Le maître de l’océan: plonger au cœur de la vague
Marie-France Bornais
Face aux situations difficiles que la vie ne manque pas de présenter à tout un chacun, Diane Ducret propose de plonger au cœur de la vague plutôt que surfer dessus. Son nouveau roman, Le maître de l’océan, se présente sous la forme d’un conte initiatique inspiré de l’Orient. Dans cette histoire riche d’enseignements, un sage taoïste raconte le cours mouvementé de sa vie. Hanté par le deuil et le chagrin, l’orphelin réfugié dans un monastère refuse de devenir moine tant et aussi longtemps qu’il n’a pas vu la mer.
À travers cette histoire allant de l’Orient à l’Occident, Diane Ducret évoque la mer, les vagues et le ciel, la foi, l’harmonie entre le corps et l’esprit, entre l’homme et la nature. La quête de soi de son héros et le besoin qu’il a de retrouver une paix profonde sont aussi des thèmes contemporains.
Diane Ducret, écrivaine douée, a relevé de nombreux défis dans sa vie et celui qu’elle affronte depuis les derniers mois n’est pas le moindre : elle lutte contre une maladie terrible.
« Depuis deux ans, c’est assez difficile et c’est d’ailleurs un peu la raison de ce livre », révèle-t-elle, en entrevue téléphonique.
« Jeune, j’avais déjà eu un accident de cheval et une opération qui m’avait empêchée de marcher pendant près d’une dizaine d’années. On m’avait annoncé que je ne remarcherais jamais, quand j’étais adolescente. J’ai eu une dizaine d’opérations, j’ai passé dix ans à me battre. J’avais beaucoup étudié la philosophie, à l’époque, pour me permettre de trouver des moyens de réinventer une vie qui n’était plus là et des moyens de ne pas se sentir en exil de sa propre vie.
« Peu de temps avant le confinement, on m’a annoncé que la bactérie nosocomiale que j’avais attrapée à l’hôpital, qui m’avait rongé une jambe, était toujours là et me tuait à petit feu. »
Le voyage intérieur
Elle a eu envie de revenir à l’intérieur d’elle. « Face à la pandémie, ça me semblait aussi le bon moment pour répondre à cette immobilité contrainte. Retrouver le sens du voyage intérieur, retrouver le sens de ce que c’est que le saut dans le vide, la vraie foi intérieure, la spiritualité, avec l’image d’un jeune orphelin qui effectue ce grand voyage entre l’Orient et l’Occident. »
L’écriture lui a-t-elle apporté une ligne directrice pour traverser ses propres épreuves ?
« J’ai toujours pensé que la littérature ne devait pas être le lieu de psychanalyse d’un auteur. Quand on m’a annoncé ça, c’était un coup dur, très dur, et en plus, la pandémie arrivait. J’apprenais que j’étais immunodéficiente, donc très fragile, au moment où arrivait un virus qui pouvait tuer les gens comme moi. »
« Je vais bien »
« Ça va te sembler dingue ce que je vais te dire, mais en fait, je vais bien. Je suis équipée pour ça. Intérieurement, je sais que je vais m’en sortir. Je sais qu’il existe une réponse. Il y aura un traitement. [...] Je me suis rendu compte que j’allais mieux que bien d’autres qui n’avaient pas de maladie. Mais pourquoi ça va ? Où je suis allée chercher ça ? »
Elle a compris que sa force intérieure venait de tous les textes spirituels et religieux qu’elle avait lus, mais aussi du fait qu’elle avait passé beaucoup de temps devant l’océan.
« J’en ai tiré une philosophie de la vague et j’ai eu envie de transmettre ça aux autres. On va être très nombreux à avoir la sensation d’être seuls, perdus en pleine mer, à avoir perdu tous nos repères, notre boulot, notre mari, ce qui faisait notre vie. Je pense que les gens ont besoin d’une grande bouffée d’air, de retrouver un horizon stable, infini. »
- Diane Ducret est l’auteure de nombreux romans et d’essais, dont Femmes de dictateurs, La chair interdite, Les indésirables, La meilleure façon de marcher est celle du flamant rose.
- La dictatrice, son dernier roman, est en cours d’adaptation en série aux États-Unis.