs de l’armée

• À lire aussi: Mali: quatre soldats tués lors d'une attaque dans l'ouest du pays

Les États d’Afrique de l’Ouest ont indiqué suivre «avec une grande préoccupation» l’évolution de la situation au Burkina Faso, «caractérisée» depuis dimanche «par une tentative de coup d’État».

«Le président Kaboré, le chef du Parlement [Alassane Bala Sakandé] et des ministres sont effectivement aux mains des soldats», à la caserne Sangoulé Lamizana de Ouagadougou, a déclaré à l’AFP une source sécuritaire, une information confirmée par une autre source au sein des services de sécurité.

Mais une source gouvernementale a ensuite affirmé que le président avait été «exfiltré» de sa résidence dimanche soir par des gendarmes de sa garde, «avant l’arrivée d’éléments armés qui ont tiré sur les véhicules de son convoi».

Un journaliste de l’AFP a vu dans la matinée, près de la résidence du chef de l’État, trois véhicules criblés de balles. Des traces de sang étaient visibles sur l’un d’eux.

Publicité

Selon cette source, «la situation est confuse», une confusion alimentée par l’absence à la mi-journée lundi de toute déclaration de la part des soldats mutins ou de proches du chef de l’État.

Sur le compte Twitter de M. Kaboré, un message publié en début d’après-midi — dont il était impossible de savoir s’il avait été écrit par lui directement ni dans quelles circonstances — invite «ceux qui ont pris les armes à les déposer dans l’intérêt supérieur de la nation». «C’est par le dialogue et l’écoute que nous devons régler nos contradictions», ajoute-t-il.

Au pouvoir depuis 2015, le président Kaboré, réélu en 2020 sur la promesse de faire de la lutte anti-djihadiste sa priorité, était de plus en plus contesté par une population excédée par les violences djihadistes et son impuissance à y faire face.

Soldats à la télé nationale 

Un journaliste de l’AFP a constaté qu’une dizaine de soldats encagoulés et armés s’étaient postés lundi matin devant le siège de la Radiodiffusion Télévision du Burkina (RTB), qui a diffusé à son journal de la mi-journée un reportage sur les habitants de Ouagadougou, vaquant normalement à leurs occupations.

La France a appelé lundi ses ressortissants à la prudence et leur a conseillé d’éviter tout déplacement au Burkina.

Des soldats se sont mutinés dimanche dans plusieurs casernes pour réclamer le départ des chefs de l’armée et des «moyens adaptés» à la lutte contre les djihadistes qui frappent ce pays depuis 2015.

Des tirs avaient été entendus en fin de journée près de la résidence du chef de l’État, et un hélicoptère avait survolé la zone tous feux éteints, selon des résidents.

Publicité

Ces mutineries sont survenues alors que le Sahel est de plus en plus déstabilisé par les djihadistes qui frappent aussi le Niger et le Mali voisin, pays qui a été le théâtre de deux coups d’État en quelques mois.

Au-delà, en Afrique de l’Ouest, la fragilité des États s’est aussi manifestée avec un putsch en Guinée.

Plusieurs manifestations de colère ont lieu depuis plusieurs mois dans les villes du Burkina pour dénoncer l’incapacité du pouvoir à contrer les attaques djihadistes qui se multiplient, souvent interdites et dispersées par les policiers antiémeutes.

Tout au long de la journée de dimanche, des manifestants ont apporté leur soutien aux mutins, avant d’être dispersés par la police.

De nouvelles manifestations de soutien ont eu lieu lundi.

«Moyens adaptés»

Le gouvernement avait reconnu des tirs dans plusieurs casernes, démentant «une prise de pouvoir par l’armée».

«Nous voulons des moyens adaptés à la lutte» anti-djihadiste «et des effectifs conséquents», ainsi que le «remplacement» des plus hauts gradés de l’armée nationale, a affirmé dans un enregistrement sonore parvenu à l’AFP un militaire de la caserne Sangoulé Lamizana, sous couvert d'anonymat.

Des discussions infructueuses ont eu lieu entre les représentants des mutins et le ministre de la Défense, le général Barthélémy Simporé.

Le camp Sangoulé Lamizana de Ouagadougou, où pourrait se trouver le président Kaboré, est aussi celui où est incarcéré le général Gilbert Diendéré, proche de l’ancien président Blaise Compaoré renversé en 2014.

Le général Diendéré a été condamné à 20 ans de prison pour une tentative de putsch en 2015 contre le président Kaboré et est présentement jugé pour son rôle présumé dans l’assassinat, en 1987, du président d’alors Thomas Sankara, icône panafricaine.

Le procès des assassins présumés de Sankara, qui devait entrer lundi dans la phase des réquisitoires et plaidoiries devant le tribunal militaire de Ouagadougou, a été reporté à une date indéterminée, selon une source judiciaire.

Dans le sillage du Mali et du Niger, le Burkina Faso est pris depuis 2015 dans une spirale de violences attribuées à des groupes armés djihadistes, affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique, lesquelles ont fait en près de sept ans plus de 2000 morts et contraint 1,5 million de personnes à fuir leurs foyers.

Publicité
Publicité