Visages de notre histoire: Le grand Antonio, une force exceptionnelle

Centre des Mémoires Montréalaises
Les origines d’une légende montréalaise
Né en 1925, probablement en Yougoslavie (aujourd’hui la Croatie), Anton Baričević immigre en 1946 au Canada à l’âge de vingt ans. Celui qu’on appelle désormais Antonio Barichievich impressionne déjà par sa grande taille (1,93 m ou 6’4) et sa vigueur peu commune. Ses exploits ne passent pas inaperçus dans un Québec ouvrier où la force physique et les hommes forts ont toujours la cote. Il impressionne déjà les débardeurs du port de Montréal avec ses prouesses hors de l’ordinaire. En 1952, il apparaît dans Le livre Guinness des records pour avoir déplacé un train de 433 tonnes sur 19,8 mètres ! Mais ce sont ses performances publiques dans le tournant des années 1960, comme celui de tirer une Chevrolet avec ses cheveux ou encore quatre autobus pleins de passagers sur la rue Sainte-Catherine, qui lui attirent une renommée considérable. La carrière du Grand Antonio est lancée !
RÉALISATIONS
Un homme fort populaire

Le Grand Antonio connaît un succès considérable dans les décennies 1960, 1970 et 1980. Comme lutteur professionnel, sa force peu commune lui permet d’affronter plusieurs adversaires à la fois ! Sa personnalité plus grande que nature l’amène à prendre part à plusieurs émissions de télévision et même à des films, comme le succès franco-canadien La Guerre du feu (1981) de Jean-Jacques Annaud. Sa renommée dépasse les frontières. Très populaire au Japon, où il séjourne à plusieurs reprises, il fait la démonstration de sa force légendaire dans l’arène et dans les rues de Tokyo. Dans les années 1990, la force mais aussi l’intérêt pour le Grand Antonio décline, ce qu’il refuse d’accepter. Les habitués le croisent au Dunkin’ Donut à l’angle de la rue Beaubien et de la 10e avenue ou encore sur un banc au centre-ville, où il vend des cartes postales rappelant sa gloire d’antan et son exploit préféré : celui d’avoir tiré quatre autobus.
HÉRITAGE
Le dernier des bons géants

Peu après le décès de l’homme fort en 2003, le journaliste Ronald King rappelle que le Grand Antonio était une « présence pas ordinaire dans nos vies très ordinaires ». À la fois un peu extra-terrestre ou même préhistorique, l’excentrique personnage a animé avec passion les rues de Montréal de ses prouesses hors norme. Grâce au pouvoir de l’image décuplée par le cinéma et la télévision, il contribue à réinventer la représentation des hommes forts et des forains des siècles derniers, comme le géant Beaupré, Joe Montferrand ou encore Louis Cyr. Depuis 2003, sa vie a fait l’objet d’un documentaire, d’une biographie et... d’un livre pour enfant. Cherchant à documenter le personnage, l’autrice et illustratrice, Élise Gravel, hérite des possessions du célèbre homme fort et en fait don en 2017 au musée McCord. Aujourd’hui, un banc dans le parc Beaubien rappelle la présence inoubliable du Grand Antonio dans le quartier Rosemont.
*Recherche et rédaction par l’historienne Maude Bouchard-Dupont