Publicité
L'article provient de TVA Nouvelles

Le désengagement des médecins dans le système québécois

Photo Agence QMI, JOEL LEMAY
Partager

Claire Gamache, Olivier Farmer

2025-10-21T16:20:11Z
Partager

Alors que le gouvernement envisage l’imposition de la loi 106, ainsi que d’une loi spéciale sous bâillon, il est important pour le public de comprendre les limites d’une telle loi spéciale et les conséquences d’un désengagement des médecins.

L’enseignement médical est une vocation. Il est profondément inscrit dans la déontologie, mais aussi dans les valeurs du corps médical. Nous sommes convaincus que la vaste majorité de nos collègues veulent mettre fin à ce moyen de pression au plus vite.

Cependant, au-delà de l’enseignement, un désengagement pourrait entraîner une série de conséquences extrêmement dommageables pour le système de santé, et évidemment par ricochet pour les patients.

Productivité quantitative

Les chefs de service et de département risquent de démissionner. Le travail bénévole de coordination de terrain, sans lequel l’organisation des stages cliniques pour les externes et résidents est impossible, ne se fera plus. La collaboration des médecins à toutes les démarches d’amélioration des services aux patients sera limitée, avec, à terme, une progressive mais certaine dégradation de l’organisation des soins. L’attention à la qualité des soins et de la relation avec les patients va être mise en compétition avec des impératifs de productivité (on l’entend déjà au GAP: un problème, un rendez-vous). Les soins donnés aux personnes malades et vulnérables, très difficiles à concilier avec des objectifs de productivité, seront activement découragés et pénalisés.

Publicité

Plusieurs exemples en médecine générale et spécialisée sont peu compatibles avec cette productivité quantitative: les PRISM (programmes de réaffiliation en itinérance en santé mentale), les patients avec diagnostics de TNC (troubles neurocognitifs) qui demandent les DAAMM (directives anticipées d’aide médicale à mourir), les grands prématurés en pédiatrie, les patients en soins palliatifs sont autant de clientèles complexes qui sollicitent davantage les rencontres interdisciplinaires, les discussions avec les proches, les réévaluations périodiques que la quantité de nouveaux cas.

Engagement

Le leadership clinique est un ingrédient essentiel à l’engagement des soignants. Cet engagement est l’antidote à l’épuisement professionnel. Il soutient la qualité des soins, des plaidoyers importants pour des personnes négligées par le système de santé, et fait la promotion de nombreuses innovations prometteuses. Une démotivation et un désengagement de nos collègues causeraient un tort inestimable à notre système de santé qui a déjà fait l’envie d’autres pays.

L’antagonisme actuel entre le gouvernement et les médecins doit cesser. Les patients ont besoin que nous travaillions ensemble.

Claire Gamache est présidente de l’Association des médecins psychiatres du Québec. Elle a développé avec ses collaboratrices un programme de développement du leadership positif en médecine, reconnu et largement diffusé dans les établissements du réseau.

Olivier Farmer est psychiatre, connu pour son travail auprès de personnes en situation d’itinérance, et pour avoir longtemps milité pour des services psychiatriques de proximité.

Publicité
Publicité