Le PM déroutant

Karine Gagnon
Comment le premier ministre peut-il sérieusement prétendre que l’abandon du trambus, qui circulait au centre-ville de Québec, nuit à la desserte des banlieues ?
La pression s’accentue sur le gouvernement caquiste, qui bloque le projet de réseau structurant de Québec sous prétexte « qu’il faut mieux desservir les banlieues ».
Hier, dans une rare sortie enflammée sur le sujet, le premier ministre François Legault a prétendu que « les chiffres parlent d’eux-mêmes ».
Au lieu de tenir compte des notions incontournables d’achalandage, le politicien se base sur l’explosion des coûts du tramway.
Il souligne que la portion destinée à la banlieue de Québec dans le réseau coûtera « un petit 200 millions » au lieu du milliard prévu initialement, en incluant le trambus.
Pourtant, le trambus desservait surtout le centre-ville, et non la banlieue, ce qui rend la déclaration de M. Legault d’autant plus déroutante. Et la desserte du secteur n’a pas été abandonnée, mais remplacée par des métrobus et voies réservées.
Selon plusieurs experts joints cet automne par Le Journal, la nouvelle mouture du projet, sans trambus, n’engendrait d’ailleurs pas de changement structurel et répondait bel et bien aux besoins de la population en améliorant le service.
Puis, la carte publiée dans nos pages hier, version la plus à jour de la desserte du Réseau, offre pourtant une preuve éloquente que la banlieue sera très bien desservie lors de la première phase.
Attentes irréalistes
Il est par ailleurs normal que la colonne vertébrale, soit le tramway, desserve en premier lieu les secteurs les plus achalandés, et soit plus coûteuse. Il s’agit d’une infrastructure lourde dont les coûts sont les plus susceptibles de varier en cours de conception.
La Ville a dû abandonner le trambus pour respecter le carcan budgétaire dans lequel la CAQ inscrit le projet. Les coûts du tramway avaient explosé, mais l’offre s’avérait aussi trop capacitaire pour la demande dans le secteur.
Compte tenu des attentes surréalistes et illogiques du gouvernement, on finit par se demander si le budget de 3,3 milliards est, lui, vraiment réaliste. Surtout quand on voit l’explosion des coûts du REM à Montréal.
Le gouvernement n’a encore offert aucune explication valable sur sa position.
Il préfère persister dans son application d’un système de « deux poids deux mesures » pour Québec.