«Le plus vieux prisonnier politique» de Hong Kong, Jimmy Lai

Agence France Presse
Jimmy Lai, magnat de la presse pro-démocratie à Hong Kong, jugé à partir de lundi pour crimes contre la sécurité nationale, est l'un des dissidents les plus célèbres de Hong Kong et l'une des vieilles bêtes noires de Pékin.
Il est le premier à avoir été accusé de «collusion avec des forces étrangères» en vertu de la loi sur la sécurité nationale, imposée par Pékin en 2020 un an après les grandes manifestations pro-démocratie.
Un «rebelle-né»
Le milliardaire Jimmy Lai, qui aime se présenter comme un «fauteur de troubles», soutient depuis longtemps le mouvement démocratique de Hong Kong, réprimé en 2019.
Né en Chine continentale, il est arrivé clandestinement à l'âge de 12 ans à Hong Kong où il a travaillé dans des ateliers clandestins avant de fonder en 1981 ce qui deviendra l'empire international du textile Giordano.
M. Lai a fondé sa première publication, très critique de l'appareil chinois, peu après que les chars chinois ont été envoyés sur la place Tiananmen à Pékin en 1989 pour écraser les manifestations pro-démocratie.
Ses deux principaux titres, le quotidien Apple Daily et le magazine Next exclusivement numérique, étaient extrêmement populaires à Hong Kong, mêlant sensationnalisme et reportages politiques percutants.
Ils faisaient également partie des rares publications ayant ouvertement pris le parti des grandes manifestations pro-démocratie à Hong Kong en 2019. Ce qui a valu à Jimmy Lai d'être qualifié de «traître» par les médias d’État chinois.
Peu avant son arrestation en 2020, à l'AFP qui lui demandait pourquoi il ne profitait pas paisiblement de sa fortune, sans faire de bruit comme tant de magnats de Hong Kong, M. Lai avait répondu : «je suis peut-être un rebelle-né, peut-être que je suis quelqu'un qui, outre l'argent, a besoin de donner beaucoup de sens à sa vie.»
Le «glas pour Hong Kong»
Le magnat avait ajouté que la loi de Pékin sur la sécurité nationale sonnerait «le glas pour Hong Kong».
Il a été arrêté pour la première fois en août 2020 au moment d'une perquisition de Apple Daily.
En décembre 2020, un juge lui avait accordé la libération sous caution de 10 millions de dollars de Hong Kong (1,7 million de dollars) mais une semaine plus tard la plus haute cour de Hong Kong avait ordonné son retour en prison où il est détenu depuis, en attendant son procès qui s'ouvre lundi.
Il est, selon son fils Sébastien Lai, «le plus vieux prisonnier politique de Hong Kong».
Son avocat étranger récusé
Un ensemble de règles différentes et plus strictes s'appliquent aux affaires de sécurité nationale depuis l'annulation de la libération sous caution de M. Lai, une décision qui a fait jurisprudence et affecté des dizaines d'affaires ultérieures.
Pour se défendre à son procès, M. Lai avait choisi Tim Owen, célèbre avocat britannique, spécialiste des droits humains mais Pékin a accordé de nouveaux pouvoirs au dirigeant de Hong Kong pour qu'il récuse les avocats étrangers dans les affaires liées à la sécurité nationale.
Le parlement pro-Pékin de la ville est allé plus loin en mai, en adoptant des lois exigeant des avocats étrangers une autorisation spéciale pour intervenir sur ce type de dossiers.
Ce différend donnera lieu à une audience distincte du procès de M. Lai, l'an prochain.